Urban Comics
  Ghost Rider #7 : Scission
 
Auteur : Zauriel
Date de parution : 


Zaratos se précipita sur celui qui l’avait tant de fois défait. Sur celui qui avait plusieurs fois fait échouer son plan. Il le bouscula avec une telle violence que l’homme d’église perdit l’équilibre et tomba. Zaratos l’attrapa par les cheveux et le traîna jusqu à l’escalier, puis le lança dans les marches. Johnny, de la petite pièce pourpre, vit leur adversaire heurter plusieurs fois les marches avant de s’écraser mollement au bas de l’escalier. Zaratos était dans un état de rage qui défiait toute imagination. Johnny ressentait cette colère alors que les murs de sa prison mentale se mettaient à vaciller. Il ne savait que faire. Il se battait contre une homme d’église, et servait d’hôte à une sorte de démon. Etait-il dans le bon camp ? Après tout, ce sont les démons, les méchants, et peut être que cet homme là combattait Zaratos pour le délivrer ? Mais toutes ces questions, non seulement étaient vaines, mais inutiles. Soudain, il sentit qu’on le frappa. Dans sa prison aux murs violets, Johnny bascula dans les ténèbres.
Zaratos descendait l’escalier en sifflotant, les mains dans les poches du jean déchiré de Johnny. Enfin, ses mains… Johnny ne les avait jamais vu. Elle étaient recouvertes par des gants de cuir et il doutait qu’elles soient constituées de nerfs et de chair.

Quelques mètres plus bas, le révérend tentait de se relever. Il poussait sur son genou et sa main gauche et tenait dans sa droite le crucifix. Il porta la croix à sa bouche et l’embrassa. Puis il se releva. Ses cheveux en sueur collaient à son front. Son nœud de cravate était défait. Le bleu qui se formait autour de son œil accusait le coup qu’il s’était pris. Sa bible avait volé à quelques pas de lui et s’était ouverte au chapitre de l’Apocalypse. Sa poitrine se soulevait rapidement. Ses yeux étaient injectés de sang. Zaratos s’était arrêté au milieu de l’escalier. Il siffla d’admiration.
« Eh bien, mon révérend, quelle résistance ! Comme quoi vous n’avez rien perdu en vendant votre âme. »

Presque instantanément, le démon se retrouva devant l’homme d’Eglise et lui envoya son poing dans l’estomac. Stryker ouvrit grand la bouche, couina. Il se plia en deux et son équilibre reposa exclusivement sur Zaratos, qui en profita pour le faire tomber en lui collant un coup de pied dans le genou. Il tomba lourdement.
« Je retire ce que j’ai dit, Stryker. Vous me décevez. Vous étiez un meilleur adversaire, la dernière fois que l’on s’est croisé. »

Stryker, étalé sur le sol, releva la tête et cracha un mélange de bile, et de sang. Il aspira une grande bouffée d’air. Zaratos leva son pied et l’appuya longuement sur le dos de son adversaire, faisant craquer les vertèbres. Stryker hurla. Zaratos ricana.
“Ce que je me demande, c’est comment vous êtes venu aussi vite. Lequel de mes anciens maîtres vous a appelé pour m’éliminer ? Ah oui. Je me souviens. C’est le Seigneur des Mouches que vous servez, n’est ce pas ? «

Il retira son pied et attrapa le révérend par le dos de sa chemise. Mais Stryker pivota de lui même et jeta dans la tête de Zaratos une ampoule d’eau bénite. Surpris, le démon le lâcha et tomba sur les genoux. Avec un sourire de satisfaction, le révérend releva son col de chemise et commença à parler
« Je me fiche de toi, espèce de monstre. Celui qui m’intéresse, c’est l’autre. Vous êtes là, Johnny ? »
Dans la pièce aux murs violets, Johnny se réveilla quand il entendit son nom. Que s’était-il passé ? Il se rappelait de sa venue au motel, de l’apparition de Stryker, de la colère du démon, et puis plus rien. La voix qui s’adressait à lui était douce, sympathique.
« Oui, je suis là. »

Dans le monde extérieur, Zaratos était en rage. Johnny n’aurait pas dû se réveiller. Stryker n’aurait pas du l’appeler. Ses plans étaient sur le point d’échouer. Il supplia Johnny de ne pas écouter Stryker, en vain.
« Johnny, reprit Stryker, êtes vous d’accord avec cette abomination? Etes vous prêt à partager contre votre gré votre âme et votre corps avec lui ? Vous a t-il seulement demandé votre avis ? Je ne pense pas. Il s’est emparé de vous sans crier gare. Il se fiche de votre vie et de votre salut. Vous n’êtes pas le premier qu’il aide. Mais dès qu’il aura accompli sa tache, il se défera de vous, et vous mourrez, une seconde fois. »
Zaratos se précipita sur le révérend et le plaqua contre le mur. Il avait entrepris de l’étrangler.
« Mensonges, siffla-t il entre ces croc. »
Stryker n’opposa aucune résistance à la poigne du démon. Il se laissa faire. Ses joues blanchirent, ses yeux se révulsèrent, et il se retrouva dans la pièce aux murs violets.
Johnny n’aurait jamais pensé que quelqu’un d’extérieur puisse s’inviter ainsi dans sa geôle. Stryker, en apparaissant dans ce plan de la réalité, avait recouvert un corps sans blessures. Les marques de coups qu’il avait reçus de Zaratos avaient disparu. Il affichait un sourire serein, calme. Mais Johnny ne put s’empêcher de comparer ce sourire à celui d’un requin. Johnny décida de rester comme il était, accroupi, les bras repliés contre ses genoux, adossé au mur. Stryker s’avança vers lui, la main tendue.
« Je ne suis pas votre ennemi, monsieur Blaze. Je suis là pour vous aider. »
Johnny ne bougea pas d’un pouce. Recroquevillé, il paraissait peser le pour et le contre.Stryker s’avança encore. Johnny desserra ses bras, et sa main vint prendre celle que le révérend lui tendait. Dans un éclair de néant flamboyant, ils abandonnèrent cette pièce étrange qu’était devenue la conscience de Mister Blaze.
L’Extérieur. Zaratos hurla de rage, de désespoir, de dépit. Jamais il n’aurait cru que Blaze puisse céder, et tomber dans le piège de l’homme d’Eglise. Avant de disparaître, avant de laisser à l’humain qui était son hôte le contrôle de son esprit et de son corps, Zaratos laissa des larmes couler sur ses joues de feu.Anadriel. J’ai échoué. Je suis désolé.

Puis il commença à se désagréger. Il avait déjà connu cela. Stryker et bien d’autres l’avaient empêché d’accomplir la dernière vengeance. Il avait déjà eu la sensation de n’être plus qu’un rêve, qu’une pensée. Il allait revenir sous peu dans la prison qu’on lui avait construite. Il allait retourner en cage, sans avoir pu accomplir ce pour quoi il se battait. Aujourd’hui, la douleur physique n’était que secondaire. Aujourd’hui, ce qui primait, c’était le sentiment d’échec qui l’accablait. Pourquoi les Enfers avaient-elles décidé de l’entraver ? Il n’agissait en aucun cas contre les ténèbres, seulement pour Anadriel. Alors pourquoi cet acharnement à lui mettre des bâtons dans les roues ? Il n’aurait probablement jamais la réponse à cette question.

Johnny et Stryker se retrouvèrent donc seuls dans le monde physique. Johnny ne sentait plus la présence au fond de son crâne. Il avait entendu la longue plainte de Zaratos, son chant du cygne. Paradoxalement, il se sentit triste de ne plus l’entendre. Zaratos avait été l’une des personnes à mieux le connaître. Mais le salut de son âme était primordial, et rien n’indiquait que le but que poursuivait Zaratos était louable.
« Vous avez fait le bon choix. »
Johnny lança un regard plein d’ironie au révérend.
« Et je présume que je vais retourner à la tombe, n’est ce pas ? ».
Stryker passa nerveusement sa main sur sa nuque.
« Je pense que vous pouvez rester encore un peu. Vous avez été plutôt… conciliant. Ceux qui m’emploient sont sûrement satisfaits. »
Johnny ressentit une onde de bonheur le submerger. Il pensa à Rachel. Il fallait qu’il la retrouver, lui dire à quel point elle tenait pour lui.
« Vous devriez cependant quitter la région. D’après ce que j’ai compris, il y a des gens mal intentionnés dans le coin. »

Ils sortirent tous les deux du motel, sous les yeux surpris de Jarvis. Quand il avait entendu les cris sauvages du deuxième étage, il s’était réfugié dans sa loge en attendant le calme. Et voilà que les deux hommes, tous deux sinistres à leur manière, quittaient l’hôtel en même temps, moins de deux heures après être arrivés. Et ils avaient tous les deux la même satisfaction sur le visage.

Sur le parking, ils se serrèrent tous deux la main. Styker remonta dans son 4x4. Johnny le regarda partir. Puis il enfourcha sa moto. Il attendit qu’elle reprenne son aspect infernal et c’est avec un peu de déception qu’il vit qu’elle restait telle quelle. Malgré son soulagement, quelque chose n’allait pas. La montre qu’il portait à son poignet gauche tomba sur le bitume, à côté de la roue avant. Intrigué, Johnny retroussa sa manche. Sa main avait disparu, dévorée par quelque créature invisible. Cette mystérieuse gangrène s’attaquait déjà à son avant bras. Il commençait à disparaître.
 
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