Auteur : P'tit LU
Date de parution :
- JESSICA DREW –
Je montais les escaliers menant à la rédaction du Howard the Duck. Ça ne m’enchantait pas beaucoup, mais je m’apprêtais à rembourser une vieille dette, le genre qui renvient vous hanter dix ans après. Quand j’ai poussé la porte qui donnait sur les bureaux, c’est la stupeur l’a emportée :
- Des photos, il me faut des photos ! Des photos de mutants !
- Qui m’a foutu des incapables pareils ?!
- Retrouvez mon agrafeuse !
- Michael Jackson est un mutant ! Et David Letterman aussi !
La rédaction était en plein délire. Etait-ce dû à Bush clamant haut et fort que les mutants existaient et allaient prendre la place des Humains ? Ou au centre ville qui commençait à se taper dessus ? Sans faire attention aux journalistes, je me suis dirigée vers le bureau du directeur.
- On ne passe pas, m’interdit-on d’une voix fine et déjà agaçante.
Il s’agissait de la secrétaire. Propre sur elle, l’air idiote… plus je l’observais, plus elle me semblait effectivement agaçante. Je posai mes mains sur le bureau et me penchai vers la secrétaire.
- Tu ne devrais pas être en train de paniquer avec les autres à propos des mutants explosifs ?
- Oh non, ça c’est des trucs de journaliste… je ne suis pas trop concernée. Le directeur est occupé.
- Il m’attend. Et je suis une mutante explosive.
Betty Brant – d’après son badge - devint alors blanche comme un linge. Un couple de journalistes fonça vers nous :
- Betty ! cria l’homme. Je pars au centre-ville, ça…
- « On » part, rectifia la femme rousse.
- Ça chauffe, la police craint des émeutes, on sera sur place pour couvrir ça.
- Non non non ! fit Brant. Il a dit que vous deviez rester jusqu’à ce que…
- Vos histoires ne me concernent pas… soufflai-je avec lassitude en me dirigeant vers la porte du bureau.
La porte du bureau du directeur s’ouvrit alors sur un homme noir et grand, les tempes grisonnantes qui arborait un air assez peu commode. Les trois autres eurent l’air surpris, comme si c’était la première fois qu’ils le voyaient.
- Jessica ! Je peux savoir ce que tu foutais ?!
- Calme, Robbie. Rappelle toi ton pauvre cœur. Oh, et change de secrétaire.
- Faites attention, monsieur ! lança Brant. C’est une mutante explosive !
Le couple de journaliste décida alors de se passer de l’avis de leur patron et quitta la rédaction pour partir en ville. Robertson m’invita dans son bureau et je m’installai sur le fauteuil tandis qu’il refermait la porte.
- Comment marchent les affaires, Jessica ?
- Tu m’as vraiment fait traverser New York pour me demander ça ?
- D’accord… On manque un peu de personnel actuellement, les bons reporters ne courent pas les rues.
- Wow ! Je suis détective privée, pas journaliste !
- Pas toi, mais Jones l’est, elle. On a pu vendre pas mal grâce à son histoire, sa recherche, tout ça, mais son enlèvement intéresse moins les lecteurs depuis quelque semaines. Il faudrait la retrouver, maintenant, histoire d’avoir une vraie journaliste dans cette rédaction… Et comme les flics font du surplace…
- Tu veux que je la retrouve. Pourquoi moi ?
- Parce que tu vas me faire ça gratis, Jess, n’oublie pas ce que tu me dois.
Je fis la grimace qui se rapprochait le plus du sourire :
- Tu ne changeras jamais, Robbie.
- Urich et Farell te suivront partout. Et je t’arrête tout de suite, ça n’est pas négociable.
- En fait, t’es juste un enfoiré.
- NORRIN RADD -
- Désolé, vous ne pouvez pas passer par là, m’indiqua l’agent de police noir alors que des barrages étaient placés sur les principales rues du centre-ville.
Les klaxons tout autour de nous étaient assourdissants, les voitures étaient bloquées sur plusieurs centaines de mètres.
- Attendez, c’est quoi ces conneries… répliquai-je.
- On craint des agitations dans le centre, suite à l’allocution du président, monsieur. On prend des mesures préventives.
- Préventives ?! Ça fait une demi-heure que ça pète !
- Essayez de faire demi-tour, monsieur… insista le policier d’un air maintenant plus menaçant.
Je grommelai et me tournai vers ma cliente, assise sur la banquette arrière de mon « surf d’argent ».
- Vous voulez descendre ici ou vous préférez attendre que la situation se détende ? Vous en êtes déjà à 88$, vous savez, et quoi qu’en dise ce con je ne peux pas faire demi-tour, avec tout ce monde derrière nous…
- Si vous êtes décidément incapable de m’emmener à Manhattan, je me débrouillerai seule, répondit-elle sèchement en ouvrant la portière du taxi.
Je décidai de laisser couler. Les insultes, je connaissais, depuis le temps que je faisais le taxi – les clients mécontents devaient être livrés avec le job… Et puis cette Jessica Drew m’avait bien fait rire.
BOUM
Une explosion résonna dans l’avenue, quelques dizaines de mètres derrière le taxi, secouant les piétons et faisant tomber Drew dans le taxi. Je sortis de mon « surf » pour voir ce qui se passait et lus alors la stupéfaction dans les yeux de mes voisins d’embouteillage. C’était un attentat ? Un nouvel attentat ? L’idée m’avait effleuré et s’incrustait. La Grosse Pomme ne se remettrait pas d’un nouveau 11 Septembre !
BOUM
Cette fois-ci, des voitures volèrent, projetées par le souffle de l’explosion proche, et atterrirent en s’encastrant violemment dans d’autres véhicules, faisant probablement quelques victimes innocentes.
- C’est quoi ces conneries ?! criai-je alors que des cris d’horreur montaient de partout.
Je vis passer des policiers devant moi à toute vitesse, courant vers la source des explosions, alors que Drew portait son téléphone portable à ses oreilles. Une voix s’éleva alors, pleine de rage, provenant de quelques dizaines de mètres plus loin en direction de l’origine des explosions.
- Vous rigolez moins, hein ?! Maintenant que c’est vous qui allez crever, vous trouvez ça moins sympa, hein ?! Vous allez voir ce que ça peut faire, un mutant !!
Un homme aux cheveux longs et blancs se tenait debout sur une carcasse de voiture carbonisée, et clamait haut et fort son intention de faire des victimes humaines. Non, pas un homme : un mutant. Qui disposait apparemment du pouvoir de provoquer des explosions. Il tendit la main vers des innocents qui venaient de sortir de leurs voitures bousculées par les deux explosions, et provoqua une explosion près d’eux.
- Un mutant… non, il n’a pas dit son nom, mais il fait tout sauter… retransmettait Jessica Drew au téléphone.
Je n’en revenais pas : elle était imperturbable ! Je la tirai de force hors de son véhicule que je quittai avec regrets.
- Lâchez moi, brute !
- Il faut se tirer, ce dingue va tous nous tuer !
- Je suis assez grande pour savoir ce que j’ai à faire, non ?!
Le mutant n’en était plus à s’époumoner, et créait des explosions à tout va. Il ne fut interrompu que par un homme blond qui sautait de voitures en voitures et bondit jusque devant le mutant, à qui il lança ce qui ressemblait à un bouclier. Le mutant ne put l’éviter, et tomba à la renverse, percutant violemment le sol. Son nez saignait, mais il s’en moquait.
- Les humains envoient leurs héros, alors ?
- C’est fini, tes conneries, mutant.
- Je m’appelle Nitro, et il est hors de question que je me calme avant d’avoir explosé tous les humains qui ont tué ma Amara !! Vous avez tué l’amour de ma vie parce que c’était une mutante, bande d’ordures génétiques, vous l’avez pendue publiquement !!
Il se releva brusquement et provoqua une explosion près de Steve Rogers, qui se protégea grâce à son bouclier. Propulsé par le souffle, celui-ci atterrit sur le toit d’une voiture noircie et contre-attaqua. Jessica et moi ne sûmes jamais vraiment se qui se passa ensuite, car une autre catastrophe tomba sur l’avenue : un attroupement d’hommes et de femmes, une centaine de mètres plus loin, poussa un cri d’horreur alors qu’ils venaient de ramener pour le lyncher un mutant que d’autres émeutiers avaient blessé d’un coup de pied de biche dans le ventre.
Le mutant ailé, doté d’une musculature de primate, inconscient, venait de se réveiller et avait ouvert les yeux : une rafale rouge inonda le ciel et percuta les plus hauts étages des immeubles, faisant voler des vitres en éclats.
Me retrouvant au milieu de deux attaques mutantes, je sentais la panique monter en moi, tandis que Drew relatait tous les évènements au travers de son portable.
- Ben Urich ? répéta Drew. Si vous voulez qu’il se fasse tuer, faites comme vous voulez… Bon, qu’il vienne en urgence.
Un cri de douleur perça nos oreilles, alors que le mutant ailé s’enfuyait gauchement des lieux en volant à l’aide de ses ailes en sale état. Je me tournai vers Nitro, que Captain America venait de finir de neutraliser. Le sang sur ses poings en disait long de l’état du mutant explosif.
- BEN URICH –
Ce fut une putain de journée. Fuck ! J’ai honte de le dire, mais la mort de dizaine de new-yorkais m’avait permis d’écrire le meilleur article de ma carrière. Demain à la Une du Howard : « Emeutes à New York ! ». Elles s’étaient achevées dans le sang, les flics n’ayant pas été des plus tendres, mais c’était fini. Les horreurs de cette journée avaient même rendues Kat presque supportable à côté de ce que nous avions vu. Car bien entendu, elle ne m’avait pas lâché de la journée…
Assis à mon bureau d’angle à la rédaction maintenant vide du Bugle, je sortis une bouteille de whisky du tiroir et la posai juste devant moi. Mes gamins pourraient être fiers de moi, maintenant, je participais comme tous les journalistes à la montée de panique des new-yorkais grâce à mon article. Si demain tout reprenait, il ne faudra pas se demander pourquoi. « Pourquoi avez-vous tué ce gamin, madame ? » « C’’était un mutant, j’ai lu ce qu’ils faisaient dans le journal ! Il fallait faire quelque chose avant qu’il ne m’attaque moi aussi ! ». Le pouvoir des mots… Plus fort qu’aucune arme à feu.
Fuck. Je commençais à sérieusement détester mon boulot.
- On se met à boire au travail, Urich ? me demanda le patron derrière moi.
- Ça aide à faire passer la pilule, monsieur, lui dis-je en me retournant et en observant ce grand homme noir. J’ai vu un homme se faire broyer les deux mains cet après-midi sous prétexte qu’il pouvait peut-être lancer du feu avec. La femme brûlée vive… Des émeutiers blessés ou tués par des mutants qui se défendaient, d’autres mutants qui ont tué des humains pour se marrer… Alors ne me faites pas la morale pour un peu de whisky.
Il fronça des sourcils.
- Des mains broyées ? Ça n’est pas dans votre article, ça…
J’ai haussé des épaules. C’est là que Kat est entrée dans la rédaction accompagnée de la femme qui était entrée dans le bureau du boss le matin même. Allais-je enfin savoir de qui il s’agissait ? Elle s’adressa au boss :
- Robbie, il est hors de question que cette abrutie me suive toute la journée, c’est compris ? Je la connais à peine et je viens déjà de passer les vingt pires secondes de toute ma vie.
- Urich, Farell, je vous présente Jessica Drew. Vous allez passer les prochaines semaines avec elle.
Fuck.