Auteur : SteF
Date de parution : Septembre 2008
Bar «Common Ground». New York. 1976 :
Il était aux alentours de 17h quand la porte du bar s’ouvrit. Un homme y pénétra, tenant par la main un petit garçon qui n’avait pas plus de 5 ans. A leur vue, le barman qui essuyait un verre eu un large sourire. Le client et l’enfant se dirigèrent vers le comptoir. A l’autre bout se tenait un vieil homme avec une longue barbe blanche, le seul client, qui buvait un verre de vin. L’homme qui venait d’entrer attrapa l’enfant par les aisselles et l’assit sur un des hauts tabourets. Puis il serra la main du barman.
«Salut John.
-Comment ça va, Bill, depuis le temps? demanda le barman.
-Pas mal. Je te présente mon fils, James.
-Enchanté, Jim.
-J’aime pas «Jim», rouspéta l’enfant. Je m’appelle James.
-Toutes mes excuses, s’esclaffa le barman. Qu’est-ce qui vous amène à New York ?
-Ma belle-mère, répondit Bill. Elle a des ennuis de santé.
-Moche. Qu’est-ce que je vous sers?
-La même chose que d’habitude…
-Et moi un jus d’orange.
-Ca marche! Au fait Bill, il veut te parler, dit le barman en désignant le vieil homme.
-Ah bon? Qui est-ce?
-Aucune idée. C’est la première fois que je le vois.
Bill haussa les épaules, puis s’adressa à son fils.
-Papa va discuter avec le monsieur qui est là-bas. Tu vas rester avec John. Je n’en n’aurai pas pour longtemps.
-Hey, bonhomme, dit le barman en donnant son jus d’orange à James. Que penses-tu de la Freedom Force ? »
Bill, sa limonade à la main, se dirigea vers l’homme à la barbe.
«Il paraît que vous voulez me voir…
-Asseyez-vous, Monsieur Baxton. J’ai une proposition à vous faire. Du genre que vous ne pourrez refuser.
L’homme parlait d’une façon calme et posée.
-Ecoutez, Monsieur… Monsieur comment, déjà ?
-Appelez-moi Shazam.
-Alors comme ça, vous existez réellement, dit Bill en changeant de ton et en prenant place en face de l’homme.
-Il semblerait.
-Vous savez surement pour qui je travail, je suppose.
-Bien entendu. L’Agence. C’est d’ailleurs comme ça que vous avez entendu parler de moi.
-Oui. Mais nous savons peu de choses. Juste que le sorcier Shazam est le protecteur du monde…
-C’était il y a fort longtemps. A présent, je ne fais qu’observer le monde. Et en observant, j’ai découvert un être dangereux, bien plus dangereux que tout ce que l’Agence a combattu jusque-là.
-Dites-moi tout ce qu’on doit savoir, et j’informe le Directeur Black !
-Je ne suis pas venu pour avertir l’Agence. Je suis venu pour former mon nouveau champion…
-Alors pourquoi m’en parler ?
-C’est vous, mon nouveau champion !
-Pardon ?
-Cela fait un moment que nous vous observons…
-«Nous»? Qui ça, «nous» ?
-Peu importe! Toujours est-il que vous possédez un grand potentiel qui ne demande qu’à éclore. Je peux vous donner d’incroyables pouvoirs. Et je suis persuadé que vous seul serez capable de l’arrêter !
-Arrêter qui ?
-Vous ne le saurez uniquement si vous acceptez ma proposition.
-Sans vouloir vous manquer de respect, vous délirez! Je ne suis qu’un petit agent de rien du tout. Pourquoi ne pas choisir John, tant que vous y êtes ? demanda Bill en désignant le barman.
-Je vous l’ai dit, vous avez un potentiel. Et puis, nous avons d’autres projets pour Monsieur Miller.
Bill poussa un soupir.
-Laissez-moi quelques jours pour réfléchir…
-Très bien. Je vous recontacterai dans 3 jours. Mais je connais déjà votre réponse!»
*****
Orlando, Floride. Deux ans plus tard.
Bill était à table avec sa femme et ses deux fils. James, 7 ans, et Kevin, 4 ans.
«Bien travaillé, Papa? demanda Kevin.
Quelques heures plus tôt, dans un temple maya…
«Bordel de merde, Baxton! C’est tout ce que tu sais faire?
-Je t’emmerde, Strange!
-C’est clair que tu m’emmerdes! Si je n’étais pas collé à ce putain de mur, et si cet enculé n’avait pas bridé mes pouvoirs, l’affaire aurait été bouclée depuis des plombes. Finis-le, putain! Fumes-le avant qu’il…
-Tu me les casses, Strange!»
Et dans un hurlement de rage, Bill frappa de toutes ses forces le démon. Il le frappa si fort, que la créature ailée tomba dans le vortex qui se trouvait à ses pieds. Aussitôt, ce dernier se referma. Le démon repartit dans sa dimension, ses sorts n’avaient plus d’effets. C’est pourquoi Stephen Strange fut libéré et s’écrasa violement sur le sol. En l’espace de quelques secondes, bruits et fureur avaient fait place au calme. Bill Baxton se laissa tomber à genou, exténué.
«Comment ils t’appellent dans ton agence pourrie? demanda soudain Strange, allongé sur le sol, les bras en croix.
-Captain Marvel.
-Eh ben, Captain Marvel, t’es qu’une grosse merde.»
Bill allait répondre, mais il fut interrompu par l’arrivée d’une dizaine d’hommes vêtus de costumes noirs, avec cravates noires sur chemises blanches, et lunettes noires.
«Vous allez bien, Monsieur le Directeur? demanda l’un d’eux en aidant Bill à se relever.
-J’ai connu mieux, répondit-il. Mais je ne vais pas me plaindre, on a encore sauvé le monde.»
«Bien travaillé? redemanda Kevin à son père.
-Plutôt pas mal.
-Quand je serai grand, je serai électricien, comme Papa.
-T’es mignon, fiston. Et toi, Jim? Tu ne voudrais pas faire le même métier que ton père?
-Non. Moi, je serai un super-héros qui sauve le monde! Comme dans mes comics.
-Mouais, c’est pas mal aussi, répondit Bill avec un large sourire.
-Bon allez, intervint Demi, c’est l’heure d’aller au lit. Faites un bisou à votre père, et allez dans vos chambres.
Elle se pencha vers Bill, et lui chuchota : « Il faut qu’on parle. »
Ce qu’ils firent une fois les enfants couchés.
«J’en ai marre de jouer cette mascarade devant les enfants.
-Je sais, chérie. Moi aussi. Mais il faut tenir encore un peu. La mission pour laquelle m’a formé Shazam approche.
-Ca fait deux an que tu me dis ça…
-Je sais que ce n’est pas facile…
-Pas facile? C’est le moins que l’on puisse dire… Je suis folle d’inquiétude à chaque fois que tu pars en mission, mais je ne dois rien laisser paraître devant les garçons.
-Je tai déjà dis qu’il n’y avait aucune raison que tu t’inquiètes. Shazam m’a donné des pouvoirs inimaginables. Aujourd’hui j’ai repoussé pour la troisième fois en un mois une invasion de deadites. Chérie, je suis invincible!
-Ces pouvoirs te montent à la tête.
-Tu ne te rends pas compte! Avant ma rencontre avec Shazam, je n’étais qu’un petit agent de L’Agence. Pas un gros nul, ok, mais pas non plus le meilleur. Et en même pas 18 mois, je suis devenu le nouveau Directeur. Moi!
-Ce boulot aura ta peau!» lança Demi dans un soupir.
*****
Orlando. Vingt-cinq ans plus tard.
Bill ouvrit les yeux. Il tourna machinalement la tête vers son réveil : 6h32. Il se leva, enfila ses pantoufles et alla dans la salle de bain. Il ouvrit le robinet, recueilli l’eau dans ses mains jointes, et s’aspergea le visage. En se redressant, il vit son reflet dans la pharmacie, accrochée au dessus du lavabo. Il avait prit un sacré coup de vieux, « Captain Marvel », le Directeur de l’Agence.
Soudain, son reflet se mit à lui faire un grand sourire.
«C’est le grand jour, Billy, lui dit-il. C’est aujourd’hui que débute la dernière phase du plan.
-Je… Oui…
-Pardon? Serait-ce de l’hésitation que je décèle dans ta voix?
-Non non, soupira Bill.
-Allons, Billy. Tu ne voudrais pas décevoir ton Maître, si?
-Je me demande si ce n’est pas déjà fait…
-Haaa… Encore en train de pleurer le vieux!! Ca devient lassant, tu sais? Qu’a-t-il fait, pour toi? Ok, à part les super-pouvoirs? Il t’a manipulé. Trompé. Bien baisé jusqu'à l’os. Tu le sais. Je le sais. Et Stan le sait. C’est pour ça qu’il t’a tendu la main, qu’il t’a aidé…
-Mais j’ai dû tout lui sacrifier. L’Agence passe encore. Mais mon fils…
-C’était une épreuve nécessaire pour être certain de ta loyauté. Une épreuve que tu as réussi haut la main. Comme Abraham devant sacrifier son fils Isaac.
-Mais Abraham ne dû pas aller au bout…
-Et toi tu l’as fait. Jim s’est fait accuser de viol, et toi tu as monté la famille et les amis contre lui. Il s’est retrouvé seul, et maintenant, il est loin. C’était un mal pour un bien. Bill devant sacrifier son fils Jim.
-J’ai sacrifié bien plus que ça. Ma femme ne me parle presque plus, et Kevin s’est réfugié dans les BD que lisait son frère.
-Tout cela n’est rien, comparé au nouveau monde qui se prépare. Quand ton Maître sera là, tout cela n’aura plus aucune importance. Stan fera naître un monde nouveau. Un monde où tu auras un grand rôle à jouer. Fais-moi confiance. Fais-moi confiance comme tu l’as toujours fait.
-Oui. Tu as raison.
-Bien. A présent, prépares-toi. Tu dois te faire beau pour t’occuper des 7 morveux de Strange.»
Quelques heures plus tard, Bill, flanqué de ses deux sbires Alex Foster et Blade, enlevait les sept élèves du Sorcier Suprême, Stephen Strange. Pour permettre la libération de Satan de la prison inter-dimensionnelle dans laquelle il se trouvait, Bill devait fournir une énorme quantité d’énergie mystique. Mais la sienne ne suffisant pas, il avait donc tenté de détourner celles des élèves de Strange.
Tout se déroulait comme prévu, jusqu’au moment où Strange avait débarqué, furieux et tout puissant. Tellement furieux et puissant qu’il n’eu qu’à claquer des doigts pour faire brûler vif son ancien ami. En l’espace de quelques secondes, Bill Baxton s’était transformé en torche humaine, poussant un long cri horrible et inhumain. Il sentait ses yeux fondre, sa peau se détacher… Jamais il n’avait ressentir une telle douleur. Sa dernière pensée alla à son fils, James. Pour servir le Diable, il avait sacrifié la vie de son fils ainé. Il rassembla ses dernières forces pour murmurer un mot, un seul : «Pardon…»
*****
Dimanche. De nos jours.
Mon frère, au volant de sa voiture et moi à ses côtés, se garait devant une église qui trônait devant un grand parc, idéal pour les pique-niques.
"Regarde, me lança Kevin en désignant un homme qui nous tournait le dos et qui était posté à l'entrée du saint édifice.
-Mais qu'est-ce qu'il fait?"
Quelques heures plus tôt, j'avais téléphoné à Kevin afin qu'on revoie nos plans concernant notre père. En effet, nous avions d'abord convenu de ne lui rendre visite que le lendemain. Mais frustré de ne pas avoir obtenu de réponses de Frank Castle à propos de l'Ordre, j'avais décidé de résoudre le "mystère Papa" au plus vite. Kevin avait bien entendu accepté sans aucunes difficultés.
Nous nous étions d'abord rendus à son QG de campagne. Là-bas, une femme assez jeune nous avait indiqué une église où notre père se rendait souvent depuis le début des Primaires.
C'est ainsi que nous nous retrouvions devant ce grand bâtiment de pierres en début d'après-midi, à observer notre père, aussi figé que les gargouilles qui ornaient les murs de l'église. Au bout de quelques minutes, nous nous décidâmes à aller le voir.
«Bonjour, papa, lança Kevin.
-Vous en avez mit, du temps! répondit-il sans se retourner. Elle est magnifique, n’est-ce pas ?
-Pardon ?
-Cette église… Elle est magnifique. J’aimerai tant pouvoir y pénétrer. Mais m’y autoriserait-on ?
-Quoi ?
-Rien.
-Tu as des explications à nous fournir!
-Il semblerait, oui.
-Dis, tu ne pourrais pas nous regarder quand tu nous parles? m’emportai-je, alors que j’étais resté silencieux jusque là.
-Je… Je n’y arrive pas.
-Il va bien falloir, pourtant !
Sans perdre une seconde de plus, je me plantai devant mon père. Il paraissait bien plus las que la fois où je l’avais vu à la télé. Ses yeux, emplit de tristesse, me dévisagea.
-J’ai tout raté !
Kevin me rejoint à mes cotés.
-Comment ça ?
-Je devais être un héros, dit-il dans un soupir. Mais j’ai été l’instrument du Mal.
-Marchons, proposai-je en désignant le parc.
-J’aimerai tant pouvoir y pénétrer», murmura notre père en jetant un dernier regard à l’église.
Nous nous dirigeâmes vers le parc, Bill Baxton encadré par ses deux fils, Kevin et James.
« Pourquoi t’être fait passer pour mort? demanda mon frère.
-Pour le comprendre, il faut savoir comment tout a commencé…»
Et c’est ainsi qu’il nous révéla tout. Shazam. Les supers pouvoirs. Sa corruption par le Diable. Sa mort. Et puis vint le moment de sa résurrection.
«J’étais en train de bruler vif. Je pouvais sentir ma vie s’échapper. Puis soudain, je me suis retrouvé dans un lit entièrement blanc. De l’armature aux draps, en passant par l’oreiller. Et la pièce où je me trouvais était également d’un blanc le plus pur qu’il m’ait été donné de voir. Au pied du lit se tenait une espèce de moine. Sa capuche m’empêchait de voir son visage. Mais sa voix ne m’était pas inconnue. Il me dit que j’avais des choses à me faire pardonner, et que le moment était venu de payer ma dette envers l’humanité. C’est alors que j’appris que ma mort remontait à plusieurs mois. Après m’avoir faire rôtir, Strange et ses gosses avaient réussi à empêcher l’Apocalypse. Mais d’après ce moine, une nouvelle menace planait sur le monde. Et je devais l’aider lui et ses amis à contrer cette menace. C’est alors qu’il me dit ce qu’il attendait de moi. Je devais me présenter aux élections présidentielles. D’après lui, je devais être «l’élément inconnu». Le grain de sable dans les rouages du temps. Je n’y ai rien comprit, mais il trouva le moyen de me convaincre : il me montra un bout de l’avenir. Un avenir qui risquait de se réaliser si je ne faisais pas ce qu’il me disait. Et croyez-moi, ce futur ne doit jamais voir le jour.
-Et… J’y crois pas que je demande ça, soupira mon frère. Tu as réussi ?
-Je n’en sais rien. Je n’ai plus eu de contact avec ce moine depuis le début des Primaires. Mais je m’accroche. J’y crois.
Puis il s’adressa à moi.
-Tu sais, à propos du viol…
-Laisse tomber, répondis-je. On en reparlera quand tu seras Président.»
Et les semaines passèrent. Mon père échoua aux Primaires, ce qui le plongea dans une profonde déprime. Avait-il réussi sa mission? Nul ne le savait. Le moine, que je soupçonnais d’appartenir à l’Ordre, n’avait plus donné signe de vie, et mon père était totalement désemparé. Il avait été ramené à la vie pour une raison bien précise. Mais à présent, que devait-il faire? Il nous demanda, à mon frère et à moi, de ne pas dire à notre mère où il se trouvait. Il n’était pas prêt à la revoir. Il avait trop honte de ce qu’il avait fait sous l’influence du Diable. Nous respectâmes sa demande.
Pour ma part, outre le fait que j’avais prit mes fonctions au Musée d’Histoire Naturelle de New York, j’étais à nouveau célibataire. Adeline m’avait quitté à cause d’un costume rouge et bleu qu’elle avait trouvé sous mon lit. Persuadée que je me prenais pour un super-héros, elle me demanda de l’oublier. Quant à Clara, elle rompu car elle ne me trouvait pas assez à son écoute. Ses maux de tête ne passaient pas, et au lieu de la soutenir, j’étais occupé avec les problèmes de la Ligue. C’est d’ailleurs en Louisiane que je fis la connaissance d’un certain Tim Hunter. Je compris rapidement que c’était l’un des sept protégés de Strange que mon père avait enlevé. Bref, il nous avait aidé à combattre les lézards de Louisiane, mais la région avait été balayée de la carte. Les jours qui suivirent permirent aux membres de la Ligue de penser leurs blessures, aussi bien physiques que morales.
Et vint le jour du résultat de l’élection. J’étais devant ma télé quand j’appris la nouvelle :
« Les résultats viennent de tomber, mesdames et messieurs. Selon les dernières estimations, selon surtout les derniers messages provenant des bureaux des Etats ayant fermés leurs bureaux de vote en dernier, nous pouvons fièrement annoncer le nom du prochain ou de la prochaine Président ou Présidente des Etats-Unis d’Amérique. Avec une majorité des voix et une majorité de représentants, le nouveau dépositaire de la fonction est…une dépositaire ! Monet Ste Croix est élue Présidente des Etats-Unis d’Amérique pour quatre ans ! »
«J’espère que tu as réussi, papa, pensais-je. J’espère que tu as sauvé le futur.»
A suivre dans
La Ligue #9 et
Steelman #30