Urban Comics
  Urban War #1
 

Couverture : Geoff
Histoire : Ben Wawe
Date de parution : Février 2005


Il faisait sombre dans cette pièce, pensa le jeune rouquin qui se trouvait assit sur une vieille chaise en bois qui craquait au moindre geste. L’adolescent se leva, et marcha lentement vers ce qu’il pensait être la porte. Etrange, pensa-t-il. Comment pouvait-il savoir où se trouvait la porte pour sortir alors qu’il ne voyait rien ? Le jeune homme tâtonna quelques instants pour trouver la poignée, et finalement ouvrit. Une étrange impression le saisit alors, une sensation de chaleur extrême qui le brûlait presque. Et plus il avançait, plus la sensation était plus puissante, comme si il était à côté du soleil, pensa-t-il. Mais la chaleur devenait de plus en plus réconfortante, presque familière, douce, gentille. Alors qu’il avait eu peur avant, l’adolescent marchait désormais sans crainte, avec envie même.

Le jeune homme se déplaça quelques instants dans cette chaleur, ne voyant toujours rien, mais sentant qu’il approchait d’une grande source de lumière. Il leva alors ses bras pour tenter de toucher la source de la chaleur et de la lumière qu’il ne pouvait voir quand une voix sourde, forte, mais familière s’éleva dans l’obscurité pour lui parler.

« Matt…Matt…vite…je me meurs…aide moi… »



Le jeune Matt Murdock se réveilla alors en sursaut dans son lit moite de transpiration. Qu’est-ce que c’était ? Cela faisait quelques jours qu’il faisait des rêves plus ou moins semblables…il n’en avait parlé à personne, ne voulant pas passer pour un fou devant ses amis, les Natchios. Cela avait commencé il y a quatre jours, et chaque nuit un élément s’était rajouté à ce rêve étrange.

Le premier rêve s’était arrêté au moment où Matt se levait de la chaise. Le deuxième au moment où il allait ouvrir la porte. Le troisième au moment où la voix allait parler. Qu’est-ce que cela voulait dire ? Et pourquoi dans ce rêve trouvait-il anormal de ne rien voir ? Cela faisait plus d’un an maintenant qu’il avait perdu la vue…alors que voulait dire ce damné rêve ?
Normalement le jeune homme ne croyait pas aux rêves prémonitoires, mais il s’était passé tellement de choses dans sa vie ces derniers mois, qu’il était prêt à tout croire…

Le jeune Murdock se leva alors de son lit et commença à s’habiller, sa détermination grandissait. Ok, il ne savait pourquoi il rêvait de cela, mais maintenant il savait à peu près ce que son rêve voulait dire. Son ami avait besoin de lui, se dit-il en cherchant sous son lit ses affaires de Daredevil. Et il n’était pas le genre à laisser tomber un ami.



A plusieurs rues de là, un homme s’entraînait seul. Rapidement et avec une précision impressionnante, il alternait des centaines d’enchaînements souvent meurtriers, toujours dangereux pour l’ennemi. Bien qu’il soit très tôt, il n’arrivait pas à dormir. Il ne dormait d’ailleurs pratiquement jamais. Ses nuits étaient toujours agitées, pleines de cauchemars, de morts, de sang, d’actes manqués ou regrettés. Sa vie n’avait jamais été facile, et de tous temps il avait dû se battre. Mais heureusement, il était en train de passer la main. Heureusement, tout cela allait s’arrêter pour lui. Heureusement, bientôt il pourrait goûter à la retraite qu’il désire depuis tant d’années…

L’homme se trouvait dans un gymnase désaffecté qu’il squattait régulièrement. C’était ce qu’on pouvait le plus rapproché d’un chez lui pour cet être qui changeait d’adresse au moins deux fois par an et ce depuis plusieurs années. Des années, pensa-t-il…qu’avait-il fait il y a tant de temps pour mériter cela ? Il ne le savait pas, et c’était ce qui le hantait le plus. Ces questions avaient depuis longtemps troublées sa pensée.

Après plusieurs heures d’entraînement aux différents arts martiaux connus ou inconnus, certains étant même inventés par lui-même pour ses besoins spécifiques, l’aveugle stoppa tout et s’assit au milieu d’un vieux matelas, après avoir enlevé son jogging et son t-shirt noir. Car en effet, cet homme était aveugle. Pas de naissance, non. On l’avait fait devenir aveugle. Mais il n’en parlait jamais, comme si c’était une blessure jamais refermée, comme si il souffrait encore à chaque instant.

Il resta là, assis dans la position du lotus, de longs instants. Il se recueillait, rentrait en lui-même pour pouvoir faire revenir son énergie dans ses muscles, comme on lui avait enseigné. Des vapeurs s’échappaient de son corps encore chaud et fatigué des longues heures de combat contre des êtres invisibles. L’homme se devait d’être au top de sa forme. Son jeune élève était certes fort, mais Stick jugeait qu’il fallait qu’il passe un dernier test, pour être sûr de son choix. Et pour cela, il devait être en forme, Matt étant devenu très, très, très fort et doué.

Stick sourit en pensant cela, tout en se concentrant pour faire le vide dans ses pensées tandis que la chaleur de son corps nu continuait à monter vers le plafond du vieux bâtiment froid et désaffecté. Matt et lui avaient passé une année ensemble, une année où il lui avait apprit tout ce que l’adolescent savait. Mais pas tout ce que lui savait. Cela faisait une grande différence, mais l’aveugle savait que le jeune homme pourrait pallier son manque d’expérience par sa jeunesse et son envie.
De ce côté-là, Matt était impressionnant. Toujours volontaire, toujours prêt à se défoncer, jamais fatigué, jamais énervé. Il avait une détermination impressionnante, et cela provenait sûrement de son envie de justice, et peut-être de vengeance. Stick avait souvent eut peur que son élève ne devienne un monstre, utilisant ses talents pour le crime et le meurtre. Mais désormais, il était confiant. Matt était un gosse bien.

Soudain, alors qu’il était en pleine méditation intérieure et que son énergie se renouvelait grâce à une technique apprise en Inde, une des vitres du gymnase explosa, sortant de sa torpeur l’aveugle. Il se releva rapidement, prenant au passage sa longue canne blanche qu’il déplia encore plus, de façon à en faire un grand bâton. L’homme se mit en position de combat, poussant à fond ses sens pour savoir ce qu’il se passait et qui était là. Mais rien. Il n’y avait rien.

Stick avança alors lentement, son bâton toujours en main, cherchant un intrus. Car c’était obligatoirement un intrus, la fenêtre se trouvant trop haut dans le bâtiment pour que ça soit des gamins qui s’amusent. Mais pourquoi n’attaquait-il pas ? Et où était-il ?
Alors que l’aveugle stoppait son avancée, il repéra enfin l’agresseur. Il venait de passer par la vitre brisée et atterrit avec douceur et classe sur le sol, faisant lever dans les airs quelques grains de poussières qui voletaient par la suite dans l’air dense et frais du vieux gymnase. Le nouveau venu se releva alors et fixa Stick, qui, après quelques secondes d’observations sensorielles, se jeta sur lui en criant.

Les coups pleuvaient dans ce bâtiment désaffecté. Les deux combattants faisaient un véritable ballet aérien maîtrisé et meurtrier, où chaque coup était donné pour mettre fin à la vie de l’autre. Stick, qui n’était habillé que par un caleçon noir, tentait vainement de toucher des points vitaux de son adversaire pour le mettre à terre et lui porter l’estocade finale. Mais malgré toute son expérience et sa force, son ennemi semblait parer tous ses coups, comme si il connaissait par cœur le style de l’aveugle.

Au bout de quelques minutes d’un combat acharné mais égal, les deux combattants arrêtèrent et se firent face. Stick n’avait toujours pas réussi à identifier son agresseur, qui faisait preuve d’une incroyable dextérité et d’un calme à toute épreuve : en effet, son cœur n’avait jamais battu un coup plus fortement que les autres, et sa respiration était toujours calme, bien que cachée par un bout de tissu, sûrement un masque. Comment était-ce possible ? L’aveugle lui était déjà un peu fatigué et sentait qu’il avait des marques douloureuses de coups sur son corps. N’avoir aucun vêtement n’arrangeait certainement pas cela, bien sûr…

De longues minutes passèrent ainsi. Stick savait bien que le déluge de coups et de techniques qui s’étaient abattues sur chacun des deux combattants n’avait que le prologue, un entraînement à ce qui allait suivre. Et que le véritable combat venait maintenant. L’aveugle se demanda alors si il avait une chance contre cet être masqué et apparemment invincible…



Matt était fin prêt. Il avait mit doucement et discrètement sa « tenue de combat », qui consistait en un vieux jean, un pull gris à capuche fatigué, des vieilles baskets et son masque blanc et rouge.
Alors qu’il venait de passer dans tout l’appartement silencieux sans faire le moindre bruit pour ne pas réveiller ses amis, le jeune homme entendit un bruit très petit. Mais véritablement, très petit, presque inaudible. Un son aigu, comme si une petite bombe allait tomber dans l’appartement. Et alors que le bruit se rapprochait, la vitre à côté de lui explosa en mille morceaux, le coupant à différents endroits et le faisant crier. Ça, plus le bruit de la vitre explosée, réveilla les Natchios.

Ce fut Elektra qui arriva la première, habillé d’une superbe nuisette de nuit que Matt reconnut par le frottement qu’elle faisait contre sa peau. Elle cria instantanément tandis que Matt, qui avait rangé son masque sous son pull, tentait de poser ses mains sur ce qui venait d’arriver dans la pièce. Il y arriva par tâtonnement, et fut glacé d’effroi quand il balada ses doigts sur un corps humain à moitié nu. Il le reconnaissait. Il ne l’avait que trop longuement frappé aux entraînements. Il ne l’avait que trop longuement touché lors des séances de combat…

« Stick, mon dieu, non… »

Il avait dit ces paroles d’une voix inaudible en reconnaissant le cadavre. C’était bien son maître, Stick. Celui qui lui avait tout apprit ou presque. Celui qu’il avait vu l’appelant à l’aide dans son rêve. Et Matt, qui allait sortir pour le secourir, avait désormais ses mains sur le corps froid de son ami. Des larmes commencèrent à perler sur son visage et sur les cicatrices de ses yeux.

« Oh mon dieu…oh mon dieu…oh mon dieu…il…il…oh mon dieu…
- Du calme, Elektra…calme toi !
- Mais il est mort, Matt !
- Je sais ! Dis moi, y a-t-il quelqu’un sur un toit proche ? Quelqu’un qui aurait pu lancer ce corps ici ?
- Mais pourquoi ? Oh mon dieu…
- Réponds, s’il te plait !
- Euh… »

La jeune fille se rapprocha alors de la fenêtre pour mieux voir, enjambant le corps désormais sans vie de Stick. Il y avait bien quelqu’un, une forme dans la nuit, qui les observait, et qui semblait attendre quelque chose., mais la jeune fille voyait mal à cause du noir de la nuit.

« Oui ! Je vois quelqu’un ! C’est un homme, pas trop grand ! Il porte quelque chose sur le visage…un masque bizarre ! Un masque rouge avec deux grands yeux blancs ! Matt…oh mon dieu…qu’est-ce qu’on va faire maintenant…Matt ? Matt ! »

Mais l’adolescent avait déjà foncé dehors dès qu’il avait entendu le signalement de l’agresseur de son maître. Stick était mort. Il devait le venger, c’était aussi simple que cela. Et la description qu’avait faite son amie lui rappelait quelqu’un. Quelqu’un dont il avait souvent entendu le nom et la description avec de la terreur dans les yeux du narrateur. Une sorte de confrère, ne autre sorte de héros, une autre légende urbaine. Spider Man. Celui qui s’occupait d’un quartier dans Manhattan. Il ne fallait pas beaucoup de temps pour y aller, et le gymnase de Stick était proche du quartier où sévissait ce « héros ». En descendant rapidement les marches de l’immeuble, Matt, les yeux pleins de colère et de larmes, jura alors qu’il allait avoir la peau de Spider Man. Quoi qu’il allait lui en coûter.

 
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