Urban Comics
  Batman #34 : Robin (4)
 
Auteur : Lex
Date de parution : Février 2008

Dick avait peur. Aux tréfonds de son âme, il sentait cet obscur sentiment le paralyser et ça n’annonçait rien de bon. En face de lui se trouvait la créature qui terrorisait tout les criminels de Chicago, la chose qu’on disait invulnérable, un monstre fait de chair et de peur dont la seule obsession semblait être de châtier les fous qui osaient enfreindre les lois. Et dans cette ville, ils étaient beaucoup. Plus qu’un homme, il était Batman, la chauve-souris humaine qui faisait régner la justice toute puissante et impartiale sur la ville. Jusque là, personne n’était parvenu à l’arrêter dans la mission qu’il s’était fixé, à savoir faire taire à jamais la criminalité et assurer à chacun le bonheur d’une vie plus heureuse et moins dangereuse. Et ce n’était pas faute de le vouloir. La police et les barons du crime de Chicago se démenaient corps et âmes à la traque du démon nocturne que tous redoutaient.

Batman n’était pas comme les autres justiciers. Il était différent et instable et c’était l’instabilité même du personnage - que beaucoup disait fou - qui effrayait tant Dick. Car il était capable de tout, du pire comme du meilleur. Et c’était le pire qui s’inscrivait dans l’esprit de Dick en ce moment même. Ce Batman torturé qui prenait le contrôle de Chicago, qui passait outre la justice légale pour imposer sa propre vision de la chose, à savoir un total contrôle de la pègre chicagoane par la mise en place d’un système de terreur qui avait provoqué de terribles conséquences. Parmi l’une d’elle, la prise d’otages de policiers et de leurs familles par le feu Cole Cash, ancien caïd tout puissant, tué pendant la guerre des gangs. Depuis lors, beaucoup de gens avaient cessé d’accorder leur confiance au justicier de la nuit et le craignait même souvent. Oui, Batman était un être au double visage, aux faces positives et négatives qui oscillaient dangereusement de l’un et de l’autre côté sans réellement s’équilibrer. Et c’était ça qui faisait vraiment peur à un Dick peu préparé à affronter ce type de situation. L’idée que Batman sombre dans la folie et le tue dans un accès de rage le hantait.

Qu’est-ce qui lui faisait dire que l’homme - si s’en était un - devant lui était prêt à le réduire en bouillie ? Peut être le fait que ses poings étaient serrés et qu’il était prêt à cogner comme jamais il ne l’avait fait. Peut être aussi ce regard qui balayait le visage de Dick et qui exprimait sans besoin de paroles toute la hargne et la rage qui habitaient le personnage. Car c’était bien de la rage, voir de la haine, qui émanait du Batman. Et ça ne présageait vraiment, mais vraiment rien de bon. Apparemment, il n’avait pas envie de calmer ses pulsions et son instinct animal allait sûrement prendre le dessus dans quelques instants.

Et Dick ne savait vraiment pas comment il allait pouvoir résister au monstre de Chicago qui était venu à bout de criminels hors normes, disait-on. Dick s’était battu contre des terroristes, notamment leur chef, une secte de moines fous ayant commis une série de crimes sordides dont celui de Loren, les gangs et la mafia de San Francisco mais jamais il n’avait eu à affronter un être dégageant un tel magnétisme et une telle puissance. Lui qui croyait être capable de vaincre tout et n’importe qui, venait de comprendre qu’il ne ferrait pas le poids une seule seconde contre Batman, contre l’invincible Batman. Il était fort, très fort, et ça se voyait au premier regard. Sans compter qu’il était effrayant. Vraiment effrayant. Dick tremblait pour la première fois de sa vie devant un combat qui allait se jouer.

Car il allait y avoir combat, c’était une certitude aux yeux des deux hommes qui s’observaient. Les signes ne trompaient pas. Dick avait put voir un scintillement dans l’ombre et s’était souvenu des célèbres armes en formes de chauves-souris qu’utilisait Batman pour stopper les criminels. Si il sortait des armes, lui n’aurez pour toute défense que ses mains nues et les techniques qu’il maîtrisait. Et il savait que ça n’allait pas tarder à exploser entre eux deux et que le bar déserté depuis l’arrivé du justicier masqué serrait le théâtre d’un affrontement au cours duquel il serrait à la merci de son adversaire.

Sentant son rythme cardiaque augmenter au fur et à mesure que la pression allait croissante et que l’atmosphère devenait électrique, Dick tentait de se ressaisir. Il était Robin, bien que ce nom soit entacher du sang d’un innocent, celui de Tim, et le leader des justiciers de San Francisco. Et bien que Batman soit à n’en pas douter supérieur à lui, il ne devait pas pour autant lui laisser l’opportunité d’avoir l’ascendant psychologique. Il devait chasser la terreur qui envahissait son être et s’insinuait dans tout ses muscles, laisser son cerveau reprendre le dessus et mettre en place l’efficacité habituelle qui siait au jeune héros. Oui, il devait oublier sa peur pour mieux combattre. Et pour cela, parler serrait une bonne idée pour évacuer le stress. Savoir, pas exemple, pourquoi Batman lui voulait du mal alors qu’il venait à Chicago pour la première fois depuis l’apparition du justicier. Lentement, Dick articula de la manière la plus calme possible :

-Qu’est-ce que vous me voulez, Batman ?

Batman serra ses poings encore plus fort. Ce qu’il lui voulait ? Lui briser les os, lui casser la gueule comme jamais il n’en avait eu envie. Il n’était pas un meurtrier. Il n’était pas un assassin. Il ne le tuerait pas. Même s’il en avait envie, il ne le ferrait pas. Il avait des règles, des principes de bases, qu’il ne pouvait enfreindre aussi aisément. Il savait où cela l’avait conduit la dernière fois : au bord de la folie. Il était devenu paranoïaque, violent, totalitaire même. Pour lui, la criminalité devait être arrêtée à tout prix, même au prix de la liberté de chaque citoyen de disposer de lui-même. Cette fièvre folle avait failli le détruire comme elle avait failli détruire Chicago, la ville qu’il s’était juré de défendre.

Non, plus jamais il n’irait jusque là, malgré qu’il en ait envie parfois. Il ne serrait jamais comme les criminels qu’il combattait ou comme Silence, un mystérieux meurtrier qui tuait pour des raisons obscures et qui lui ressemblait tellement. Il n’allait pas tuer Dick Grayson, non, mais il n’allait pas se gêner pour le frapper, même s’il était mineur. C’était de sa faute si Tim était mort. S’il n’avait pas eu l’idée de se déguiser avec ses amis, jamais Tim n’aurait eu l’idée de suivre son exemple. C’était la pensée même que la célébrité d’un justicier, de ce justicier, avait conduit à la mort d’un innocent qu’il ne supportait pas. Il fallait qu’il cogne pour exprimer cette colère au fond de lui et quoi de mieux que l’homme qui était coupable à ses yeux pour passer ses nerfs ? La colère l’aveuglait mais il s’en fichait, il fallait que ça sorte. En serrant les dents, il répondit à Dick :

-A cause de toi, Tim Drake est mort. Tu te souviens de Tim ? Le garçon qui a voulu imiter Robin. Qui a voulu t’imiter.

Un frisson parcourut le jeune Grayson. Ainsi il était au courant de l’histoire, pourtant très peu médiatisée. Il connaissait également son implication indirecte dans le drame et c’était sans doute ça qui le mettait tant en rogne. Oui, il connaissait sa double identité, sa vie chez les Titans et sans doute aussi son histoire. Il n’avait jamais pensé que quelqu’un puisse enquêter sur lui et ses amis et connaisse son identité secrète. Seuls Garfield, Victor, Tula et Raven la connaissaient. Qu’un justicier aussi dangereux que Batman ait cette information entre ses mains le terrifiait et continuait à alimenter sa peur, cette peur qu’il devait combattre pour pouvoir réussir à s’en sortir contre son adversaire. Gardant un masque froid, à l’image du Batman, Dick répliqua :

-Je suis désolé pour ce qui s’est passé. Tim est mort et… je m’en veux énormément. J’aimerais tellement remonter le temps pour que cette catastrophe soit évitée. Si vous saviez à quel point je m’en veux. Ca me rend malade mais je dois continuer à vivre malgré ça. Je suis fautif, d’accord, mais c’est Tim et lui seul qui a pris la décision de m’imiter. Si seulement les médias ne parlaient pas de nous que comme des êtres invincibles, des modèles, alors ceci ne se serrait jamais produit. Je tente de faire de mon mieux pour protéger les innocents et vous savez ce que c’est. Nous sommes tous confronté à ce genre de situation et ça me bouleverse autant que vous, croyez-le. Mais en tant que justicier, je ne peux pas abandonner ce que je fais et laisser San Francisco aux mains des criminels qui s’y sont installés. Je ne peux pas abandonner ce que j’ai commencé ou mon combat aura été inutile. J’ai les même buts que vous, Batman : je veux que toute cette violence qui gangrène nos villes et notre société en général s’arrête. C’est pour ça que je combat. Vous comprenez ?

Son sang bouillonnait dans ses veines. Batman avait envie de bondir sur Dick et de le frapper jusqu’au sang, jusqu’à ce qu’il rende l’âme. Mais Bruce n’était pas de cet avis. Ce que disait ce garçon était vrai. La vie d’un justicier était agrémentée de drames horribles qu’on ne pouvait oublier mais qu’on devait surmonter pour continuer à faire le bien et à sauver des vies. C’était le principe même des justiciers qui partageaient presque tous cet idéal. Ils devaient aider la société, réparer ses inégalités criantes et pour cela, combattre encore et encore. C’était plus complexe qu’une histoire de Bien ou de Mal. Chacun était capable du pire lorsque la société était malade et c’était ce qui se passait aujourd’hui. Les justiciers recherchaient peut être une utopie mais avaient foi en elle. Ils voulaient un monde de paix.

Mais ce n’était pas simple de faire entendre raison à Batman, dotant plus que la vision d’un Tim couvert de sang sur un lit de neige n’arrêtait pas de le harceler. Ce pauvre garçon était mort parce qu’un jeune idiot s’était amusé à se déguiser et à jouer les sauveurs avec ses amis. Dick était coupable et la justice s’appliquerait, la justice selon Batman. Ce dernier cria alors en se jetant sur le jeune homme :

-Va dire ça aux parents de ce gosse !

Dick évita la charge du Batman en roulant sur le côté. Le combat venait de commencer et il n’aimait pas ça. Il était en état de faiblesse face à la légende de Chicago, l’homme dont il s’était inspiré pour créer son personnage, Robin. Malgré sa terreur il devait rester lucide et ne pas faire d’erreurs. Se relevant en un bond, Dick attrapa une chaise que quelqu’un avait fait tombé dans sa précipitation et se prépara à frapper. Mais à peine s’était il baissé pour la ramasser qu’un coup de pied dévastateur l’envoya valser contre une table qui céda sous la puissance du coup. Ca faisait mal mais Dick ignora la douleur en se mettant debout. Il devait garder le contrôle, ne pas laisser l’avantage au Batman, oublier la raison qui les poussaient à se battre, faire le vide dans son esprit. C’était la seule solution s’il voulait sortir de cet endroit vivant. Car Batman était en train de devenir fou, fou de rage. L’histoire de Tim l’avait marqué au fer rouge. Sans doute devait-il lui-même se sentir coupable en tant que justicier.

-Je vous en prie, dit-il inutilement en fixant son adversaire, accroupit sur le comptoir, prêt à bondir. Nous ne sommes pas obligé d’en arriver là. Est-ce ça la justice pour vous ?

Pour toute réponse, Batman quitta son perchoir et asséna un puissant coup de poing à son adversaire qui ne put l’éviter. Rapide comme l’éclair, la chauve-souris humaine l’enchaîna alors violemment. Dick encaissait comme il le pouvait, en serrant les dents et en maintenant sa garde, mais les coups pleuvaient et il était de plus en plus difficile de résister. Parvenant à éviter un coup de genoux, le jeune homme réussit a atteindre le combattant au visage puis poursuivit le mouvement avec un coup de pied retourné qui les désengagea immédiatement.

Il savait se battre mais ça ne lui suffirait pas pour vaincre le justicier de Chicago. Il avait réussi à le toucher, certes, mais ça ne serrait pas toujours comme ça, d’autant que Batman fulminait. Il avait eu une semaine exécrable, était rompu de fatigue et le sentiment d’échec le tiraillait sans cesse. Il n’avait pas réussi à sauver Tim et cette pensée suffisait à alimenter son courroux contre Dick et lui-même. Il s’en voulait mais en voulait aussi au monde entier et ce soir, le monde entier était personnifié par Dick Grayson, par Robin. Ce soir, les poings devaient parler et exprimer sa douleur à la place de ses cordes vocales. Il en avait assez de cette souffrance qui rongeait son âme.

Batman s’était de nouveau jeter sur lui avec hargne. Cette fois-ci, Dick allait se défendre. Il le fallait s’il souhaitait avoir une chance de s’en sortir vivant. Batman était devenu fou et s’il ne parvenait pas à lui faire entendre raison par la parole, il le ferrait avec ses poings. Évitant un puissant crochet du droit, Dick asséna un coup de coude dans les côtes de son adversaire. Puis, avec l’agilité d’un acrobate prodige, il sauta gracieusement pour éviter un coup de boule et atterrit sur le dos du combattant adverse qui l’y chassa d’une gifle magistrale, comme on chasse un insecte importun. Dick percuta le sol de plein fouet et en resta étourdi pendant quelques secondes, juste assez pour permettre à Batman d’être sur lui. Un batarang dans chaque main, il allait frapper.

Cette fois, c’était la fin. Dick était totalement groggy par les coups qu’il avait reçu. Il n’avait réussi à toucher son adversaire que quatre fois, sans les effets escomptés. Depuis qu’il était avec les Titans, Dick avait énormément progressé et maîtrisait une bonne vingtaine de techniques qui permettaient de neutraliser rapidement un ennemi. Mais Batman n’était pas un adversaire ordinaire et il ne lui laissait aucun répit. Il était trop fort, trop puissant. Dick ne disposait pas de la même musculature que l’athlète devant lui et ne supporterait pas de nouveaux coups. Batman était meilleur que lui et largement. Il ne faisait pas le poids. Ca le rendait dingue d’admettre ça mais c’était vrai. Et maintenant, Batman allait l’achever, sans aucune pitié.

-Frappe… Murmura Dick en plongeant son regard dans celui du chevalier noir.

Batarang à la main, Batman leva le bras. Dick était à sa merci. Il avait beau être un gamin doué au combat, il n’avait pas fait une seule minute le poids contre lui. Le combat avait été aussi rapide que violent et se solderait par sa victoire, comme toujours. Il allait frapper. Il le voulait. Il voulait que le sang éclabousse son visage et son costume. Il voulait voir le visage tuméfié de son adversaire totalement détruit. Il allait le faire. Oui. Il allait… il devait le faire. Il… il devait le faire pour Tim parce que… c’était important que quelqu’un paye. Il… c’était de sa faute si Tim était mort. Oui, de sa faute. De la faute de Dick ? Ou plutôt de la sienne ? Non, il avait fait son possible pour sauver Tim et s’il avait échoué c’était parce que… parce qu’il… il était fatigué et… ce n’était pas de sa faute ! Il était en convalescence à cause des graves blessures causées par le Joker ! Il ne pouvait pas courir aussi vite qu’avant et… et il avait été trop lent. Bon sang, c’était vrai. Il n’était pas arrivé à temps pour éviter à Tim de se prendre une balle dans le ventre. Et… il n’avait pas été assez rapide pour l’amener aux urgences. Il avait mis trop de temps pour aller chercher sa moto garée plus loin et se changer. Il… Oh bon dieu, tout était de sa faute !

Une larme perla sur sa joue tandis qu’il lâchait son arme. C’était de sa faute si Tim était mort, entièrement de sa faute. Il avait rejeté sa propre culpabilité pour tout mettre sur le dos de Dick alors qu’il était comme lui. Lui aussi était un justicier. Lui aussi voulait faire le bien et aider ses concitoyens. Mais qu’est-ce qu’il lui avait pris d’attaquer ce pauvre gosse ? Il n’avait même pas vingt ans et avait sacrifié sa jeunesse pour lutter contre le crime. Pour ça, il en fallait du courage.

Prostré, à genoux devant celui qu’il allait tuer sans raison, Batman prenait enfin conscience de son erreur. Il avait failli perdre de nouveau les pédales et sombrer dans la démence meurtrière. Au lieu de poursuivre le véritable assassin de Tim, bien réel et qui sévissait encore dans les rues à l’heure qu’il était, Bruce avait orienté sa colère vers ce jeune homme qui avait eu le courage de venir rendre visite à l’adolescent qui l’avait imité. Il se sentait lui aussi responsable de la mort de Tim mais continuerait à défendre la veuve et l’orphelin, malgré sa culpabilité. Ce n’était pas de la lâcheté comme il l’avait pensé, d’abord. Non, c’était du courage. Un courage qu’il se devait d’imiter. Il devait se jurer de ne plus jamais recommencer, de ne plus devenir fou comme il l’avait été après ce qui était arrivé à Harvey et après la mort de Tim. Il devait se promettre et s’assurer que jamais plus le Batman ne devrait prendre le dessus sur Bruce. Car Batman n’était pas un monstre cruel. Batman était le salut, l’espoir d’un monde plus sûr. Et c’était cela même qui le différenciait d’un être comme Silence. Il était bel et bien humain.

*

Dick sentait sa tête prête à exploser. Un affreux mal de crâne l’avait gagné à son réveil et il avait l’impression que le ciel lui était tombé sur la tête. Qui plus est, une douleur intense irradiait ses membres engourdis, comme si quelqu’un l’avait roué de coups. Faisant un effort pour ouvrir les yeux, le jeune homme fut ébloui par la luminosité qui régnait dans l’endroit où il se trouvait. Quelques secondes lui furent nécessaires pour s’habituer à la lumière du jour et découvrir l’environnement qui l’entourait. Il était allongé sur un lit aux draps blancs, dans ce qui semblait être une chambre, assez spacieuse mais chichement décorée. Quelques meubles d’origine orientaux et un poster en grand format de David Bowie sur le mur nu en face de lui, rien de plus. Tournant la tête vers sa gauche, Dick vit une fenêtre assez large qui laissait passer la lumière hivernale et offrait une vue sur un jardin modeste mais coquet où poussaient quelques arbres. Malgré la douleur, il parvint à se mettre debout, découvrant par là-même son torse bandé.

Les souvenirs l’assaillirent alors. Il se rappelait maintenant de son combat contre le Batman. Il s’était pris de violents coups qui l’avaient salement amochés. Le mythe de Chicago n’avait pas retenu ses coups et avait été prêt de le tuer. Il avait totalement perdu le contrôle de lui-même et Dick avait bien cru qu’il y passerait. S’étant évanoui avant d’avoir reçu le coup de grâce, il se demandait encore comment il avait survécu et surtout, qu’est-ce qu’il faisait ici.

Les réponses ne tardèrent pas à venir lorsque la porte s’ouvrit pour laisser passer un vieil homme vêtu d’un chandail en laine et d’un pantalon noir. Entre ses mains, un plateau repas. Faisant abstraction de la présence de Dick, il déposa le petit déjeuner sur une table basse puis ouvrit les fenêtres pour aérer la pièce. Une brise fraîche pénétra les lieux et fit frissonner l’invité.

-Bien dormi, monsieur Grayson ? Demanda l’inconnu d’une voix mélodieuse.
-Euh… Oui, merci. Mais qui êtes-vous ?
-Je m’appelle Alfred Pennyworth et suis le majordome de monsieur Wayne, propriétaire des lieux.
-Vous voulez dire le docteur Wayne ?
-Lui-même.
-Mais que… ? Je devrais être à l’hôpital, non ?
-Oh, vos blessures sont superficielles et monsieur Wayne est un grand médecin. Il a préféré vous soigner ici.
-Pourquoi est-ce qu’il m’hébergerait sous son propre toit ?
-Il vous l’expliquera mieux que moi, je pense.

Alfred eut un sourire malicieux tandis que Bruce Wayne faisait son apparition, derrière la porte. Le majordome s’effaça au profit de son maître qui s’installa au bout du lit. Puis il prit la parole de sa voix grave, un léger sourire sur les lèvres :

-Bonjour, Dick.
-Docteur.
-Appelle-moi Bruce.
-En quel honneur ?
-On a fait connaissance la veille, non ?
-Vous devez confondre avec quelqu’un d’autre, Bruce. Hier j’étais avec…

Dick s’interrompit en écarquillant les yeux. Non, ce n’était pas possible. Bruce Wayne, ce type en blue jeans qui l’observait avec un sourire amusé, ne pouvait pas être…

-…Batman.
-Exact.
-Mais comment… ?
-J’ai eu à faire des choix il y a quelques années, des choix qui m’on conduit à devenir ce que je suis aujourd’hui.
-Ca ne pas être vous, ce n’est pas possible ! Batman a faillit me tuer, hier et…
-Batman ne savait plus ce qu’il faisait. Il était perdu. Tu as su lui rendre la raison.
-Mais enfin, il allait me tuer sans hésiter !
-Il ne l’a pas fait et c’est ça qui est important. Disons qu’il a… que j’ai compris quelque chose d’essentiel cette nuit. Quelque chose que j’ai failli perdre de vu. L’esprit justice. La mort de Tim a été mon échec, tu sais. En tant que Batman, je suis arrivé trop tard pour lui éviter d’être abattu et en tant que Bruce, je n’ai pas réussi à le soigner. En tout cas, tu avais raison : il faut continuer à vivre et à lutter pour la justice même après un tel drame.
-Oui. Conclut Dick après quelques instants de silence. Mais pourquoi me révéler votre véritable identité ? Si jamais je…
-Je te fais confiance, coupa Bruce. Je sais qui tu es, tu sais qui je suis, nous sommes quittes, non ?

Le sourire de Bruce s’élargit. Batman avait fini par entendre raison et ça le soulageait énormément. Il lui avait laissé les rênes trop longtemps et sa mauvaise facette avait pris le dessus. Mais Bruce était parvenu à la dompter et à l’utiliser à bonne escient. Oui, Bruce Wayne était aux commandes et il ne laisserait plus jamais une chose pareille se reproduire. Il avait compris quelque chose de fondamental qui le différenciait des criminels qu’il combattait : on ne peut faire justice soit même mais on peut s’employer à aider à son application.
 
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