Histoire : Ben Wawe
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La nuit était noire et trouble, c’était une soirée sans lune dans un quartier étrange et malfamé de New York. Non, ce n’était pas Hell’s Kitchen, certainement le pire quartier de l’énorme ville qui est souvent vue comme la plus grande et la plus puissante cité du monde, mais plus un endroit près des docks, un quartier rempli de maisons en bois délabrées et de différents ponts menant à l’eau. Un quartier difficile pour gens difficiles.
Ryan Mitchell était un homme d’une trentaine d’années, roux, assez grand et toujours stressé et angoissé. Surtout ce soir. Ce soir où il devait rendre des comptes à son chef, à cet homme qui lui avait permit de se faire énormément d’argent…à cet homme qui l’avait sortit de la misère pour s’occuper de ses affaires à sa place…à cet homme qui lui avait permit de sortir sa mère de sa maison en ruines…à cet homme qu’il avait déçu…à cet homme qui risquait de le tuer dans quelques instants…
Mitchell sortit difficilement une cigarette de son paquet presque détruit par le froissement, et tenta de l’allumer avec ses mains qui tremblaient énormément. Alors que le briquet allait et venait autour de sa cigarette du fait de son tremblement, Ryan pensait bêtement qu’il se ferait bien une petite branlette avec ça, ça irait tout seul…cette blague un peu malsaine apporta un peu de rire à l’intérieur de l’irlandais tandis qu’il avait la peur de sa vie. Du moins, jusqu’à cet instant.
Soudain, une voix forte, sombre et difficilement reconnaissable comme humaine se fit entendre et fit perdre le briquet et la cigarette à Mitchell.
« Ryan, tu es à l’heure, c’est bien… »
Lentement, l’irlandais se retourna et vit les ombres de quatre personnes dans l’obscurité. Comme toujours, son chef ne se déplaçait jamais sans ses gardes du corps : un grand type immense qui était toujours derrière et avait une voix cassée et brutale, une jeune fille apparemment aux formes avantageuses (du moins autant que Ryan pouvait la voir dans l’ombre) et un adolescent qui ne disait rien à chaque fois. Son chef, lui, était devant le grand type et entre la fille et le jeune homme. Il n’était pas très grand, mais ses yeux semblaient lancer des éclairs. Ce fut lui qui parla après.
« Je suis heureux de te revoir, Ryan. Comment vas-tu ?
- B…bien…
- Bien ?
- O…oui…
- C’est étrange…
- Pou…pourquoi ?
- Parce que, normalement, quand on perd 5 000 dollars qui ne sont pas à soi, on ne doit pas se sentir bien…pas vrai Johnny ?
- Ouaip, moi je me sentirais pire qu’un jour de chiasse quand t’as pas de papier Q… »
C’était l’adolescent qui venait de parler. Etrange, pensa Ryan, il ne parla jamais, c’était peut-être pas une bonne nouvelle…
« Eu…euh oui…mon…monsieur…
- Je me demande ce que feraient les autres organisations si cela leur arrivait…a ton avis, que ferait le Parrain de Chicago ? Tu sais, le fameux Cole Cash ?
- Euh…euh…je…je sais pas, monsieur…
- Moi je crois qu’il te torturerait en te faisant bien souffrir…oui, je crois bien que ça serait ça…heureusement que je ne suis pas comme lui, hein Ryan ?
- Ou…oui monsieur…
- Je ne vais pas te torturer. Je vais te laisser une semaine. Une seule semaine. Pour retrouver l’argent que tu as perdu, volé, donné, brûlé…je sais pas ce que tu en as fais, mais je m’en tape. Tu me le retrouves pour dans 168 heures, ou sinon on expérimentera les méthodes de monsieur Cash. Je suis clair ?
- Ou…oui…
- Bien. Dégage. »
Ryan fit un petit signe de remerciement et commença à courir droit devant lui, simplement heureux de s’en sortir pour sept jours encore…
« Tu vas le laisser partir alors qu’il a gardé le fric pour sa maîtresse, Red ? Pourtant Sue nous a bien dit qu’elle l’avait suivit et avait tout vu…tu nous fais plus confiance ?
- Ne t’en fais pas, Johnny : vous êtes toujours ceux en qui j’ai le plus confiance, mais j’aime bien faire mariner les pigeons…
- Mariner ?
- Oui, chérie… »
Red Richards se tourna vers la jeune fille à ses côtés et déposa un doux baiser sur ses lèvres.
« Regarde. »
Il lui fit un clin d’œil et s’accroupit, en mettant sa main dans un trou du ponton en bois. Les trois autres comprirent alors ce que voulait faire leur camarade et sourirent, tandis que Red fermait les yeux, semblant se concentrer.
Ryan courrait toujours, il voyait au loin sa voiture. Dans quelques instants, il serait dedans et donc à l’abri. Il allait foncer chez lui, appeler sa prostituée favorite pour prendre du bon temps et commencer sa semaine de recherches d’argent. Cela allait être très dur, mais il était sûr de réussir. Oh oui. Son patron allait être fier de lui et tout irait bien…
Mais rien de cela n’allait arriver. Alors qu’il arrivait à son véhicule, Mitchell sentit que quelque chose bougeait sous lui. Il ralentit l’allure, et soudain quelque chose sortit devant lui, une sorte de gros tuyau de couleur beige ou couleur…peau…de la peau ?! C’était de la peau ?! Mais c’était impossible, rien au monde n’avait une peau humaine aussi longue…
La chose redescendit vers Ryan et attrapa son cou avec…des doigts ?! Oui, c’était bel et bien des doigts humains qui commençaient lentement à l’étrangler, usant de toute leur force pour écraser la gorge de Mitchell, qui entendit après quelques moments des rires : c’étaient son chef et ses gardes du corps…
« Et oui, Ryan, je t’ai menti : j’utilise les méthodes de monsieur Cash…et tu sais quoi ? »
Red sourit dans l’obscurité en s’approchant de Mitchell, la main droite étendue vers l’arrière, là où se trouvait le trou où il avait commencé à utiliser son pouvoir.
« Je suis encore pire que lui… »
On entendit alors un sinistre craquement quand la nuque de Ryan craqua sous la force du bras de Red, qui avait tenté de l’étrangler en même temps qu’essayer de lui casser la nuque.
Le corps de l’homme de main de Richards tomba lourdement à terre tandis que Red faisait ramener sa main vers sa position normale. Il se tourna ensuite vers Johnny.
« Johnny ?
- Oui ?
- Fais disparaître le corps, veux-tu ?
- Bien sûr. Et après ?
- Après ? »
Red sourit tandis qu’il mettait la main aux fesses de Sue qui gloussa en posant sa main sur l’entrejambe de Richards.
« Après, on va montrer à New York qu’on ait de retour de notre petit tour d’Amérique, et on va aussi montrer à cette ville et à ses criminels que désormais, ce sont nous qui commandons… »
Le jeune homme explosa de rire avant de laisser Johnny Rainbow s’occuper du corps tandis qu’il partait avec Sue et Ben Grimm, dont les pas faisaient trembler le ponton et les différents objets présents aux alentours.
La même nuit. La même ville. Mais pas le même endroit ni la même atmosphère. Durant les heures sombres de la guerre Froide, lorsque les américains et les russes étaient proches d’armer la bombe nucléaire contre les autres, les riches américains avaient peurs, comme avaient peurs les pauvres américains. Seulement, là où les pauvres n’avaient que leurs prières pour se protéger du courroux atomique, les riches eux avaient l’argent pour se construire des forteresses qui pourraient normalement les sauver.
Grâce à cela, plusieurs dizaines de bunkers furent construits un peu partout dans le pays. Appelés abris anti-atomiques, ces grandes structures souterraines furent abandonnées sans jamais avoir été utilisée quand la guerre Froide se calma. Depuis, la plupart servent de musées ou d’entrepôts pour l’armée. Mais certains restent encore inconnus du gouvernement, et c’est là que va le petit être qui court dans les égouts de New York.
Joshua a 11 ans. Il venait juste d’avoir le droit de sortir du Grand Refuge avec son papa et sa main, mais il était trop impatient. Il était sortit pour la première fois il y a quelques instants tout seul, comme un grand. Il savait qu’il n’avait pas le droit, mais il avait trop envie de voir de ses propres yeux le monde dont on lui a tant parlé. Il voulait savoir si le monde extérieur était aussi horrible, aussi froid, aussi injuste qu’on le lui disait.
Joshua, qu’on appelait Josh, a vu. Il a vu le regard moqueur, indigné et dégoûté des gens devant sa laideur, sa laideur qu’il ne peut contrôler. Il a essayé de leur dire que ce n’était pas de sa faute, qu’il était gentil, qu’il ne leur voulait pas de mal, mais ils n’ont pas écoutés…les femmes criaient, pleuraient presque, elles voulaient partir, elles ne voulaient pas voir Josh…les hommes eux criaient aussi, mais eux c’était différent, c’était agressif, dur, méchant…ils disaient à Joshua de partir, de fuir, de déguerpir…
Josh ne comprenait pas ce que cela voulait dire, et il était resté jusqu’à ce que d’étranges hommes vêtus d’habits bleus avec des casquettes ne viennent et ne commencent à frapper l’enfant.
Après plusieurs coups méchants et violents, il avait réussi à s’enfuir, à retourner dans les égouts…mais les méchants hommes l’avaient suivis, criaient « au monstre, au monstre » ou « tuez-le, tuez-le, il veut tuer nos enfants » et aussi « mutos ! mutos ! »…des mots que le petit garçon ne comprenait pas…
Joshua avait réussit à beaucoup courir sans être fatigué, grâce à la peur que lui donnaient les méchants hommes, mais là ses forces partaient…il les sentait de plus en plus proches, et lui sentait aussi que le Grand Refuge, là où sa famille et les autres vivaient heureux dans la tolérance et la joie, était bien loin…il aurait voulu appeler son papa et sa maman à l’aide, mais ils ne viendraient pas, ils étaient trop loin et trop occupés à le chercher dans tout l’abri anti-atomique…il aurait voulu revenir en arrière, ne pas sortir sans son papa et sa maman, mais c’était impossible…
Soudain, alors qu’il était plongé dans ses pensées, Joshua ne vit pas un déchet devant lui et tomba dans l’eau sale et froide des égouts. Son nez était en sang et lui faisait mal, et le petit enfant n’arrivait pas bien à se relever…et les méchants hommes arrivaient, il les entendait…ils criaient encore « mutos ! mutos ! » mais Josh n’était pas un mutos…il n’était pas vraiment humain, mais il n’était pas un mutant…
Alors que les hommes le frappaient jusqu’au sang, ce qui allait causer la douloureuse mort du petit garçon, Joshua voulut leur dire qu’ils se trompaient, mais ses dents avaient déjà été cassées et il commençait à s’étouffer avec…il aurait voulu leur dire qu’il n’était qu’un petit garçon pas méchant, juste trop curieux…il aurait voulu leur dire qu’il n’était qu’un simple rejeté de la surface, qu’un simple Inhumain trop loin de chez lui…