Auteur : Zauriel
Date de parution :
Johnny était allé se pieuter, sans vraiment savoir pourquoi son autre l’avait amené ici. Le Majestic…. En souriant, Johnny pensa qu’il avait au moins du style, le Zaratos. Johnny était allé se coucher sur le lit sans se déshabiller, ou se glisser sous les draps. Dans la pièce aux murs pourpres, l’esprit lui avait conseillé de rester sur ses gardes. Ce n’était pas la mise en garde en elle même qui avait inquiété le motard, mais le ton qu’avait qu’il avait adopté. En effet, Zaratos n’avait plus ce petit rire cynique, sa verve acide et ses mots coupants. Il avait troqué tout cela contre une voix qui se voulait plus prudente, mais qui résonnait dans la tête de Johnny comme étant beaucoup plus craintive. Il avait parlé d’une présence, d’u menace qui planait au dessus de sa tête, et il avait préféré se cacher ici. . Johnny avait posé son sac de sport près de la fenêtre et avait remarqué un 4X4 qui s’était garé à côté du chopper. Un bien joli modèle, en plus. Un Volkswagen Touran. Johnny en apprécia les lignes, mais soudain il entendit Zaratos crier au plus profond de son esprit.
« Johnny, il est déjà là. L’Enfer veut m’éliminer. »
Blaze ne comprit pas tout de suite de quoi parlait l’autre. Mais il aperçut enfin le jeune homme roux qui embrassait l’hôtel du regard avec un sourire sinistre sur les lèvres, un sourire qui mélangeait joie, mélancolie, et une haine des plus profondes. Johnny devina que l’homme en question était un ennemi, et Zaratos se mit à paniquer.
Le démon ne savait pas comment réagir. Comment avaient-Ils pu être si vite au courant de sa résurrection ? Abigail avait été d’une loyauté sans égale, Johnny ne savait strictement rien de l’existence qu’il avait entretenu avant de devenir l’ombre qu’il était aujourd’hui. Alors comment avaient-ils pu savoir ? Sans prévenir, il renvoya Blaze dans la pièce sombre et revint au premier plan de la réalité. Il savait que Blaze n’était pas de taille face à Stryker, et il ne pouvait pas se permettre de perdre son hôte. Il n’avait plus qu’une vengeance à accomplir, plus qu’une, et sa quête serait terminée. Il n’aurait plus besoin d’errer sur Terre en attendant de régler la mort de quelqu’un. Johnny était son dernier, l’ultime vengeance qu’il avait à accomplir pour qu’il puisse enfin disparaître dans un néant sans souffrances.
Jarvis était surpris. Très surpris même. Deux clients dans les dix minutes qui se suivaient, c’était rare, surtout à cette époque de l’année. L’homme arborait une paire de lunettes de soleil cerclées de métal. Ses cheveux roux retenus en catogan lui donnaient un air de dandy. Sin imperméable d’un gris délavé était d’une saleté impossible, et l’odeur qui vint agresser les narines de Jarvis fut tellement violente qu’il eut un haut-le-cœur. L’homme sourit de toutes ses dents et demanda.
« Excusez moi, mais l’homme qui me précède a laissé ses feux allumés sur sa moto. Vous pourriez le prévenir ? ».
Jarvis fut étonné de l’altruisme dont faisait preuve cet homme, et il décrocha le combiné après avoir composé le numéro de la chambre 210.
« Monsieur Ketch ? Oui, c’est la réception. Je vous appelle parce que l’on me signale que vous avez laissé vos feux allumés. »
De l’autre côté du fil, Zaratos riait avec amertume. Il savait pertinemment que Johnny avait éteint les feux du chopper. Stryker le prenait pur un abruti, et ça allait se payer. Il emprunta la voix de Johnny et répondit.
« Faites monter la charmante personne qui vous a prévenu. Je tiens à offrir le champagne. Quant aux phares, j’irai les éteindre plus tard. »
Il reposa le combiné et, assis, sur le lit, les flammes lui dévorant le crâne, il attendit la venue de celui qui l’avait défait lors de leur dernière rencontre.
Stryker riait tout doucement en montant les escaliers. Le réceptionniste, ce charmant petit vieux à l’air triste et nerveux à la fois, lui avait donné le nom du résident de l’espace 210. « Ketch, avait formulé Jarvis. Ce monsieur dit s’appeler Daniel Ketch. »
L’exorciste avait remercié le vieil homme avec un sourire un peu trop bestial, car le réceptionniste avait reculé d’un pas, derrière le comptoir, en faisant semblant de chercher quelque chose qui était tombé. Stryker l’avait laissé et s’était dirigé vers la cage d’escaliers. La dernière fois que William avait pris l’ascenseur, il s’était retrouvé avec une vieille dame possédé par un démon de la faim. L’affrontement avait été rude, long et très agaçant. Alors depuis, il évitait les ascenseurs avec une réelle panique. Daniel Ketch… Le dernier homme qu’avait possédé Zaratos. Cela faisait combien de temps? Trois, quatre ans ? Ketch était un forain. Un père de famille exemplaire, loyal envers ses patrons. Et c’était ce qui avait coûté son âme. Des mecs de la ville étaient venus voir Ketch, un soir. Le genre de mecs que l’on évite à tout prix de connaître, surtout lorsque l’on ne reste que quelques jours en ville. Les deux hommes, les envoyés du parrain du coin, avaient demandé à Ketch une « petite contribution ». La contribution en question, selon les deux hommes, habillés avec des costumes Armani, des lunettes de soleil Calvin Klein et un grosse montre Rolex au poignet gauche, devait servir à leur patron pour mieux « protéger la fête foraine d’une attaque imprévue. » Ketch n’était pas tombé de la dernière pluie. Il savait pertinemment d’où viendraient les « attaques imprévues » s’il ne volait pas l’argent de la caisse. Mais il a envoyé se faire foutre les deux hommes, qui partirent en formulant de nombreuses menaces. Ketch les avait regardés partir avec orgueil. Il se sentait fier d’avoir repoussé ce genre de menaces. Cependant, les mafieux du coin n’étaient pas du genre à abandonner la partie aussi facilement. Ils étaient revenus la nuit suivante, avec des barils d’essence. Ils avaient arrosés les baraques avec. Le patron, qui s’était déplacé, alluma lui même l’incendie, après s’être servi de l’allumette pour allumer un cigare de la taille d’un barreau de chaise. Les hommes avaient applaudi de l’audace de leur patron, et s’en étaient allés dans une nuit devenu pourpre, ne laissant pas un regard aux roulottes qui s’embrasaient. Ketch, qui partageait la sienne avec sa femme Amanda et sa fille Linda, s’était réveillé trente secondes avant que l’incendie ne se déclenche. Sa femme et sa fille périrent asphyxiées, les mafieux ayant bloqué la porte. Ketch, paniqué, parvint à sortir en cassant ne chaise contre la fenêtre. Il vit sa roulotte tomber en cendres juste après, se maudissant d’avoir refusé de donner l’argent. Il avait pris une chalbre, dans un motel du coin, dans un style beaucoup moins sympathique que le Majestic. Il jouait tous les matins à la roulette russe avec un vieux revolver qu’il avait piqué à son père, quand il était môme. Et tous les matins, il ressortait malheureusement vivant de cette épreuve. Il s’était mis à boire. Les bouteilles se succédaient à son chevet. Après tout, tout ça se finit plus vite au goulot. Et puis il s’était produit une chose étrange. Enfin, non. L’événement en lui même n’avait rien d’exceptionnel. C’était une vieille femme bossue, au nez crochu, et qui sentait l’ail. Cela, même si ce n’était guère rafraîchissant, n’avait rien d’extraordinaire. C’était le discours qu’elle lui avait tenu qui l’avait intrigué. Elle parlait d’une ombre retenue dans n vase, qui aidait les hommes à accomplir de justes vengeances. Il l’avait suivi chez elle, dans une sombre masure qui sentait l’urine et la mort. Un corbeau décharné lui tenait d’animal de compagnie. Elle l’appelait Zaratos. En fait, la vieille avait un peu menti. L’esprit n’était pas contenu dans un quelconque récipient, mais dans l’oiseau. Ketch avait accepté de servir d’hôte à l’ombre, du moment qu’il puisse se venger des assassins de sa famille. La vieille avait acquiescé. L’existence même de Zaratos provenait de la vengeance qui habitait le cœur des hommes. Zaratos avait possédé Ketch, et était prêt à accomplir l’acte de vengeance. Mais cela ne s’était pas passé comme l’avait prévu l’esprit. C’était l’ultime vengeance qu’il devait accomplir pour pouvoir enfin mourir. Il était ivre de joie, et ne s’était pas rendu compte de la menace que représentait le protégé du parrain qui avait tué sa famille. Le jeune homme, qui était féru de sciences occultes, avait développé des aptitudes à exorciser, et entretenu certaines relations avec des démons, d’après les rumeurs . Alors que Zaratos s’apprêtait à arracher le cœur de celui qui avait brisé sa famille, Stryker avait débarqué dans le bureau, une croix dans une main, une bible dans l’autre. Il était torse nu et sa poitrine s’ornait d’une étoile à six branches. En la personne du révérend William Stryker se réunissaient les principales qualités de l’Enfer et du Paradis : la foi et l’ambition. Zaratos ne s’était pas méfié. Il avait lâche le gros homme qui pleurait et s’était jeté sur l’intrus. Mais l’autre avait prévu le coup, et d’une parole, Zaratos s’était retrouvé dans le corps du corbeau, à des kilomètres de Ketch. Celui ci fut ensuite torturé avant de rejoindre les siens de l’autre côté de la barrière.
Stryker arriva devant la porte de l’espace 210. Il mit sa main sur la poignée, pour la retirer aussitôt, frappé par la douleur. Il s’aperçut alors que de minuscules serpents sortaient de la serrure pour venir le mordre à la main. Fermant les yeux, il se concentra et ils disparurent.
De l’autre côté de la porte se fit entendre un bruit long et strident. Comme celui d’une tronçonneuse. Le révérend fit brusquement un pas sur le côté et évta de justesse la porte du studio qui sortit comme par magie de ses gonds et alla percuter avec violence le mur qui lui faisait face. Zaratos se montra dans l’encadrement de la porte. Il n’avait plus peur. Il était en colère.
« Alors l’Enfer ramène ses petits toutous ? Comment allez vous, révérend ? »
Stryker s’essuya la bouche, dans un geste plein de complaisance et de mépris.
« Je suis content que tu te souviennes de moi, espèce de merde. Tu es prêt ? »