Auteur : Ben Wawe
Date de parution : Décembre 2008

"Tu n'avais aucune chance, Barry."

Sue Tempest était debout, devant la silhouette immobile de celui qu'on surnommait Flash. Il tremblait de rage alors que les cris de Jack lui venaient aux oreilles. Elle souriait.

"Je sais, ça doit faire mal de sentir que tous ces efforts, que tous ces combats n'ont servi à rien...mais je suis aussi passée par là. Vous avez eu votre chance avec le monde ; maintenant c'est notre tour."

Elle claqua des doigts et il sentit sa gorge se serrer - au sens propre. Il ne savait pas bien comment fonctionnaient ses pouvoirs mais il pouvait sentir que la jeune femme tentait de le mettre à mort en "appuyant" sur sa gorge pour l'empêcher de respirer. Sous peu, il n'aurait plus d'air dans les poumons, comme Jack, ce type qui avait essayé de lui porter secours.
Autour d'eux, la désolation régnait et l'homme encapuchonné avait déjà disparu. Il n'avait fait que montrer son horrible face et annoncer l'horreur à venir, puis s'en était allé. L'énorme chose de pierre était assise et observait en silence Sue faire, Steelman allongé sur le sol, tandis que l'homme de flammes était parti, sûrement commettre d'autres atrocités. Il aurait dû arrêter ça : il était un "surhumain", un héros. Malheureusement, Barry se rendait compte que les héros, malgré leurs pouvoirs, meurent comme les autres.

Vainement, il tenta d'attraper la jeune femme mais la douleur le paralysait et son acte ne fit qu'accentuer l'action de son adversaire. Elle émit un petit rire empli d'arrogance et il lui lança un regard noir. Il sentait déjà sa conscience faiblir et la panique le gagner, mais il devait rester calme. S'il se laissait emporter, il n'avait aucune chance de s'en tirer - même s'il se demandait si ça changerait quelque chose.

Seul, blessé, perdu au milieu d'un champ de ruines, quel espoir pouvait-il avoir ? Même s'il avait toujours tenté d'être positif et d'aller de l'avant, même après sa blessure et dans la Ligue, Barry sentait bien qu'il n'y arriverait pas, là. L'air disparaissait dans ses poumons, son crâne risquait d'exploser sous la pression de son corps recherchant de l'oxygène et sa vue se brouillait déjà. Comment pouvait-il se tirer de là ? Sa mère se rendrait compte de ce qu'il avait été et elle ne pourrait même pas lui dire qu'elle était fière. Il s'était comporté comme un imbécile et allait y passer. Les secondes passaient, lentes et terribles, et il ne voyait aucune solution. Il n'était pas magicien comme Tim, il ne pouvait...

"Ah !"

Soudainement, la pression sur sa gorge disparut. Il ouvrit en grand sa bouche qui put enfin inspirer de l'air qui passa dans son corps en direction de ses pouvoirs, comme un courant salvateur et miraculeux. La première bouffée fut la meilleure, la plus savoureuse et surtout la plus bénéfique. Jamais il n'avait eu l'impression d'aimer autant respirer : comme tout le monde, il n'y faisait pas attention et ne s'en souciait pas ; après cette expérience où, dès qu'il tentait d'avaler ce précieux oxygène, son propre corps était empêché, il prendrait chaque bouffée comme un cadeau. Il allait aimer respirer, comme jamais.
Mais avant, il avait quelque chose à régler.

"Qui m'a fait ça ?!"

La voix de Sue était pleine de rage et de rancoeur. La chose de pierre s'était levée, Barry l'avait entendu au prix de sa masse quittant le sol et s'élevant au prix d'un effort monstrueux. Sa vision était toujours traversée de lumières et il avait si mal au crâne qu'il risquait encore de s'évanouir, mais ça ne l'empêcha pas de voir que la jeune femme saignait au niveau du visage. Apparemment, quelque chose l'avait frappée sous les yeux et sur le nez de manière rectiligne, et toute sa face était désormais recouverte de rouge - on saigne toujours beaucoup de la tête. Il ne put s'empêcher d'en sourire.

"Qui m'a fait ça, bordel de merde ?!
- Moi."

Allen connaissait cette voix. C'était celle de l'espoir ; c'était celle de Tim.

"Hunter."

Sa rage était claire : elle ne supportait pas d'avoir été blessée. Tim tenait dans ses mains deux cartes de jeu, le valet et le joker. Barry ne savait pas qu'il avait ça sur lui mais ce type donnait l'impression d'avoir tous les artefacts du monde dans ses poches. Il le trouvait toujours terriblement arrogant et le considérait encore comme coupable de ce qu'il s'était passé en Louisiane, mais le voir arriver à temps lui faisait...plaisir. Ca le rassurait, même s'il refusait de l'admettre.

"Ben, tue-le."

La chose de pierre poussa un hurlement de rage, comme si ce n'était qu'une bête destinée à suivre les ordres de sa "maîtresse". Barry ne savait pas grand-chose de ce qu'il avait été ou était vraiment, mais il avait pitié de ce qu'il était devenu. John leur avait un jour parlé de la bande à Richards : ils étaient censés être des petites frappes mais qui avaient décidé de passer à un niveau supérieur.
Pour Jones, ça voulait dire contrôler New York à la place de Luthor ou tenter de mettre la main sur quelques vieilles planques des Architectes. Attaquer la future présidente des Etats-Unis, ça faisait gros...surtout qu'ils étaient censés avoir disparu pendant un bout de temps. Qu'ils s'en prennent à celle qui voulait contrôler les surhumains n'était pas illogique, mais pourquoi maintenant ? Pourquoi avant sa prise en fonction ? Il aurait suffi de maquiller sa mort plus tard en accident ou comme avec Oswald...une telle action, auss brutale, n'avait pas de sens. Ca n'allait que mener à plus de rigueur envers les surhumains en répression...ça donnait raison à Ste-Croix.

"Tu veux m'envoyer ta bestiole ? Alors que j'ai déjà réussi à stopper ton frère avant ?
- John n'est pas mon frère.
- Tu es sûre ?"

Tim avait son sourire arrogant sous sa barbe et Allen ne le supportait pas. Il ne comprenait pas vraiment ce qu'ils se disaient mais il s'en fichait, en fait. Sa jambe avait déjà cicatrisée et lui faisait un mal de chien, mais heureusement son étourdissement commençait lui aussi à partir. Un simple regard lui suffit pour voir que Jack avait aussi été libéré de la prison créée par Sue, mais il était évanoui.

"Fais-le souffrir avant."

La chose se jeta sur Tim mais celui-ci se tourna vers elle et évita son coup en sautant sur le côté. Sitôt fait, il se mis à monter sur le bras de l'être de pierre comme si ça n'avait qu'une rampe normale et il envoya violemment sa carte vers le nez de son adversaire. Jamais Barry ne l'aurait cru aussi agile, surtout avec sa dégaine de clochard.
La carte vint s'incruster dans les bouts de pierre et y resta coincée. Le monstre essaya de l'enlever, visiblement gêné, alors qu'Hunter sautait et se posait calmement au sol. Il fit un petit sourire à Allen juste au moment où la carte, le valet, explosait au visage de la chose de pierre ! Celle-ci fut autant surprise que les personnes présentes, vacilla quelque peu avant de s'écrouler, sa face encore fumante de l'explosion.

"Qu'est-ce que tu lui as fait ?!"

La colère et l'indignation se mêlaient dans la voix de Sue. Elle serra ses poings, rassemblant sûrement sa puissance mais Tim lui envoya sa dernière carte, qui vint se planter juste dans le ventre de la jeune femme. Elle poussa à nouveau un cri de douleur et plaça ses mains sur sa blessure, visiblement à nouveau empêchée d'user de ses capacités - comme si la souffrance les anesthésiait. C'était totalement bénéfique pour eux, finalement.

"C'est Rémy qui serait fier de moi."

Lentement, le sorcier se releva, enleva la poussière de ses habits et s'approcha de Barry. Celui-ci se rendit alors compte qu'il ne savait pas si Steelman était vivant ou mort. Sa propre douleur et son étourdissement passèrent au second plan : il devait savoir si son collègue et peut-être même ami allait bien. Il était le seul avec qui il s'entendait bien dans la Ligue, il ne supporterait pas une telle perte.

"Va voir si James va..."

Mais Allen ne put aller au bout de sa phrase.
Alors que Tempest était accroupie sur le sol, perdant son sang et essayant de stopper l'hémorragie, alors que l'être de pierre était vaincu, le jeune homme vit Tim être propulsé en avant par une immense gerbe de feu, brûlant au passage sa veste et l'arrière de ses vêtements. Il poussa un cri de douleur alors qu'il tombait lourdement derrière Barry, et celui-ci vit avec horreur l'homme de feu se tenir près de lui...et il était accompagné.

"Seigneur.
- Tu peux m'appeler Johnny."

Même sous les flammes, Allen pouvait voir le sourire arrogant de son adversaire. A ses côtés se trouvait une sorte de...bête, tout simplement. Pire que les Lézards. Pire encore que la chose de pierre. C'était un monstre, de couleur noirâtre, de deux ou trois mètres de haut, tout en muscle. Il avait l'air d'être humain, mais avait tellement évolué, avait vu son corps être tellement modifié que seule la forme humanoïde persistait. Il était une horreur, incarnation vivante de ce qui peuplait les cauchemars des enfants.
Une nouvelle fois, Barry trembla : il savait qu'il ne pourrait rien faire contre eux.

"Je pensais que Victor vous avait échappé. Il se fatigue, avec l'âge.
- Il va t'entendre."

La voix du monstre était terrible à entendre : tellement inhumaine, tellement éloignée du naturel...il n'était pas un fruit de la Nature. Allen ne savait pas d'où il venait, mais il était clair qu'il était une Abomination créée par l'Homme.

"Et alors ? On fait le boulot, c'est tout. Je vais cautériser la plaie de Sue, occupes-toi de ces guignols.
- Je les tue ?
- Nan, Joey, nan...Victor voudrait pas. On emmène le gamin et le clodo, et c'est tout. J’me demande bien pourquoi mais bon…c’est lui qui décide. Avec les autres…quelle bande de gros nazes, vraiment. On dirait les Architectes et en plus pathétiques. Nuls.
- Et Steelman ? Je peux le tuer ?"

Barry était pétrifié par ce dialogue monstrueux. L'horreur humanoïde avait des relents de sadisme dans sa voix...comme s'il avait déjà massacré des êtres vivants et qu'il y avait pris goût. Le jeune homme avait toujours cru au Bien et au Mal, même s'il savait qu'il y avait des choses plus "grises" ; ici, ce n'était pas le cas : cet être, c'était le Mal. Il ne pouvait y avoir d'autre définition, tout puait le vice et la cruauté en lui.

"Na, paraît qu'il faut que quelqu'un parle de s'qu'on a fait...c'est stupide mais c'est pas moi le boss ! Envoie-le quelque part, on s'en fout..."

La bête - car il ne pouvait d'y avoir d'autre définition pour ça - pris le corps encore inanimé de Steelman et se mit à rire comme jamais Barry n'avait entendu quelqu'un le faire. Tétanisé, il ne put que voir son ami être envoyé au loin par la créature, alors que l'homme de flammes "soignait" sa collègue.
Tim était vaincu et sûrement blessé. Steelman était hors-jeu. L'Ombre était porté disparu. Donna était incapacitée et trop loin. Batman était mort. Hal avait quitté l'équipe. John lui-même était hors de l'échiquier, apparemment à cause de ces gens. Il était le dernier membre de la Ligue, et lui-même ne pouvait rien faire.
La Ligue avait failli : elle était morte au moment même où le monde avait besoin d'elle. Et rien ne semblait pouvoir être fait pour arrêter les responsables.




"Hal, la situation empire à Washington...
- Qu'est-ce que tu veux que j'y fasse ?
- Va là-bas. Interviens. Sois un membre de cette foutue Ligue.
- Je n'en suis plus membre. Je m'occupe du Corps.
- Le Corps avant la Ligue ?
- Le Corps avant tout."

Au-dessus des nuages et de l'Egypte, la salle de commandement de l'énorme vaisseau du Corps. Hal Jordan et Thomas Blake essayaient de prévoir une stratégie et de minimiser leurs pertes. Vu les dernières statistiques, ça ne fonctionnait pas bien.

"On a nos propres soucis.
- Sinestro est peut-être mêlé à tout ça...
- Mêlé au destin des Etats-Unis ? Je ne pense pas. Sinestro a été créé pour être une sorte d'anti-corps pour empêcher Parallax de se réveiller, mais il a...
- Disjoncté ?
- Perdu de vue sa mission principale. Il veut désormais tous nous détruire.
- Il veut détruire le Corps parce qu'il a été créé pour ça.
- Oui, mais ce n'est pas parce que mes supérieurs l'ont chargé d'une mission que je vais le laisser faire.
- Ils en pensent quoi ?
- J'évite de leur parler.
- Pourquoi ?
- Tu crois que c'est simple de discuter avec des aliens qui pensent que tu n'es qu'un gros naze ? Même s'ils sont surpris que j'ai réussi à vaincre Parallax, ils pensent que je ne suis qu'un Terrien incapable.
- Vive les rapports entre races.
- Mouais...si on veut. Tout ce que je sais, c'est que Sinestro est de retour et que ses troupes ne cessent d'augmenter alors que les nôtres diminuent !
- Normal : il utilise des sortes de zombies et récupère nos Lanterns tombés.
- Ne. Dis. Pas. Ca."

Hal lança un regard noir vers son vieil ami, coincé dans son armure d'énergie verte. Depuis le début, ils se serraient les coudes mais Jordan avait du mal à accepter certaines réalités. Quand Peter Quill lui avait dis que Sinestro était de retour, il avait eu l'impression de revivre certains cauchemars. Tout ce qu'il voulait maintenant, c'était se réveiller - mais l'histoire ne semblait pas encore totalement finie. Malheureusement.

"Qu'est-ce que tu veux, alors ? Que j'oublie que certains de nos hommes sont tués et récupérés par Sinestro ? Qu'il les modifie pour en faire ses propres troupes ? Nous menons une guerre que nous ne gagnons pas, Hal. Nous frappons, nous tuons même, mais nous reculons.
- Et tu voudrais alors que j'aille aider la Ligue ? Dans cette situation ?
- Nous sommes des Lanterns, Hal. Peut-être avons-nous besoin d'aide.
- Je ne vois pas comment la Ligue peut nous aider...elle n'a jamais fait ses preuves. Elle a été bâtie sur un mensonge.
- Elle a stoppé les troupes d'Osborn.
- Wayne était là alors.
- Un homme seul fait-il la différence ?
- Parfois oui.
- Qu'est-ce que ça te coûte d'essayer ? Vu la situation, tu n'as rien à perdre. En plus, ça mettra Kent en confiance de revoir la Ligue : même s'il n'a pas passé beaucoup de temps avec eux, ça lui fera peut-être du bien. Il est toujours très renfermé et timide, tu sais. Nos spécialistes ne comprennent pas pourquoi, d'ailleurs : ça ne cadre pas avec ses précédentes sorties."

Jordan soupira : il détestait quand Blake avait raison. Il devrait aller voir les autres, régler la situation et leur demander de l'aide - c'était la seule solution et une de ses seules chances. C'était ça ou appeler le Nova Corps...et mieux valait ça. Peut-être que la vitesse d'Allen ou le sens tactique de Troy pourraient l'aider...peut-être que les "sorts" d'Hunter lui feraient voir les choses autrement...peut-être oui. Ca voulait dire ravaler sa fierté, et c'était dur, mais le Corps méritait le meilleur.
Il avait tout sacrifié pour lui et il était prêt à faire encore plus. Le monde avait besoin du Corps, il le savait. Il vivait sa première crise et il ferait tout pour lui permettre d'en vivre d'autres. Quitte à reparler à John Jones, l'homme en qui il avait tant confiance et qui l'a trahi. L'homme avec qui il partageait sa peine. Le père de son Emy.

"Hal...il se passe quelque chose."

Perdu dans ses pensées, il n'avait pas remarqué que Thomas avait reçu une transmission à l'intérieur de son armure. Il était toujours relié au centre d'informations du vaisseau, qui traitait toutes les nouvelles du monde entier en temps réel. Il n'aimait pas la tête de son ami : quelque chose de grave se produisait. De très grave.

"Quoi ?
- Washington est toujours attaqué, on ne sait pas ce qu'il se passe mais le Gouvernement Américain a affirmé que des surhumains sont impliqués.
- Et alors ? Ca devait se savoir, de toute façon.
- Le Président a décrété l'état d'urgence et envisage de passer à la loi martiale.
- Quoi ?!
- Le pays est sous contrôle militaire ou va y passer sous peu...mais ça n'est pas tout. Il fait en ce moment un discours anti-surhumains et les accuse d'être responsables. Il...il les diabolise, en fait. Et il vient...oh mon dieu.
- Quoi ?! Qu'est-ce qu'il dit ?
- J'ai les informations à la seconde, excuse-moi. Bush vient d'annoncer que les surhumains sont responsables et les décrète hors-la-loi et autorise chaque situation à appréhender chaque pseudo justicier ou pseudo surhumain. Nous sommes désormais considérés comme illégaux...et être un surhumain est criminel."