Urban Comics
  La Ligue #2
 
Auteur : Ben Wawe
Date de parution : Août 2007

Bonjour, monsieur Wayne.

« Sortez de ma tête. »

Bruce était seul. Dans une voiture garée non loin du quartier des affaires de Manhattan. Les portières étaient fermées, la clef cachée dans le coffre, ainsi que son costume et ses différents accessoires. Il était assit à la place arrière de son véhicule, les poings et la mâchoire serré. Il n’était pas à l’aise.

Une heure plus tôt, alors qu’il était à une convention de chirurgiens, il avait été agressé. Mentalement. Il était venu à New York pour se changer les idées après les terribles événements de ces dernières semaines, et tandis qu’il avait espéré avoir du bon temps ici pour pouvoir se retrouver et reprendre des forces, quelqu’un était venu…quelqu’un était venu dans son esprit.

Evidemment, il ne savait pas qui ou pourquoi, et il avait du mal à croire ça possible…après tout, il était médecin, plus scientifique que mystique. Ok, les Mutants et personnes à pouvoirs existaient, mais il n’en avait jamais rencontré…ou du moins, il n’avait jamais su qu’ils avaient de telles capacités.
Et donc, sentir son esprit être violé de la sorte, sentir son âme être mise à nue par un étranger n’avait pas été quelque chose de plaisant. Et il avait agit en conséquence.

Sachant bien qu’un être capable de lire dans les pensées pourrait très certainement le contrôler, il avait décidé de ne pas être un danger pour New York. Il savait ce qu’il pouvait faire quand il n’était pas lui-même, il savait qu’il était un des hommes les plus forts en techniques de combat de la planète, et il devait donc tout faire pour éviter que la population de la ville soit attaquée…soit attaquée par lui.

Je ne suis pas votre ennemi, monsieur Wayne.

« Sortez de ma tête. Et laissez-moi en paix. »

Le médecin serrait les poings. Pour une des rares fois de sa vie, il était prit au piège et ne savait pas quoi faire pour s’en sortir. Quelqu’un était en train de le dominer, et il n’avait aucun moyen pour l’arrêter ou le mettre hors d’état de nuire. Il était son inférieur, et il n’avait aucune possibilité pour renverser la vapeur.
Et ça, il ne le supportait pas. Et ça ne faisait qu’accentuer sa colère et son dégoût.

Je sais ce que vous ressentez, Bruce. Je sais que vous voyez ça comme un viol de votre esprit et de vos souvenirs. Je comprends. Ce n’est pas cela, mais je comprends. Je ne viens pas en ennemi, Bruce. Je viens en ami.

« Je n’ai pas d’amis qui violent mes pensées. Et appelez-moi monsieur Wayne. Ca m’allait très bien. »

Malgré sa colère et sa peur légitime, le chirurgien arrivait quand même à garder une certaine force et une certaine détermination. L’être qui était en train de lire son esprit était certes fort, mais il était le Batman…et jamais il n’abandonnerait une bataille sans la mener. Jamais il ne se laisserait vaincre sans combattre. Surtout pas quand ça concernait son corps, son esprit et sa façon de les gérer.

J’ai besoin de vous, monsieur Wayne. J’ai besoin du Batman.

« Je suppose que je ne dois pas m’étonner du fait que vous connaissiez mon alter ego, vu vos pouvoirs apparents. Mais si vous aviez besoin d’aide, vous auriez pu me parler en vrai, non ? Je n’aime pas vos façons de faire…et je n’ai pas envie de vous aider. »

Wayne soupira lourdement. Il savait qu’il ne dominait pas la situation, mais il ne pouvait se laisser faire. Il tenait trop à son self control, il tenait trop à la domination de soi-même après les événements de ces dernières semaines pour ça. Il n’avait plus été lui-même, et le résultat en avait été monstrueux.
Et ça, il ne pouvait accepter que ça revienne. Il ne pouvait accepter qu’on le domine à nouveau. Et il était prêt à se battre pour empêcher cette horreur. De toutes ses forces.

Je sais que tout cela ne va pas vous plaire, mais je dois me passer de discours. Désolé de vous imposer ça, mais je n’ai guère le temps. Et vous devez savoir ce qu’il se passe dans cette ville, monsieur Wayne…

Soudain, les images de Lex Luthor, Norman Osborn, du conseil secret qui avait fait une vendetta contre les justiciers arrivèrent dans l’esprit du Batman. On était en train de lui implanter directement tout l’historique de ces derniers jours et ce qui se produisait à ce moment-là à quelques pâtés de maison de là, et un immense cri s’éleva de sa gorge tandis que la douleur était insoutenable, et qu’il commençait lentement à comprendre dans quelle horreur il était désormais plongé…






« Mais qu’est-ce que c’est que ce bordel ?! »

Hyperion n’y comprenait rien.
Normalement, cette mission aurait dû être extrêmement simple. A la tête d’une horde de criminels endurcis et pour la majorité surhumains, il devait fondre sur un immeuble du centre de Manhattan, mettre hors d’état de nuire les différentes forces en présence et atomiser le bâtiment avec ses occupants. Point.

Normalement, ça aurait dû être extrêmement simple. Mais ça ne l’était pas.

Tout d’abord, une femme totalement folle et vêtue étrangement était venue et leur avait foncé dessus, alors que Pietro avait fait le tour du quartier. Ca voulait donc dire qu’elle s’était bien cachée dans les différents bâtiments à moitié détruits autour d’eux…et donc qu’elle était plus maligne et dangereuse qu’ils ne l’avaient tous pensés au départ.
Ils avaient faits d’ailleurs une erreur en la sous-estimant, et l’état de Nefasth, à moitié mort sur le sol avec le torse en train de flamber, montrait bien cela. Elle était forte. Très forte.

Néanmoins, Hyperion avait été sûr que la vitesse du gamin aux cheveux blancs réussirait là où Nefasth avait failli. Mais alors que le gosse filait extrêmement rapidement vers elle, prêt à la réduire en bouillie simplement parce qu’elle avait osée se mettre devant eux…il avait été stoppé. Littéralement.

Arrêté en pleine course par une traînée rougeâtre et envoyé extrêmement violemment contre un mur, il avait subit un choc horrible, et le bruit avait été monstrueux. Même lui en avait été impressionné, alors qu’il avait les yeux fixés sur l’énorme nuage de fumée qui s’échappait lentement du cratère formé sur le sol devant le bâtiment où Pietro avait été catapulté.

« Mais qu’est-ce que… »

Une forme émergea quelques secondes plus tard, et cela intensifia leurs interrogations. C’était un homme d’une taille moyenne, et costumé. Celui-ci était bordeaux et recouvrait tout son corps, sauf ses yeux et le bas de son visage. Ses gants et ses bottes étaient en cuir argenté, chose étrange quand même, et sa ceinture était sombre.
Et il n’avait rien : pas une blessure, pas une séquelle. Rien. Et il les fixait. Méchamment.

« Je suis Flash. Rendez-vous. »

Sa voix était celle d’un adolescent, mais sa détermination était clairement visible. Craquant légèrement ses phalanges en observant les quatre criminels restants, il eut un petit sourire étrange avant de reprendre la parole, les yeux toujours fixés sur eux, tandis qu’aucun ne bougeait, figé par cette apparition mystérieuse…et dangereuse.

« Vous avez dix secondes. Et dépêchez-vous, je ne suis pas patient. »

Hyperion ne comprenait rien.
Il ne connaissait pas du tout cet homme, et aucune personne dans son monde ne disait s’appeler Flash. Ca n’avait aucun sens. Cet être avait une vitesse au moins équivalente à celle de Pietro, et il l’avait littéralement fracassé contre un mur. Personne ne pouvait encore voir son corps, mais tous étaient sûrs qu’il avait morflé…et peut-être trop pour s’en remettre.

En clair, l’homme devant eux, ce Flash, était puissant et dangereux. Comme la femme qu’il avait défendu. Et donc, ils avaient deux gros problèmes…deux très gros problèmes à gérer. Et vite.

« Merde…qu’est-ce qu’on fait ?
- Appelle Osborn.
- Quoi ? »

La voix froide et neutre du Dark Lantern s’était faite entendre, et, peu habitué, l’homme brun venu d’un autre monde s’était tourné vers lui. Celui-ci s’élevait lentement dans les airs à ce moment-là, rassemblant de la puissance dans ce qui semblait être ses mains, même si personne ne pouvait savoir où était quoi, vu son aspect brumeux et sombre.

« Il est notre chef, avec Luthor. Mieux vaut savoir ce qu’ils veulent que nous fassions.
- On peut régler ça nous-mêmes, non ?
- Ecoute-le, imbécile. Tu as déjà failli mettre à l’eau la mission par ton arrivée. Ne fais pas la même erreur en voulant être le héros du jour. »

Silence avait parlé lui aussi d’un ton très dur et sec. Les bras croisés, il observait l’homme qui venait d’arriver et la femme. Apparemment, ils étaient alliés, ou au moins, le premier ne voulait pas que la seconde ne meure. Et il était puissant. Assez pour facilement vaincre la moitié de ce qui restait de leur équipe en quelques secondes à peine.

« Hum. »

Les secondes s’écoulaient lentement tandis que l’homme aux bandelettes analysait la situation. Un être aussi rapide et plus résistant venait d’apparaître, et deux de leurs hommes étaient vaincus. Déjà. Hydroman n’avait aucune expérience, et le Dark Lantern avait des réactions trop étranges pour être sûr de ce qu’il pouvait ou allait faire.
Et Hyperion…Hyperion était Hyperion. Stupide et bête, comme d’habitude.

En clair, leurs chances face à ce bolide et à son alliée pleine de surprise, à l’heure actuelle, étaient très pauvres, malgré ce qu’on pouvait voir et croire en les observant à ce moment-là. Il devait donc faire quelque chose pour changer ça…il tenait trop à ses informations pour laisser leurs adversaires tout foutre à l’eau.
Il en avait trop besoin, oui. Et il n’aimait pas perdre. Surtout pas face à une femme et à un gosse.

« Je m’occupe de ça. »

Silence dégaina ses armes à feu, qu’il avait cachées dans son imperméable. Sa paire de flingues ne le quittait jamais, et il allait bien en avoir besoin à ce moment-là, pour ce qu’il comptait faire.

« Crève. »

Il visa d’abord le nouvel arrivant, qui sourit légèrement en voyant une arme pointée sur lui, avant de changer de cible et de s’arrêter sur la jeune femme. Celle-ci, restée interdite pendant quelques secondes avant de se reprendre étrangement et de se placer près de Flash, ouvrit en grand ses yeux quand elle vit que c’était elle qui était désormais en danger…que c’était elle qui risquait maintenant de mourir.

La balle partit à ce moment-là de son flingue droit, filant à toute vitesse vers la jeune femme. Figée par l’événement, elle ne bougea pas tandis que le petit objet cylindrique partait vers sa jolie tête, prêt à la faire exploser et à lui ôter définitivement la vie…sauf que Flash n’était pas d’accord avec ça.

Démarrant dès qu’il avait vu que Silence changeait de cible, l’homme courrait extrêmement vite vers son alliée, arrivant à devenir simplement une forme floue dans l’air. Pour lui, le temps devait certainement s’écouler moins vite que pour les humains normaux, et il pourrait donc très facilement sauver sa « coéquipière » et régler après son compte à son agresseur…mais celui-ci non plus n’était pas d’accord avec ce plan.

« Hé, hé… »

Alors que Flash était presque sur la balle, Silence tira à nouveau…mais aux pieds de la jeune femme. Et quand l’homme qui voulait la sauver arriva pour enlever sa camarade du champ de tir, ce fut lui qui se prit la balle…ce fut lui qui fut blessé au mollet gauche.

« Argh ! »

Un cri de douleur vif mais brutal s’échappa de sa gorge tandis qu’il tombait violemment au sol et que la première balle allait s’encastrer contre le mur derrière lui. La jeune femme, elle, avait été poussée par son nouvel allié, et arrivait à rester sur ses pieds, mais avec grande difficulté.
Immédiatement, elle leva les yeux pour savoir ce qu’il s’était passé et qui venait de crier ainsi, et ses yeux s’ouvrirent en grand quand elle aperçut l’état de Flash.

Celui-ci, prostré sur la terre ferme, avait le mollet en sang et semblait souffrir le martyr. La balle l’avait transpercé de part en part, et beaucoup de liquide rouge se déversait déjà sur le sol, tandis qu’il serrait les dents pour tenir, mais ça se voyait qu’il ne réussirait pas à rester ainsi très longtemps.

« Oh…C’est… »

Elle semblait ne pas croire en les yeux, tandis que son sauveur tentait de ramper sur le sol pour aller à couvert, et que Hyperion commençait à…à rire sadiquement. Ses éclats vicieux et mauvais s’élevaient lentement de sa cage thoracique, tandis que Silence relevait ses armes fumantes et que tous les autres, après quelques instants pour comprendre ce qu’il s’était passé, riaient aussi de ce qui venait d’arriver.

Flash était blessé. La jeune femme était seule. Ils étaient quatre contre elle. Pas besoin d’appeler Luthor ou Osborn. Ils allaient s’occuper d’elle…Ils pouvaient bien s’accorder ce petit plaisir avant d’aller suivre les ordres de leurs patrons…


« Mon dieu…Mais c’est horrible…
- Hum. »

James n’en croyait pas ses yeux. Lui qui avait vu avec plaisir et soulagement l’arrivée de Flash, un homme recruté par John Jones selon ses propres dires, il observait maintenant avec toute l’horreur que la scène apportait le héros être blessé, et être menacé par les quatre criminels restants.

« Il faut que j’y aille…
- Non.
- Mais…mais ils ont besoin d’être sauvés !
- Oui.
- Alors je dois y aller.
- Non. Pas toi.
- Pas moi ? »

Baxton fronça les sourcils. Ce jeu des devinettes le lassait de plus en plus, et il sentait lentement la colère monter en lui tandis qu’il observait l’homme à ses côtés. Cet être ne lui plaisait pas. Il ne savait rien de lui, ou presque, et il ne savait pas si il devait lui faire confiance.

Tous ses actes puaient la tromperie et la manipulation. Il envoyait des héros se faire abattre contre des enflures de la pire espèce, et il refusait que lui s’en mêle…lui ! Il était quand même un des êtres les plus puissants qui existaient, non ? Il était Steelman, non ? C’était bien pour ça qu’il était là, non ? Pour aider à stopper ces enfoirés ?

Alors pourquoi ne pouvait-il pas intervenir ? Pourquoi ne pouvait-il pas se jeter sur le champ de bataille pour affronter ces ordures ? Pourquoi devait-il attendre alors que des gens bien risquaient leurs vies à quelques mètres d’eux ?

« Parce que nous devons suivre mon plan.
- Ton plan ?!
- Oui.
- Mais ton plan ne mènera qu’à leurs morts ! Qu’à leurs assassinats ! Tu les as envoyés à la mort ! Tu les as envoyés là-bas ! Tu les sacrifies ! »

Steelman avait du mal à se contenir. Avec les éléments des dernières semaines et ses soucis de mémoire, il en avait assez bavé, et il ne pouvait accepter de voir une telle chose, une telle folie sans réagir. Bien sûr, il était reconnaissant à John Jones de vouloir stopper ces criminels, mais ses méthodes…mais ses méthodes ne lui plaisaient pas.
Elles étaient dangereuses. Et criminelles. Et il ne pouvait l’accepter.

« Tu ne sais rien, James Baxton. »

Lentement, John Jones se tourna vers lui, et il put voir une légère émotion sur son visage. Mais là où ça avait été de l’amusement auparavant, c’était désormais une colère…une colère très forte. Evidemment, elle était contenue et l’expression disparut très rapidement, mais le jeune homme comprit alors qu’il venait de faire une assez grosse erreur en disant cela.

« Tu ne sais pas tout ce que j’ai sacrifié pour construire ce plan…pour réussir à vous amener tous ici aujourd’hui. J’ai sacrifié plus que tu ne sauras jamais. Ma famille, ma vie et tout ce que à quoi je tenais ont été perdus pour ça. Alors ne me traite pas d’assassin et ne me parle pas de sacrifice : tu ne sais pas ce que c’est. Et tu ne sauras jamais, je l’espère. »

Jones soupira, avant de retourner à l’étude de la situation. Les quatre criminels s’approchaient lentement de Donna Troy, avec Flash assez bien, ne pouvant plus faire grand-chose. James s’approcha lui aussi du bord et regarda aussi, ne sachant pas quoi faire…et quoi dire, surtout.

Evidemment, il s’en voulait d’avoir dit ça, mais au fond…il avait eu raison, non ? Les agissements de John étaient presque incompréhensibles, alors ça semblait normal de vouloir savoir ce qu’il avait en tête, et pourquoi il se comportait ainsi, non ? Pourquoi il laissait des héros risquer leurs vies sans aucune explication ?

« Tiens…tu voulais que quelqu’un les sauve, non ?
- Oui. »

Soudain, alors que Silence visait avec une de ses armes Donna Troy, la tenant en joue pour l’empêcher de bouger, un objet en forme de demi lune et sombre vola dans l’air et arracha le flingue des mains du criminel. Celui-ci poussa un juron avant de se tourner vers une ruelle noire à moitié détruite, d’où provenait l’objet étrange et où aucun bruit ne semblait être fait…pour l’instant.

« Ton vœu est exaucé… »






« Junior à Senior…je suis presque prêt. »

Les égouts de Manhattan.
Un endroit monstrueusement puants, monstrueusement horribles et peuplé d’étranges créatures. Des légendes urbaines parlent d’alligators. D’autres de mystérieux humains devenus plus qu’humains. D’autres d’un peuple de Mutants reclus dans les anciens tunnels pour fuir un monde qui ne pouvait les accepter. Et d’autres choses encore…d’autres choses encore plus mystérieuses.

Evidemment, personne ne croyait vraiment à ces rumeurs, colportées par quelques vieux fous ayant trop bus et espérant quelques pièces en échange d’une histoire pour touristes. Non. Personne à New York ne croit vraiment à tout ça. Mais ils changeraient certainement d’avis en voyant un adolescent aux longs cheveux noirs se déshabiller dans un de ces tunnels…et devenir autre chose.

En quelques secondes à peine, ce jeune homme qui devait faire tourner les cœurs là où il vivait et étudiait était devenu quelque chose de différent. En quelques instants, il était passé de l’étudiant normal avec chemise orangée et jeans vert foncé à un autre être…à une autre forme d’être vivant, en fait.

« Oui, la transformation s’est bien passée. Oui, j’arrive mieux à maîtriser tout ça. »

Désormais, sa peau était jaunâtre, presque crème mais avec plus de jaune malgré tout. Ses cheveux, jadis sombres comme l’ombre, avaient aussi été modifiés, et étaient désormais…verts, avec quelques nuances par ci par là, mais verts quand même, et ils retombaient toujours sur ses épaules. Celles-ci étaient encore musclées, comme tout son corps, mais lui…lui avait été aussi changé. Et pas seulement pour sa couleur.

Désormais, des dizaines d’étranges tatouages étaient apposés sur sa peau, et ce partout : le torse, le visage, les pieds, les mains…tout. Tout était recouvert de ces étranges tatouages tribaux, tandis qu’il ne portait plus désormais qu’une sorte de pantalon recouvert d’écailles, vertes vers l’intérieur et orangées sur l’extérieur. Une ceinture le maintenait à sa taille, avec un A comme boucle, même si rien de tout ça ne ressemblait à quelque chose de connu…à quelque chose de fait par l’homme normal.

« Oui, Senior…je vais faire attention. »

En fait, le jeune homme était Aquaman…Aquaman Junior, comme il aimait le dire. Et il était en train de parler au premier du nom, le Senior, celui qui avait été célèbre quelques années auparavant pour ses attaques écologistes, et qui résidait maintenant sous l’eau, dans une base secrète près de New York.
C’était sa maison, d’ailleurs. Même si il n’était pas le fils de cet Aquaman.

Lui, il était le fils de Namor, un allié du premier Aquaman, mais un être beaucoup plus violent et destructeur que lui. Il avait toujours eu un sale caractère, n’avait jamais apprécié le contact des autres même si il n’hésitait pas à le demander, ou à l’ordonner, et il n’avait donc pas beaucoup aimé l’idée d’avoir un fils. Surtout quand celui-ci avait une peau étrange et qu’il avait des pouvoirs défiants la normalité Atlante.

Oui, il était Atlante. Et il avait failli mourir à la naissance, du moins si le premier Aquaman n’avait pas plaidé sa cause auprès d’un Namor qui aurait été capable de l’assassiner simplement parce qu’il ne voulait pas de lui, et parce qu’il serait trop puissant quand il serait adulte.
Et grâce aux paroles du premier Aquaman, il était vivant. Et il avait été élevé. Par lui.

En fait, le jeune homme n’avait jamais rencontré son père, sauf à une reprise, lorsqu’il avait eu douze ans…mais ça n’avait été que durant quelques secondes. Il ne le considérait pas vraiment comme son père, finalement.
Namor n’avait jamais été là pour lui, et même si il était son géniteur et qu’il avait sa fougue et certaines de ses colères, l’étudiant en biologie marine qui arrivait par miracle à changer de formes pour se faire passer pour humain à New York n’avait pas grand-chose à faire de lui. Surtout après son comportement face à sa sœur, Khymera, mais c’était une autre histoire…et il ne devait pas y penser. Pas maintenant.

Namor n’était pas son vrai père, selon lui. Mais le premier Aquaman, si.

Arthur Curry l’avait élevé lui-même. Il avait passé les vingt dernières années avec lui, dans leur base sous marine, à tenter d’apprendre à contrôler ses capacités défiant les standards atlantes. Et il avait réussi. Désormais, grâce à la patience du premier Aquaman, à son amour et à ses conseils avisés, le jeune homme parvenait à gérer ses pouvoirs, et il pouvait faire de grandes choses avec…de très grandes choses.
Et c’était d’ailleurs pour ça qu’il était là.

Quelques heures plus tôt, il avait entendu dans son esprit des paroles d’un être lui demandant son aide. La télépathie était quelque chose de connu dans les royaumes sous-marins, et même si il n’avait pas apprécié cela, il ne s’était pas inquiété. Il avait calmement « écouté » les paroles de cet étranger, et il en avait après avertit son parrain, Arthur Curry. Et celui-ci lui avait dit de faire confiance à ce télépathe, et c’était pour ça qu’il était là.

Le premier Aquaman avait, en effet, rapidement fait les recherches nécessaires pour savoir si ce que disait ce John Jones était vrai ou non. Dans sa base sous-marine, Curry avait devant lui d’énormes ordinateurs reliés aux centres d’informations de l’Humanité, et ça avait été un jeu d’enfant de découvrir que Lex Luthor et Norman Osborn étaient bien les monstres dont on lui avait parlé.
Et les deux Atlantes avaient aussi rapidement compris à quel point la réussite de leur plan serait néfaste à l’Humanité…et à leur propre peuple, vu que ça voudrait dire encore plus de pollution et de dégâts marins.

« Oui. Je suis prêt, maintenant. »

Le nouvel Aquaman soupira lourdement, avant de prendre son arme sur le sol et de regarder la plaque d’égouts au-dessus de lui. Ca allait commencer. Sa première intervention. En public. Son premier acte d’héroïsme. Un frisson le prit tandis qu’il entendait à nouveau quelque chose dans son oreillette construite par la technologie sous-marine, bien plus avancée que celle de la surface.

« Oui, parrain. Oui… »

Il soupira à nouveau avant de fermer les yeux pour se concentrer. Il devait être au maximum de ses capacités pour faire ce qu’il avait à faire.

« Le jour de gloire est arrivé… »


« Toi… »

Le ton de Silence trahissait ses sentiments : il était enragé, et l’objet de sa colère était l’être qui venait de sortir de la ruelle sombre d’où était sorti un petit objet en forme de demi lune quelques secondes auparavant. Cet être, cet homme même, était vêtu d’un costume sombre, noir, avec une longue cape de la même couleur, un masque avec deux petites pointes, et surtout un symbole jaune sur le torse.
Un symbole bien connu, d’ailleurs. Un symbole devenu célèbre depuis quelques semaines dans le pays, depuis la fin de la guerre des gangs grâce à celui qui l’arborait. Un symbole connu comme étant celui du Batman…l’être qui venait d’arriver et menaçait désormais les quatre criminels restants.

« Bonjour, Silence. Je ne pensais pas te revoir si vite. »

Batman…le Batman était là.
Tous les criminels présents en avaient entendus parler aux informations, et tous savaient ce dont il était capable. Ses exploits avaient résonnés dans le pays entier, et surtout dans la communauté criminelle, qui le craignait autant qu’elle pouvait craindre les Daredevil et Spider Man, eux aussi susceptibles de crises de folie comme l’homme qui se tenait devant eux, les doigts enserrant deux armes comme celle qu’il avait lancée quelques secondes auparavant.

« Je suppose que vous demandez de vous rendre ne servirait à rien, c’est ça ? »

Il s’était placé devant Donna Troy, qui protégeait jusque là le corps de Flash et ne savait pas vraiment quoi faire. Son inexpérience était criante ici, et même si elle s’en voulait de se comporter ainsi, elle n’avait aucune idée de la conduite à adopter maintenant.
Elle restait donc là, attendant que quelque chose se passe, et surtout attendant qu’on lui donne un ordre, quelque chose à faire…oui, elle avait besoin qu’on lui dise quoi faire. Là, maintenant, elle n’avait aucune idée comment gérer la situation, et c’était bien ça le pire…

« Très bien…ça m’arrange. »

Le Batman sourit légèrement, et Hydroman frissonna en voyant ça. Il n’aimait pas ce type. Il n’était dans le circuit que depuis quelques semaines, mais déjà de mauvaises rumeurs sur cet être…sur cet homme, si on pouvait l’appeler comme ça. Il aurait été capable de torturer avec ses petites armes d’une façon affreuse ses ennemis…Il aurait été capable d’enlever les familles de ses adversaires pour les faire chanter…Il aurait été capable de faire pression lui-même sur la police pour arriver à ses fins…Et pire encore…

Ce type était terrifiant, et Morris ne savait pas quoi faire. Pour l’instant, tous avaient montrés qu’ils étaient les meilleurs, et lui…lui n’avait rien fait. Bien sûr, il devait surveiller les égouts, mais c’était dur, et même…il ne pouvait savoir si quelqu’un n’attaquait que si il passait par l’eau. Bien sûr, il avait caché cette information aux autres pour ne pas se faire virer, mais…il avait peur. Peur de ne pas être à la hauteur.

Après tout, tous ces types étaient des criminels expérimentés et forts, et lui n’était que le petit venu, qui n’avait rien prouvé et à qui personne ne faisait attention. Il était sûr que personne ne le prenait au sérieux, et il n’aimait pas ça. Il voulait leur plaire. Il voulait être à leur niveau. Il voulait être accepté par eux. Et il était prêt à tout pour ça.

« Laissez-le moi ! »

Dans sa volonté d’être accepté et intégré, chose qu’il avait recherché toute sa vie depuis son enfance d’orphelin, même si ça faisait cliché, Hydroman se jeta donc contre le Batman, usant de sa forme aquatique pour se lancer sur lui.

« Crève ! »

La technique Morris était simple : se jeter simplement sur le Batman, le garder dans son corps composé d’eau, et le laisser mourir sans oxygène. Pour lui, c’était un bon plan, mais le jeune homme était un peu bête, un peu stupide et surtout totalement ignorant des capacités de son adversaire, qui sourit et se roula sur le sol avant de lancer ses deux armes vers Silence et le Dark Lantern, qui les évitèrent avec une certaine grâce.

« Donna ?
- Oui ?
- On ne se connaît pas, mais je vais avoir besoin de ton aide. »

Hydroman était tombé sur du vide et le sol sec, mais rapidement il s’était reconstitué et retentait son attaque contre le justicier de Chicago. Celui-ci arrivait à éviter les attaques aquatiques de son adversaire, mais celui-ci tentait aussi de les frapper avec ses bras constitués d’eau, et ceux-ci devenaient eux très dangereux.

« Je m’occupe de ce type, tu peux occuper les autres, s’il te plaît ? J’arrive tout de suite.
- Non ! Non, tu ne vas pas arriver tout de suite ! »

Morris ne pouvait supporter que le Batman puisse croire le vaincre aussi facilement. Bien sûr, il était moins expérimenté que lui. Bien sûr, il était moins agile que lui. Mais il avait des pouvoirs. Il pouvait transformer son corps en eau, et il pouvait contrôler les liquides autour de lui, à condition qu’ils soient composés de cet élément indispensable à la vie. Il avait le pouvoir d’un dieu. Et il était prêt à le démontrer à son ennemi qui osait se moquer de lui.

« Crève, ordure ! Crève ! »

Bench aspira alors à lui le liquide environnant. Peu à peu, les flaques d’eau, les petites gouttes de pluie reposant encore sur des toits ou bien les bidons de liquide présents dans le quartier furent sortis de leurs positions initiales pour être assimilés au corps aquatique du jeune homme, dont le visage liquide n’était plus qu’un rictus de rage et de colère.

« Hum… »

Le Batman recula légèrement, une nouvelle de ses armes dans la main. Son ennemi était désormais grand de plusieurs mètres, et même ses collègues avaient reculés, craignant à raison que tout ça ne tourne mal.

« TU VAS MOURIR ! TU NE DEVAIS PAS TE MOQUER DE MOI ! PERSONNE NE DOIT SE MOQUER DE MOI ! PERSONNE ! »

Morris tenta un très violent coup avec son énorme poing composé d’eau, et le sol trembla alors que le Batman roulait sur le sol. Il comprenait sûrement qu’il venait de faire une erreur, mais Bench s’en fichait. Toutes les humiliations qu’il avait subies dans sa vie, toute la rage accumulée jusque là dans son existence d’orphelin pauvre explosaient. Bien sûr, il n’était pas le premier ni le dernier, et sa rage était peut-être un peu cliché, mais il s’en fichait…et ça intensifiait même sa colère.

Même sa rage n’était pas originale, même sa colère n’était pas vraiment à lui. Il n’avait jamais rien eu de vraiment personnel, à part son pouvoir, et voila qu’on était en train de le railler ? Voila qu’on se fichait encore de lui ? Il ne pouvait le supporter. Et il devait faire payer les coupables.

Lentement, il leva ses deux bras composés d’eau et regarda le Batman, sous lui, son regard trahissant sa colère et sa rage sans fin.

« TU VAS MOURIR ! TU VAS MOURIR !
- Non. »

Une voix venait de se faire entendre. Une voix étrange : à la fois douce, mais aussi très froide et sèche. Une voix finalement très autoritaire, mais aussi avec une pointe de gentillesse et de jeunesse. Une voix paradoxale, vraiment. Mais ce n’était pas ce qui devait le plus inquiéter Bench à ce moment-là, en fait.

En effet, soudain, Morris sentit que son ventre lui faisait mal. Lentement, il baissa les yeux vers son corps aquatique, et se rendit compte que son torse était ouvert, une énorme forme cylindrique de couleur verte s’était logée dans le liquide plus ou moins solide qui le constituait, et ne bougeait pas.
Et il ne comprenait pas ce que c’était. Il ne pouvait pas comprendre. Son cerveau refusait d’accepter la possibilité qu’on puisse lui faire ça, et son esprit se mettait donc lentement en position pause, submergé par cette information impossible selon lui.

« Mais… »

Un homme apparut alors devant Hydroman, et il lui sourit légèrement, en croisant les bras et en lui parlant d’une voix très calme et posée.

« Pas de mais, gamin. Arrête tout de suite, ou je me fâche.
- Pas de mais.
- Ah…j’avais dis pas de mais. Dooommaaage… »

Le sourire de l’homme devint encore plus grand, et ce fut la dernière chose que vit Morris Bench, qui tomba alors dans l’inconscience alors que la douleur était trop forte, et qu’il ne comprenait toujours pas comment tout ça pouvait être possible.
 
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