Histoire : Ben Wawe
Date de parution :
On n’emprisonne pas une flamme, on n’enchaîne pas un être impalpable.
Jules Verne.
« Nom de dieu de merde. »
Frank Middle n’arrivait pas à y croire. Jamais il n’aurait pu imaginer que l’alerte maximale puisse être décrétée. Et jamais que ça soit pour une véritable crise, et pas pour un entraînement. Normalement, c’était l’endroit le mieux protégé du monde, et aussi le plus secret. Ceux qui vivaient ici étaient triés sur le volet, aucun ne sachant réellement pourquoi ou pour qui il travaillait.
Normalement, oui, rien ne devrait pouvoir gêner l’organisation de ce lieu. Et pourtant, c’était la panique.
Les différents patients amenés par les hommes étranges d’un certain Osborn étaient traînés dans des camions ou des hélicoptères, et personne ne savait vraiment pourquoi. Les supérieurs étaient difficilement joignables, certains étages de l’énorme complexe souterrain étaient apparemment perdus, et globalement la panique régnait. Le seul ordre que Frank avait eu était de surveiller le transfert des patients, et de tirer à vue sur tout ce qui ne portait pas un badge. Pour le moment, ça lui suffisait.
Mais, au fond, il brûlait d’en savoir plus.
Même si il n’était qu’un petit garde, qu’un des types qui se faisaient en général tuer dans les films ou les romans, il était quelqu’un d’intelligent et de doué dans l’observation. Il avait bien remarqué que tout ne tournait pas toujours très rond par ici, et il prenait régulièrement des notes sur ce qui lui paraissait suspect.
Bien sûr, c’était interdit, mais il prenait quand même le risque. Son instinct lui disait que quelque chose était pourri ici, et l’alerte du jour semblait confirmer ses dires.
« Hey ! »
Il vit un de ses chefs passer dans le couloir à sa gauche, et tenta de l’appeler, mais celui-ci fonça sans s’arrêter. Frank soupira, lâcha son arme d’une main et approcha son poignet de sa bouche pour communiquer avec la montre qu’on lui avait donné lors de son arrivée ici. Celle-ci permettait de parler avec tous ceux qui en portaient une similaire, et ça faisait lui de radio évoluée entre les membres de la base. En plus, c’était beaucoup plus discret que les anciens modèles beaucoup trop visibles.
« Mitchell ? Chef Mitchell ?
- Quoi ? »
La voix froide et énervée de son patron se fit entendre. Il n’était que très rarement de bonne humeur, mais Frank sentait dans son ton que ça n’allait vraiment pas. Apparemment, il se passait quelque chose de totalement énorme dans les niveaux sous eux, et l’évacuation totale semblait être très proche.
Mais avant ça, il voulait en savoir plus sur la crise, pour pouvoir le noter plus tard et tenter d’en tirer un bouquin ou quelque chose du genre. Après tout, si il y avait du fric à prendre là, il ne se gênerait pas.
« Qu’est-ce qu’il se passe, patron ? Vu d’ici, ça a l’air d’un beau bordel, mais…mais j’aimerais en savoir un peu plus, quand même. J’ai comme l’impression que ce qui est en bas risque de remonter, et il vaudrait mieux qu’on sache ce qu’on va devoir affronter avant que ça nous tombe sur la tête ! »
Sa réflexion était crédible et logique, et il attendit quelques secondes la réaction de son supérieur. Malgré sa mauvaise humeur continuelle, l’homme était quelqu’un de juste et d’assez honorable, et il n’avait jamais vraiment mal traité ses gardes. Frank s’attendait donc à ce qu’il lui dise de quoi il retournait, mais il fut plus que surprit par ce que lui répondit son supérieur.
« Ecoute, espèce de petit con stupide, je n’ai pas le temps pour ça ! Toute la base risque de péter au sens propre dans quelques minutes, et j’ai franchement autre chose à faire que de gérer la curiosité d’un petit garde imbécile et qui pète plus haut que son cul ! Reste à ton poste, tire sur tout ce qui bouge et fais ta prière. Quelque chose me dit que ça va te servir. »
Il coupa alors la communication, laissant le garde plus que stupéfait.
Bien sûr, il sentait que la situation était difficile, mais il ne pensait pas que c’était à ce point-là. Si Mitchell lui avait répondu ainsi, c’est que tout espoir avait été abandonné, et que les huiles se préparaient clairement à faire sauter le complexe pour éviter que ce qu’il s’était libéré ne s’échappe avec ses secrets…et la mémoire de ce qu’il avait subit ici. Nul doute qu’ils voulaient ainsi assurer leurs arrières, mais ça faisait clairement comprendre à Frank qu’il allait y passer, d’une manière ou d’une autre.
« Putain. »
Tous les autres patients avaient été évacués, et il était désormais seul dans ce couloir blanc très propre. Il se passa sa main libre sur ses cheveux où la sueur était déjà présente, et sentit l’angoisse monter en lui. Il n’avait aucune idée de quoi faire pour s’en sortir, et ça l’affolait vraiment.
« Je peux pas m’enfuir…ils me retrouveraient, et ça serait l’enfer pour moi. Et je peux pas rester ici…il va sûrement m’arriver quelque chose. Je suis coincé…
- C’est vrai. »
Une voix s’était faite entendre derrière lui, et il se retourna immédiatement, l’arme levée et prête à tirer. Mais alors qu’il s’attendait à voir quelqu’un le menaçant avec un autre flingue ou un monstre prêt à lui sauter dessus, il n’y avait rien. Strictement rien.
« Quoi ?! »
Pourtant, il était sûr qu’il avait entendu une voix. Une voix de femme, pour être exact. Mais il n’y avait personne, là. Et ça commençait sérieusement à l’inquiéter.
« Qui…qui est là ? »
La sueur perlait à grosses gouttes sur son visage et son corps, alors que ses mains étaient crispées sur son arme. Il était prêt à tirer au moindre geste ou à la moindre ombre suspecte, mais il se sentait plus comme la proie que le chasseur. Quelqu’un, ou quelque chose, était en train de jouer avec lui, et il savait au fond de lui qu’il ne gagnerait pas. Qu’il ne pouvait pas gagner.
« La vengeance, petit con. Juste la vengeance. »
Son arme commença alors à chauffer étrangement tandis que Frank sentait une odeur de…brûler. Les couloirs et tout le centre étaient un endroit où tout était propre et stérilisé à cause des expériences, et il était impossible qu’il puisse sentir quelque chose comme ça. Il y avait vraiment un souci, se dit-il avant de devoir lâcher son flingue, devenu beaucoup trop brûlant pour lui, malgré ses gants en cuir.
« Mais…mais…
- Pas de mais. Crie juste.
- Oh, arrête de t’amuser, John. »
Une femme et un homme apparurent alors comme par magie devant lui.
Elle avait des cheveux blonds très clairs mi-longs et était couverte d’équimoses. Simplement habillée d’un pantalon blanc et d’un chemisier de la même couleur qu’on donnait aux patients, elle semblait au premier coup d’œil pathétique, avec toutes ses blessures et son visage ravagé par d’anciennes larmes. Mais ça n’était qu’au premier coup d’œil.
En regardant mieux, Frank vit une détermination extrême dans ses yeux. Les mains irradiant d’une puissance étrange, cette femme était digne des vieilles légendes des grandes héroïnes. Même si son apparence était trompeuse, son regard montrait à quel point elle était forte et motivée à en finir. Il frissonna en la voyant ainsi.
Lui était aussi blond, mais ses cheveux très courts étaient beaucoup plus foncés que ceux de sa camarade. Il portait les mêmes habits qu’elle, mais il n’y avait pas toute la force de caractère qui ressortait de chez la jeune femme. Dans ses yeux, le garde pouvait plus y lire une perversité très présente et une envie de sang et de dépravation. Son sourire accentuait son côté vicieux, et tout son corps lui cria que cet être était mauvais et qu’il fallait s’en éloigner au maximum. Ca risquait de mal finir.
Malheureusement, il ne pouvait pas fuir. La femme les avait apparemment rendus visibles, et lui semblait contrôler la température de son arme, et de ses cheveux vu que ceux-ci commençaient légèrement à s’embraser. Il n’était qu’un faible humain face à des êtres surhumains et tout ça ne lui disait décidément rien. Il sentait qu’il était réellement en danger, et qu’il n’avait aucune échappatoire cette fois-ci. Il était piégé.
« Je suis désolée. Vraiment. Ce n’est pas personnel.
- Qu…quoi ?
- Adieu. »
La jeune femme leva sa main droite, fit une petite mine triste et ce fut le dernier souvenir de Frank Middle. Elle serra son poing, et il sentit son cœur s’arrêter à ce moment-là. Comme si c’était elle qui avait stoppé l’afflux de sang…comme si c’était elle qui l’avait tué…
Les effets arrivaient. Petit à petit.
Jane savait qu’elle avait fait une folie, mais elle ne regrettait rien. Autour d’elle, la folie régnait, et en suivant l’évolution de la situation sur le moniteur du laboratoire de Karl, elle avait bien compris que toute la base était condamnée. Les quatre premiers patients s’étaient échappés, et avaient commencés leur entreprise de démolition. Rien ne pourrait les arrêter. Et elle était donc sûre d’avoir fait le bon choix.
Maintenant, il lui fallait juste attendre pour savoir si ce qu’elle avait déduit des travaux et de l’erreur de Karl était juste. Elle s’était jetée une dizaine de minutes plus tôt sur l’ordinateur de son collègue qui reposait toujours à terre sous une forme monstrueuse, et avait essayé de retrouver la composition des pilules données par Essex à leurs patients.
Pour son ami, seule l’exposition aux rayons leur avaient permis d’obtenir de tels pouvoirs. Mais pour moi, c’était l’exposition plus ces pilules qui avaient données un tel résultat. Et elle attendait donc de savoir si elle avait raison.
La jeune femme inspira lourdement. Elle avait peur. Ca faisait des années qu’elle n’avait plus vraiment ressenti ça, et ça ne lui avait pas beaucoup manqué. Elle avait eu beaucoup de chance en trouvant rapidement la formule des pilules d’Essex, qui étaient la simplicité même : n’importe quel scientifique aurait pu en faire en quelques minutes à peine. Et même si elle n’était pas biologiste, elle se trouvait dans l’antre de son ami qui aimait tant parler de son travail et de ses techniques.
Ca n’avait donc pas été trop difficile de créer une pilule Essex, et elle était alors passée dans la pièce à côté en retenant son souffle.
C’était juste dans la pièce annexe à son laboratoire que Karl avait installé la machine à rayons, et celle-ci était heureusement encore calibrée sur les capacités des quatre patients dont il avait tenté de prendre les pouvoirs. Elle s’était donc traitée elle-même à ce qu’avait inventé Essex, puis s’était dépêchée d’ingurgiter la petite pilule qu’elle avait créée avec tout le matériel de son ami. Et maintenant, elle attendait.
Aucune douleur ne venait. Aucun spasme. Rien. Le changement, si il y en avait un, ne lui faisait ressentir aucune souffrance, et ça l’inquiétait un peu. Karl non plus n’avait pas eu mal…au début. Puis, il était mort en quelques secondes à peine. Allait-elle suivre son destin ? Allait-elle aussi mourir parce qu’elle avait jouée au savant fou, alors qu’elle avait fait la morale à son ami quelques minutes avant ?
Jane sourit légèrement à cette pensée. Karl lui ferait certainement la tête vu sa conduite, qui était exactement la même que la sienne. Mais le sourire s’effaça quand elle se rendit compte que son ami était mort, et qu’il ne reviendrait pas. Il était disparu, désormais, et elle luttait pour sa survie.
Dehors, des monstres se battaient et on ferait sauter le complexe pour les empêcher de sortir. Ses supérieurs se fichaient de son existence, et sa seule chance pour s’en sortir reposait sur l’idée complètement folle de Karl Rebeilyk. Mais elle n’avait que ça à quoi se raccrocher, malheureusement.
Soudain, alors qu’elle était encore plongée dans ses pensées, un énorme tremblement prit la pièce dans laquelle elle se trouvait. Elle savait ce que c’était. La phase deux de l’évacuation était enclenchée, et ça voulait dire qu’il ne restait que cinq minutes avant l’explosion finale de tout le complexe. Maintenant, les portes étaient scellées, et plus personne ne pouvait normalement entrer ou sortir. Les rats étaient pris au piège, selon les inventeurs du bâtiment. Et on les abattrait sous peu pour oublier leurs existences.
Sauf que Jane, elle, n’était pas d’accord. Elle ne voulait pas mourir. Pas comme ça. Pas maintenant.
Elle avait passé toute sa vie à se battre contre un sort contraire, et ce n’était pas aujourd’hui qu’elle allait arrêter. Elle soupira lourdement, se relevant vu qu’elle était tombée au sol lorsque celui-ci avait commencé à trembler. Il fallait qu’elle sorte d’ici. Il fallait absolument qu’elle s’échappe.
« Mais… »
Ses yeux tombèrent alors sur ses mains, et elle faillit défaillir. Celles-ci étaient en flammes ! Elles brûlaient, et elle n’avait pas mal ! Le processus de changement de couleur avait certainement dû se passer durant le tremblement et elle n’y avait pas fait attention. Mais ça y était ! Elle brûlait ! Elle avait les capacités du patient numéro trois !
Mais alors qu’elle voulait tester celles des autres, elle se retint. Le souvenir et la vision de Karl à ses pieds la stoppèrent, et elle décida de se cantonner à ce qu’elle faisait pour le moment. Le patient pouvait se transformer en torche humaine et voler. C’était tout ce dont elle avait besoin pour s’en tirer. Sauf qu’elle ne savait pas comment faire.
Néanmoins, la jeune femme prit une grande inspiration et prit son courage à deux mains. Elle n’avait pas le choix. Réussir ou mourir. Elle décida de compter jusqu’à trois et de penser à quelque chose de précis dans son esprit pour allumer le feu. Un mot. Une phrase, peut-être. C’était un déclic mental que beaucoup d’hypnotiseurs utilisaient pour parvenir à leurs fins, mais c’était aussi fin en psychiatrie pour aider les patients à atteindre leur potentiel.
Et c’était de ça qu’elle avait besoin, maintenant. D’une phrase pour se débloquer. Quelque chose avec les flammes. Allumez les flammes, par exemple. Flammes, brûlez. Ou bien…oui. Ca, ça sonnait bien. Ca, ça allait fonctionner. C’était son seul espoir, et elle sentait au fond d’elle que ça fonctionnerait. Elle en était sûre.
Elle soupira encore et alors que tout recommençait à trembler autour d’elle, elle ferma les yeux pour se concentrer et murmura quelques mots, dans l’espoir que ça joue comme un déclencheur de ses nouvelles capacités…et dans l’espoir aussi que celles-ci ne la tuent pas.
« Flammes…en avant ! »
« Reed ! Ben ! »
A nouveau, Susan se rendit visible en compagnie de John, et un sourire apparut sur son visage, le premier depuis qu’ils avaient été enlevés et enfermés dans cette horrible prison. Et la raison de cette illumination se tenait devant elle : l’homme qu’elle aimait, Reed Richards, était là, et elle courait déjà pour le rejoindre.
Malheureusement, le chef de leur petit groupe était beaucoup trop faible et son camarade Ben Grimm devait donc le porter. Richards était déformé par son pouvoir, et ressemblait plus à une sorte de matière longue et gluante qu’à un véritable être humain. Heureusement, son visage endormit prouvait encore qu’il était là et vivant grâce à sa bouche ouverte pour respirer, et même si elle aurait voulu le prendre dans ses bras, ça suffisait pour le moment au bonheur de la jeune femme.
« Reed est trop fatigué. Je suis entré dans sa cellule pour lui dire que c’était bon, qu’il avait réussi, et il a juste sourit avant de tomber dans les pommes. Je crois qu’il a vidé toutes ses réserves. Il n’en peut plus.
- Ca se comprend. »
John avait répondu à la voix lourde de Grimm, et ses deux collègues furent surpris de sa réflexion. Normalement, Rainbow était l’élément mauvais du quatuor, celui qui n’était là seulement par intérêt et parce que Reed le menaçait de le dénoncer. Il détestait cordialement leur chef, normalement.
« Quoi ? Qu’est-ce que tu dis ?
- Ouais…ça se comprend qu’il soit claqué. Même si je ne supporte pas son arrogance et son côté supérieur, il faut bien avouer que sans Reed, je serais encore en train de me faire torturer par ces tarés dans ce putain d’aquarium. Sans lui, on serait tous encore en train de morfler. Il a fait un travail de dingue. Ca se respecte. »
Les deux autres acquiescèrent. Il disait vrai. Richards avait fait là un travail extraordinaire pour les libérer, et il faudrait le remercier comme il le fallait quand il se réveillerait. Mais ils avaient autre chose à penser, avant ça. Ils devaient se libérer, et fuir au plus loin de leurs bourreaux pour commencer leur vengeance. Et ça ne semblait pas très simple, vu d’ici.
« J’ai tabassé quelques gardes, et ils m’ont dis que le complexe va sauter. Apparemment, leurs patrons préfèrent nous voir morts que d’attendre qu’on les retrouve. »
Sue posa son regard sur les mains rocheuses recouvertes de sang, et comprit que Ben ne rigolait pas. Et qu’il avait changé, aussi. Le petit garçon mal dans sa peau commençait lentement à se transformer, et dans une telle situation, ce n’était pas si mal. Elle était la seule à pouvoir prendre le commandement en l’absence de Reed, et même si elle n’avait jamais fait ça de sa vie et allait totalement à l’aveuglette, elle était sûre qu’elle aurait besoin d’un type comme lui pour les sortir de là.
« Ok. Je crois que j’ai un plan, et… »
Mais la jeune femme ne put aller plus loin. Une énorme forme de feu venait de brûler le sol à côté d’elle et le toit au-dessus, passant extrêmement rapidement dans l’étage. Mais même si elle avait été rapide, cette personne ne l’avait pas été assez pour éviter de reconnaître les particularités de ses pouvoirs.
Tous les trois comprirent, en la voyant, que c’était une copie des capacités de John, et celui-ci serra des poings en observant le trou dans le toit.
« Putain…ils ont osé ! Ils ont osé me copier ! Les chiens ! »
Sue voulut le calmer en s’approchant de lui, mais déjà sa peau se transformer en flammes. La colère se lisait dans les yeux de l’homme contre qui elle avait toujours du ressentiment, mais là elle ne pouvait que le comprendre. Tous les quatre détestaient l’idée que d’autres puissent avoir les mêmes pouvoirs qu’eux, et elle savait qu’elle réagirait exactement pareil à sa place.
« Je vais la rattraper !
- La ?
- C’est une femme, je l’ai vu. Et j’y vais !
- Non ! Attends ! »
Mais c’était trop tard. Rainbow était déjà parti dans le trou, et il ne restait plus Reed inconscient dans les bras de Ben, Grimm lui-même et elle, Susan Tempest. Elle était en charge du groupe, et le complexe dans lequel ils se trouvaient allait bientôt exploser. Ils n’avaient aucune chance d’atteindre la surface à temps, et ça ne règlerait pas le problème de ceux qui les attendraient en haut.
Elle soupira lourdement puis reprit la parole d’une voix un peu lasse, ses beaux yeux ravagés par les larmes posés sur la forme monstrueuse de son nouvel ami.
« J’ai un plan, Ben. Mais c’est risqué.
- Vas-y. On n’a pas le choix, non.
- D’accord. Si…si on ne s’en sort pas, je voulais dire…je t’aime bien. Je ne te l’ai pas assez dis, mais je t’aime bien. On devrait peut-être plus parler, si on survit.
- Ouais. Moi aussi je t’aime bien, Sue. Et il faudra qu’on parle plus. »
Les deux surhumains sourirent, tandis que le décompte pour l’explosion arriva enfin à expiration. Le complexe entier fut soufflé par la force des explosifs, et tous les étages furent réduits à néant en quelques secondes à peine. Rien d’humain ne pouvait survivre à ça, et au loin, les Architectes poussaient un soupir de soulagement. Leurs soucis étaient écartés, et leurs vies sauvées. Normalement.
Deux jours plus tard. A deux kilomètres de là. Le sol commençait à bouger.
A un endroit précis de cette terre difficile et remplie de petits cailloux de l’Etat de Washington, tout à l’Ouest des Etats-Unis et à quelques centaines de mètres de la mer, ça bougeait. Et quelque chose était en train de sortir. Une sorte de sphère. De sphère invisible.
On pouvait en effet deviner celle-ci par le trou qu’elle faisait en sortant du sol, mais il n’y avait rien à part ce changement dans la terre. Personne n’observait ça pour le moment, mais ceux qui auraient regardé ce phénomène auraient très certainement pensés qu’ils avaient trop bus ou qu’ils méritaient une séance chez le psy pour imaginer de telles choses. Mais c’était vrai. Ca existait. Et c’était presque totalement sortit.
« Enfin. »
La sphère sortit totalement du sol, puis fut dissoute par Susan Tempest, qui saignait du sang. Elle était exténuée, et ça se voyait. Ca faisait quatre-huit heures qu’elle avait créée cet énorme bouclier rond pour les protéger, elle, Reed et Ben, et ça avait fonctionné. Grâce à ses pouvoirs, aucun d’entre eux n’avait souffert de l’explosion, et elle avait profité de celle-ci pour faire bouger la sphère sur le côté pour fuir l’endroit où se trouvait le complexe.
Malgré la douleur que ça lui faisait, la jeune femme était parvenue à pousser le petit groupe assez loin de leurs adversaires, et après avoir tant attendu sous la terre, c’était enfin terminé. Elle était enfin libre.
« Sue…je suis là… »
Richards mit un bras sous l’aisselle de sa copine pour l’aider à marcher et à tenir debout. Il n’allait toujours pas très bien. Il avait énormément souffert de devoir jouer l’autiste, et certaines conséquences psychiques risquaient d’être irréversibles, surtout qu’il n’arrivait plus à bouger le doigt qu’il avait utilisé pour faire un trou dans le sol. Il avait dû rendre celui-ci infiniment petit pour échapper aux systèmes de sécurité, et ça avait nécessité un effort absolu.
Néanmoins, c’était fini maintenant. Ils étaient sains et saufs, et sauvés.
« Et je suis là aussi, Reed. »
Ben mit ses deux grandes mains à l’horizontale, et son ami lui sourit. Il posa Sue sur la première, la jeune femme étant trop fatiguée pour faire le moindre geste, et alla sur l’autre. Richards poussa alors un grand soupir. Il était totalement exténué, et n’avait plus la force de faire le moindre geste. Comme son amie, il se laissa sombrer dans le sommeil sous le regard attendrit de son colosse de camarade.
« Hum. Touchant. »
Le visage de Grimm passa en une seconde de la douceur à la colère en relevant ses yeux. Un homme se trouvait là. De taille moyenne, son visage était caché par l’obscurité de la nuit, et il croisait les bras. Quelque chose dans son air et sa façon de se tenir faisaient penser qu’il se prenait pour supérieur à Ben, qu’il était plus arrogant. Immédiatement, il le détesta.
« Qui êtes-vous ? Que voulez-vous ? »
La voix du colosse était lourde de menaces, et cela fit glousser l’homme devant lui. Si il n’avait pas tenu Sue et Reed, Ben se serait déjà jeté sur lui pour le détruire membre par membre.
« Qui je suis ? Appelle-moi Victor, Benjamin Grimm. Victor Von Doom. Et ce que je veux ? »
Il s’approcha alors pour que Grimm voit son visage, et celui-ci frissonna quand il aperçut enfin sa face. Une vraie figure de cauchemar. Une horreur sans nom. Il savait que cette vision le hanterait jusqu’à la fin de sa vie.
« La vengeance, mon cher. Simplement la vengeance. »