Urban Comics
  Legends #15 : Galactus
 
Auteur : Zauriel
Date de parution : Janvier 2007

23H30, une chambre dans le Bronx

Je vais le faire, Norrin. Je vais lancer ce que l’on a crée tous les deux. Je vais le faire pour que l’on se souvienne de moi, et je m’en fiche que ce soit comme d’un libérateur ou comme d’un bourreau. Je vais le faire parce que je le mérite. Et puisque tu n’as pas les couilles, je vais le faire moi-même, et seul. Et quand le monde que l’on connaît, cette infâme merde que l’on nous sert tous les jours comme si c’était du caviar, en s’excusant de ne pas vouloir faire mieux, en acceptant le sort que l’on nous inflige sans broncher, disparaîtra, j’espère que tu regretteras de ne pas t’être tenu à mes côtés pour fêter ça, Norrin. J’espère que tu feras partie des survivants. Mais si cela n’arrive pas, si la folie te gagne toi aussi, comme tous ceux qui se sont prosternés devant les grands de ce monde comme si récupérer les miettes de leur table était la meilleure chose à faire, et si tu n’es pas capable de trouver de nouveaux repères pour la nouvelle vie que je vais créer à tous les êtres vivants de cette planète, alors tu n’auras pas ta place à mes côtés. Et je devrais régner seul.

Galen finit de rédiger son email, et cliqua sur la case envoyer. La fenêtre se referma sur elle-même, avec l’indication message envoyé. Son regard s’attarda sur l’adresse du destinataire.
Norrin.radd@aol.com Il ne pourra pas dire que je ne l’ai pas prévenu.

Galen se redressa dans sa chaise informatique, et frotta son épais bouc brun. Dans ses yeux noirs se reflétait la lumière de l’écran de l’ordinateur. Il tapota sa joue mal rasée du bout de son stylo, et bailla. Il tourna la tête, et observa la chambre miteuse et minuscule qu’il louait depuis un an. Oh, il ne s’agissait pas là d’un manque de moyens, mais son projet nécessitait des fonds, beaucoup de fonds. Sûr qu’aujourd’hui, il avait ce qu’il fallait pour mettre au point ce fameux projet. Trois tours, reliées entre elle par un routeur, trois écrans, quatre imprimantes, et une centaine de logiciels sur chaque machine qui lui avaient permis de mettre au point son projet. L’œuvre de sa vie. Galactus.

Plus tôt, ce soir là.


Il marchait rapidement. Il avait peur d’être suivi. Il savait très bien, au fond de lui-même, que c’était stupide d’être ainsi effrayé. Que pouvait-on lui reprocher à l’heure actuelle ? Rien. Il n’avait encore rien lancé. Il n’avait même pas encore terminé. Si jamais quelqu’un le chopait, si jamais quelqu’un avait eu des doutes quant à ses activités, qu’aurait pu dire ce quelqu’un ?
« Galen, vous êtes en état d’arrestation. On vous soupçonne de vouloir créer un monstre virtuel. »
A cette interpellation imaginaire, Galen sourit. Il ne voyait pas un flic, ou un fédé, lui sortir une connerie pareille avant de lui mettre les menottes et de lui lire ses droits. Toujours est-il que ce quartier craignait, quand le soleil était couché, alors il n’était pas question de traîner. Il passa près d’une ruelle quand soudain on l’attrapa par le cou. Il essaya de se débattre, mais on pointa quelque chose dans son dos. Quelque chose de piquant. Quelque chose d’aiguisé. Il ne se retourna pas. Il sentit ses parties basses se rétracter sous l’effet de la peur. Il bégaya quelque chose.
« Ta gueule, lui répondit-on. »
Il referma la bouche, qui fut prise de tremblements. On le tira dans la ruelle, à l’abri des regards, et on le retourna violemment. Galen soupira brutalement. Ce n’était que Morg, un mec à qui il refourguait de la drogue il y a quelques temps. Il portait sur la tête un bonnet noir, plié aux rebords, ce qui laissait voir une couture grisâtre. Les cheveux noirs qui en débordaient étaient sales et gras. Les dents qu’il exhibait étaient jaunes, et entachées de tartre. Tout son être respirait la crasse et la puanteur.
« Galen, ça faisait longtemps que j’avais pas vu toi.
- On dit que je ne t’avais pas vu, Morg. »
Morg le frappa à la tempe. Galen tomba à genoux, la tête entre les mains
« Enculé, siffla-t-il. »
Morg le frappa une nouvelle fois. Il envoya son pied dans les côtes de Galen. Celui-ci étouffa un cri, essaya d’avaler de l’air.
« C’est toi l’enculé, Galen. Depuis combien de temps j’ai pas vu toi ? T’aurais pu me donner des nouvelles de toi. A cause de toi, j’ai dû trouver un nouveau dealer, et ça a coûté très cher à moi. »
Il avait accentué ces derniers mots, comme il envoyait à nouveau son pied sur Galen.
« Je sais que t’en as encore, Galen. Allez, donne la moi, et je t’emmerde plus. Paraît que t’es sur un super coup, t’as pas besoin, alors refile. »
Galen cracha et se releva. Il savait très bien de quoi Morg voulait parler. Il s’agissait de cette drogue mutagène, une saloperie à laquelle il n’avait jamais touché. Il ne savait pas comment ça s’appelait, seulement que ça développait chez ceux qui en prenaient des facultés surhumaines. Mais ça les rendait aussi complètement cinglés, et dangereux. Galen avait cessé d’en dealer quand il avait failli se faire casser la gueule par un de ses clients. Il regardait Morg, adossé contre le mur, attendant qu’il le frappe à nouveau, quand il aurait découvert qu’il n’a plus cette merde sur lui.
« Alors, sale con. Tu la donnes à moi ? »
Galen ne dit rien. Déjà Morg avait sorti son couteau de la poche de son blouson. Un Bowie, long d’une trentaine de centimètres, large d’une quinzaine.
« Désolé, Morg. Je n’en ai plus. Tu sais très bien que je n’en ai plus, alors ranges ce couteau. Ne joue pas au con. »
Morg leva le couteau bien haut, prêt à s’abattre sur Galen. Celui restait impassible. Il sortit de la poche de son manteau en cuir un petit objet métallique, une sorte de clé USB qu’il pointa vers son agresseur. Celui-ci rit nerveusement, en se frottant le bras. Il était en manque, et rien n’était plus dangereux qu’un junkie sans dose, Galen le savait.
« Tu vas faire quoi avec ce truc, monsieur l’informatique ? »
Galen appuya sur l’unique bouton qui ornait la clef. Un rayon bleu échappa de l’ouverture, et entoura Morg d’un halo de même couleur. Morg se mit à disparaître. Il regardait son propre corps se faire dévorer par l’étrange lumière. D’abord ses pieds, puis ses jambes, son bassin, son torse, ses bras, ses épaules, sa tête. Il n’avait pas cessé de crier, il n’avait pas cessé de supplier Galen de le relâcher. Mais celui-ci regarda Morg partir dans le néant comme s’il n’était qu’un vulgaire insecte. Une fois que celui-ci eut complètement disparu de la surface de la terre, Galen remit sa clef dans sa poche. Il n’éprouvait aucune joie à avoir supprimer Morg. Mais ce dernier allait contribuer à une cause qui allait le transcender. Il allait devenir quelque chose de beaucoup plus puissant que la simple chair. Il allait devenir un million d’octets qui se promènera tranquillement sur l’autoroute du net en fragilisant les défenses et les anti-virus, préparant l’avènement du plus grand fléau virtuel auquel l’humanité n’a jamais été confrontée. Morg allait annoncer Galactus.


23h25, une chambre dans le Bronx.

Galen était rentré chez lui alors que la neige commençait à tomber. Il avait relevé son col, et serrait sa clef dans sa poche. Il ferma la porte de chez lui à double tour, et contempla son équipement. Il posa la clef sur son bureau, et s’attela à relier les trois tours entre elles. Il faillit tomber, emmêlé entre les nombreux fils qui parcourraient le sol, tels des serpents de toutes couleurs, mais se rattrapa à la poignée de la porte. Il se releva en jurant. Sa tête n’était pas passée loin du coin de la table, et son geste aurait pu lui être fatal.
Non, pas maintenant. Arrête de trembler, ressaisis toi, t’y es presque.
Il s’assit dans sa chaise informatique, se positionnant de manières à voir les trois écrans à la fois. Il plaça sa clef dans l’embranchement USB, et démarra le programme Morg. Une fenêtre apparut sur son écran. Il s’agissait de Morg. Mais il était différent. On aurait pu croire qu’il sortait d’un film, comme Conan le Barbare. Il était torse nu, les muscles saillants, la tête rasée. Il portait un long pantalon de cuir noir, et des bottes de cavalier. Sa main empoignait une hache à deux lames qui touchait le sol. Les yeux noirs de Morg fixèrent Galen, et il se prosterna, sur l’écran. Galen enfila son casque et son micro.
« Salutations, Morg, fidèle serviteur. »
Morg se releva, et mit son poing droit sur sa poitrine. Une deuxième fenêtre apparut, où apparaissaient des caractères.
« Salutations, maître Galen. J’attends vos instructions. »
Galen sentit son pouls accélérer. Ca marchait. Ca fonctionnait.
« Fidèle Morg, je veux que tu parcourres l’océan des messageries d’Aol, et que tu détruises tous leurs antivirus, de manière à ce que Galactus puisse tout détruire ensuite. »
Quelques secondes s’écoulèrent. De nouvelles lettres apparurent.
« Maître, je peux tout détruire moi-même, si vous le désirez.
- Non, héraut. C’est à moi seul d’apporter l’anarchie. Obéis. »
Morg salua encore une fois. Et la fenêtre se réduisit d’elle-même.

Galen regardait sur l’écran Morg s’enfoncer dans les autoroutes du net. Des dizaines et des dizaines d’adresses Internet se succédaient sous ses yeux. Morg déconnectait tous les anti-virus qu’il trouvait sur son chemin. Norton, MacAffee, AvG. Des milliers de lumières qui s’éteignent, des remparts qui s’écroulent. Galen imaginait l’américain moyen voir son antivirus se supprimer de lui-même, totalement désemparé, essayant de couper Internet, et d’appeler une hotline. Mais c’est déjà trop tard. Morg a accompli son travail. Tout le réseau américain d’AOL, la plupart des ménages et des administrations, est maintenant vulnérable,. Galen approcha le micro de sa bouche.
« Morg, reviens. »
La fenêtre d’animation réapparut. Morg se prosterna devant son créateur.
« J’ai accompli mon devoir maître. Que puis je faire ?
- Repose toi, fidèle serviteur. Avant que Galactus détruise le monde, je vais envoyer un message à tous ces gens, pour qu’ils connaissent leur sort, pour qu’ils sachent que c’est Galactus qui sera à l’origine de leur malheur.


Mesdames, mesdemoiselles, messieurs. Votre système informatique a été fragilisé par le virus nommé Morg, mais ce n’est que le prologue. Toute l’installation informatique de votre foyer va être définitivement déconnectée au cours des prochaines heures. Peut être pensez vous être un cas isolé, une victime d’une blague de mauvais goût lancée par un adolescent qui a trouvé comment contourner vos sécurités. Vous vous trompez. Tout le système d’exploitation connu sous le nom d’AOL va connaître le même sort que le votre, et sous peu, tous les autres fournisseurs d’accès, locaux ou internationaux, connaîtront le même sort. Toutes les boîtes aux lettres vont être détruites les unes après les autres, ainsi que tous les programmes internes qui les côtoient. Traitement de texte, jeux vidéo… Tous les logiciels de votre ordinateur, qu’ils soient liés à Internet ou non, vont s’autodétruire. Vous avez décidé de mettre votre vie entre les mains de l’informatique. Vous révérez le Net et tout ce qu’il vous apporte. Rapidité, fluidité, clarté, échanges, loisirs. Vous ne vous êtes pas souciés des dangers qu’il pourrait représenter pour vous. Vous vous êtes lâchement laissés enchaînés dans votre fauteuil, devant votre écran. Votre mode de vie ne se résume plus qu’à un clavier, une souris, et une connexion. Je suis le nouveau conquérant. Je suis celui qui va dévorer ce que vous croyiez être inviolable, et révolutionner votre façon d’exister. Je suis Galactus, et dans quelques heures, le monde virtuel sera à moi. De moi dépendra l’économie, de moi dépendra la politique. Et parce que je contrôlerai ce monde dans lequel vous aimez vous réfugiez, ce tissu de pages et de clics, parce que je contrôlerai vos rêves, on me donnera les clefs.

Il envoya ensuite un mail différent à Norrin. Un mail dans lequel il le prévenait de ce qu’il allait faire. Pourquoi Norrin l’avait-il abandonné ? Se pouvait-il qu’il soit heureux ? Dans son taxi de merde, dans lequel il voyait passer près de soixante personnes par jour, qui écrasait leurs mégots de cigarettes sur la banquette alors qu’il regardait devant lui ? Qui l’engueulaient quand c’était les heures de pointe ? Qui lui envoyaient sa paye en pleine gueule parce qu’il était arrivé à l’heure, juste à l’heure et pas en avance, comme on croyait toujours ? Se pouvait-il qu’il trouve un minimum de réconfort à faire ce boulot qu’il reconnaissait lui-même comme étant harassant ?

Je n’ai pas le choix, Galen. Je suis surveillé, depuis que j’ai cracké le code du FBI et que j’ai foutu le boxon dans leurs archives, tu te rappelles ? Je peux m’estimer heureux de pouvoir encore toucher à un ordinateur.
- Mais Galactus ? On l’a crée ensemble, vieux. On peut le faire démarrer, on peut niquer la planète entière, et après on sera les rois.
- Tu rigoles, là ? Mec, on s’est bourré la gueule un soir, on a refait le monde et crée une simulation visant à détruire l’informatique et à le remodeler pour mieux le contrôler. On avait quatre grammes chacun, Galen ! On était bourrés. Y’a de meilleurs moyens de lutter, mon pote. Il ne s’agit même pas de moyens. Il s’agit du bien et du mal, là. Ce que tu veux faire, c’est du terrorisme, ni plus, ni moins.
- Et alors ? T’es satisfait de ce monde là ? Un monde où des génies comme nous sont relayés aux ordures, avec notre talent ? On nous censure, Norrin. On fait de nous de jolis petits pantins parce qu’on a peur de nous. Le monde a peur de ce que l’on pourrait faire, alors on nous bâillonne avant que nous n’ayons pu pousser un cri. Comment tu peux me parler de ce putain de manichéisme, Norrin ?

Ils étaient assis à la terrasse d’un café. Norrin avait gardé ses lunettes de soleil et son bonnet sur la tête. Ses bras étaient croisés sur son anorak. Galen était habillé en noir de la tête aux pieds. Son bracelet vint tinter contre la tasse qu’il porta à ses lèvres. Il la finit d’un trait, sortit un billet de sa poche, et se leva.
« Tu me déçois, Norrin. Je pensais que t’avais assez de tripes pour faire ça. »
Il posa le billet sur la table, salua son compagnon d’un bref signe de tête, et s’éloigna.

Galen se pencha en arrière contre le dossier de sa chaise. Les deux pieds avant quittèrent le sol. C’était l’instant fatidique. Il allait quitter son enveloppe d’être humain pour devenir beaucoup plus. Il brancha sur la prise usb de son ordinateur une paire d’électrodes et les appliqua sur ses tempes. Il cliqua deux fois. Son écran passa du vert au blanc le plus immaculé. Il partait conquérir ce qui lui était dû.

0H00.
Norrin Radd rentrait chez lui complètement crevé. Il avait passé sa journée sans son taxi, depuis 6 heures du matin non stop. Il n’avait même pas eu le temps de terminer son jambon beurre, c’est dire… Il monta jusqu’au troisième étage l’escalier raide, en s’accrochant bien fermement à la rampe. Il avait les jambes en compote. Sa journée avait été l’une des plus pénibles depuis au moins trois mois. Il mit la clef dans sa serrure, et entendit son chat miauler de l’autre côté de la porte. Il rentra, et ferma à double tour. Il se pencha et caressa son animal.
« Ca va, Warlock ? »
Le chat ronronna de plaisir, et alla se percher sur la table de la cuisine, en se léchant les pattes. Norrin sortit la pâtée et en remplit son bol. Puis, il se dirigea vers son téléphone, et appuya surla touche répondeur.
« Vous n’avez aucun nouveau message. »
Il raccrocha, et alla s’asseoir devant son ordinateur, laissé allumé toute la journée. Il bougea la souris pour sortir du mode veille, et vit clignoter une icône en bas de son écran. Il cliqua.
« Vous avez un nouveau message de Galen. »
Il cliqua, et lut le mail de Galen, qu’il n’avait pas vu depuis des semaines. Il retira sa casquette, et la laissa tomber sur le sol, pétrifié d’horreur par le message qu’il lisait.
Mon Dieu, Galen. Qu’est ce que tu a fait ?
Il se releva de son fauteuil, et partit à toute vitesse dans sa chambre, sous le regard impassible de Warlock. Il ouvrit les portes de son armoire, et se haussa sur la pointe des pieds. Il prit le carton sur la dernière étagère, et l’envoya sur le matelas de son lit, pour amortir le contenu. Il referma la porte, et tomba sur le lit. Il fouilla dans le carton, et trouva ce qu’il cherchait. La fameuse paire d’électrodes qu’il avait conçu avec Galen. Il ne savait pas que ce petit con en avait fabriqué une autre paire derrière son dos. A vrai dire, il ne l’en pensait même pas capable. Il alla les brancher sur son ordinateur, et attendit le signal de reconnaissance. Ok. Galen avait Galactus. Mais il avait crée son contrepoids. Il avait crée le Surfer d’Argent.


L’appartement de Galen.
Le hacker sentit son être se détendre complètement. Ses muscles se relâchèrent, ses yeux se fermèrent. Son esprit quitta son corps. Quand il rouvrit les yeux, le paysage qu’il observait était constitué d’une multitude de fils verts, qui formaient un gigantesque tube. Il respira à fond, et regarda ses mains. Elles étaient énormes, gantées de pourpre et de violet. Il les ferma en poings. Il sentait la puissance affluer petit à petit. Il se mit à marcher, et l’immense tube trembla au rythme de ses pas. Galactus était en marche. Il aperçut à sa droite une petite diode rouge, qui clignotait, et alla d’instinct dessus, et se mit à la marteler de ses poings. La diode explosa en un feu d’artifice, et Galactus sourit. Il allait tout détruire.

New York, foyer des Garisson.
Norman Garisson, marié, trois enfants, cherchait du boulot depuis près de deux mois. Il avait été victime, avec ses dix autres collègues, d’un licenciement massif de personnel. Il avait mis en ligne son C.V, faisait de nombreuses recherches sur le Net pour trouver rapidement un emploi afin de pouvoir nourrir sa petite famille. Quand il alluma son ordinateur, vers 23h30, il ouvrit sa boîte mail. Il avait un nouveau message, de la part d’un certain Galen. Sûrement un canular. Ce mec prédisait que sa boîte mail allait être détruite sous peu, ainsi que tout son matos. Il détruisit le mail, mais une page Internet s’ouvrit tout de suite. Il s’agissait d’un petit bonhomme sorti d’un roman d’heroic-fantasy. Il était torse nu, avait le crâne rasé, et portait une hache à deux lames. Il ouvrit la bouche, rigola, et la page qui affichait les emails de Norman Garisson se ferma d’elle-même. Norman la rouvrit, mais tomba sur le message suivant.
Vous avez dû rire, en lisant mon message. Vous savez désormais qu’il ne s’agissait pas d’une blague. Morg, mon fidèle héraut, vient de détruire votre boîte aux lettres. Je le suis de très près, pour achever mon œuvre. Galactus est en marche, et vous ne pouvez rien faire contre lui.
Norman débrancha toutes les prises de son ordinateur. Il pensait peut être que, débranchée, son installation ne risquait rien. Il se trompait.


Appartement de Norrin Radd 0h10.
Norrin avait appliqué, comme Galen quelques minutes auparavant, les électrodes sur ses tempes. Il sentit son esprit partir, alors que, sous ses yeux qui se fermaient, sur son ordinateur apparaissait une silhouette argentée qui tenait une planche de surf. IL rouvrit les yeux. Ca avait marché. Il se sentit puissant, conscient qu’il était ici invulnérable, et qu’il pouvait remodeler le Net à sa guise, comme lui avait proposé Galen, il y a quelques temps. Mais il réprima très vite cette pulsion destructrice, et se mit en route. Galactus était en marche, et il devait absolument le stopper.

Le Net.
Galactus avait senti une interférence dans la toile. Comme si quelqu’un d’autre s’était introduit dans ce lieu étrange. Il fronça les sourcils, et continua sa route, en détruisant toutes les diodes rouges qu’il croisait sur son chemin. Il sentit un souffle se lever, et trouva cela étrange. Que se passait-il ? Le Web serait maintenant victime des intempéries. Il vit au loin un point blanc se rapprocher vivement. Il protégea son visage de ses poings, et sourit quand il aperçut l’avatar de son ancien ami.
« Salut, Norrin. Ca faisait longtemps. »
Il envoya son poing contre la figure son adversaire, qui tomba de son surf.
« Pitoyable, Norrin. Tu pensais vraiment m’avoir comme ça ? »
Le surfer se releva, et sauta sur sa planche. Ses doigts se mirent à luire, et il projeta quantité de rayons sur son adversaire, qui fut propulsé contre les parois du tube.
« C’est mieux, mais tu ne fais pas le poids. »
De ses yeux sortirent des lasers qui brûlèrent le surfer à l’épaule. Celui-ci tint bon, se maintint sur son surf. Et contre attaqua, tout en évitant les projectiles du géant. Les parois du tube vert qui était leur seul paysage tremblaient à chaque rayon reçus, et Norrin craignit soudain qu’elles ne s’affaissent. Profitant de ce moment de répit, profitant que son ennemi ait la tête ailleurs, Galactus le saisit au bras et le fit tomber de sa planche. Norrin heurta violemment le sol de kilo-octets. Galactus leva bien haut son pied, prêt à l’écraser.
« Je savais que tu allais me causer des problèmes, Norrin. Tu aurais dû être avec moi, pour accomplir ce que je suis en train d’accomplir. Mais malheureusement, tu es vraiment trop con. »
Le pied descendait lentement vers la tête du Surfeur. Celui-ci, pourtant, ne cessait pas de sourire. Galactus releva son pied, intrigué.
« Qu’est ce qui te fait rire ?
- C’est fini, répondit seulement Norrin. »

Derrière la porte de l’appartement de Galen.
L’inspecteur Dai Thomas attendait avec trois de ses hommes armés. Le QG avait reçu un étrange email, comme quoi l’informatique tel qu’on le connaissait allait être détruit. La plupart des gens avait pris cette info à la rigolade, y compris les flics, jusqu’à ce qu’on reçoive un autre mail, d’un mec différent. Ce deuxième mec disait de faire gaffe. Le premier était un cinglé fini qu’il connaissait bien, et qu’il fallait prendre avec des pincettes. Suivaient l’adresse et l’état civil du premier gars. Les flics l’avaient imprimé. Même s’ils étaient quasiment sûrs que ce cirque était un gros canular, quelque chose les avait poussé à imprimer ce mail. Et ils avaient eu raison, puisque deux minutes plus tard, tout merdait. On avait envoyé Thomas et trois hommes armés au domicile du suspect. Thomas, il fallait l’avouer, n’était pas d’humeur à partir à l’assaut avec trois cinglés qui se prenaient pour des agents du Swat, armées d’un fusil à pompe et protégés par un gilet par balle et un casque. Quand son chef lui avait ordonné de mettre une tenu de combat, Thomas lui avait dit d’aller se faire foutre. Dans les dossiers de la police, Galen n’était rien d’autre qu’un petit merdeux qui dealait de temps en temps, et qui avait été pote avec Norrin Radd, celui qui avait réussi à pirater le réseau du FBI et de la CIA dans la même semaine. Dai avait décidé d’y aller pépère, son flingue dans la poche de son imper marron.
« Vous pourriez éteindre ça ? »
L’un des trois gus qui l’accompagnaient releva la tête et désigna la cigarette. Dai le regarda, mit la cigarette au coin des lèvres.
« Non. »
L’autre secoua la tête. Dai Thomas était certainement l’un des pires emmerdeurs chez les flics de New York.
« Ouvrez cette porte, messieurs. Il est seul, et pas armé.
- Comment vous le savez, monsieur ?
- Parce que je suis ton supérieur. Allez. »
L’un des trois gus tira un coup dans la porte qui partit s’envoler dans l’appartement. Ce fut à Dai de secouer la tête.
Seigneur.
Ils rentrèrent tous les quatre dans l’appartement, et aperçurent un mec assis peinard dans sa chaise informatique, les yeux papillonnant sous ses paupières fermées, deux électrodes bleues contre les tempes. Sur son écran, on pouvait apercevoir deux choses. La première était une fenêtre qui affichait un combat entre deux personnages sortis de l’imagination de Robert Howard. Un géant à la tête ornée de quatre antennes se battait contre un mec qui volait sur une planche de surf. La seconde était une fenêtre qui affichait un texte bien sympathique. Il s’agissait de l’email que ce tordu avait envoyé à tout le monde.

Le Net.
« Qu’est ce que tu veux dire ? »
Galactus souleva le Surfer du sol, l’attrapant au cou, tentant de l’étouffer.
« Qu’est ce que tu racontes ? »
L’avatar de Norrin souriait toujours.
« Tu es fini. »
Soudain, Galactus se mit à disparaître. Il sentit son énergie partir, le laissant sans force, le laissant s’effacer sur l’autoroute de l’information.
« Noriiiiiiiiiin ».
Son cri se répercuta contre les parois du tube vert orné de diodes rouges, avant qu’il ne s’efface pour de bon. Le surfeur considéra un instant son environnement. Galen avait eu tort.
« Ordinateur, transfert. »
Il disparut à son tour, mais certainement moins brutalement que son ancien acolyte.

L’appartement de Galen.
Dai Thomas avait arraché d’un coup sec les électrodes des tempes du gamin, et celui-ci s’était réveillé très vite. Il semblait totalement déconnecté.
« Norrin, non. Ne fais pas ça. Je t’en prie. »
Dai s’agenouilla devant lui et le claqua. Galen cligna plusieurs fois des yeux.
« Que faites vous chez moi ? »
Dai fouilla dans la poche de son imper, et sortit sa plaque.
« Inspecteur Dai Thomas, police de New York. Galen Vanovsky, vous êtes en état d’arrestation. Vous avez le droit de garder le silence…
- J’ai rien fait, le coupa Galen. »
Dai le giffla.
« Si j’étais toi, je la fermerais. Tu viens de foutre un méchant boxon, mon gars, alors ta gueule. »
Galen se leva. Un des trois hommes qui accompagnaient Dai Thomas lui passa les menottes. Galen pleurait. C’était fini pour lui.


L’appartement de Norrin Radd, 0h40.
Norrin retira les électrodes de ses tempes, et regarda l’écran. Il enregistra le programme «digitalisation » sous une disquette et l’effaça de son ordinateur. Il était maintenant le seul à pouvoir accéder ainsi sur la Toile en tant qu’être physique. Il était désormais son protecteur. Pendant son voyage, Warlock était venu se poser sur ses genoux, et s’était assoupi. Norrin le prit délicatement dans ses bras, et se dirigea vers sa chambre. Il avait besoin de dormir.


Des bureaux en centre ville.
Rien ne bougeait, à cette heure de la nuit, dans les bureaux qui surplombaient le Ground Zero. Il y avait dans cette pièce une vingtaine d’ordinateurs, et seulement un était allumé. Devant, Lauren Pennington jubilait. Elle avait enfin réussi à virer ce putain de virus de son ordinateur. Il s’agissait de ce que son père appelait un « destructeur sans reproches ». Plus tôt, Lauren avait reçu un mail, comme quoi elle ne serait pas la seule touchée. Quelqu’un avait dû s’en occuper, puisque maintenant, tout marchait à merveille. Une petite alarme verte se mit pourtant à clignoter en bas de son écran. Elle cliqua et un dossier s’ouvrit.
« Non, pas ça. »
Des noms défilaient devant ses yeux. Des noms qu’elle ne connaissait que trop bien, pour avoir travaillé avec eux pendant longtemps. Lauren savait qu’à leur départ, et à la scission du groupe, on avait collé à chaque agents de Team One une puce inhibitrice. Cela faisait des années. Mais elle voyait que ce n’était plus le cas. Le virus qui s’était abattu sur son ordinateur, mais qui avait ensuite été détruit, était resté suffisamment longtemps pour désactiver les inhibiteurs.
 
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