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  Le Gorille #17 : Retour parmi les vivants - La proie
 

Histoire : P'tit Lu
Date de parution : Octobre 2006

Résumé : Lors d’une journée porte ouverte d’un laboratoire, un accident provoque la mort d’un groupe de visiteurs, en dehors de Frédéric – tombé dans le coma – et de Matthieu Sylvestre, qui s’est vu doté grâce à cet accident de pouvoirs faisant de lui le Gorille. Mais après deux mois et demi de sommeil, Frédéric se réveille doté des mêmes pouvoirs que Matthieu. Juste après la publication d’un article racontant son réveil miraculeux, Fred appelle Matthieu à l’aide, apparemment poursuivi par des hommes voulant le tuer…


* * * * * * * * *

Paris X
Lundi 12 : 40

- Ne me touchez pas, salopards ! hurla Fred aux trois hommes qui pointaient leurs armes de poing vers lui.
La rue n’était pas particulièrement étroite, ni déserte d’habitude, mais ces types l’avaient fait évacuer. Comment ils avaient pu faire une chose pareille, à une heure pareille, il n’en avait aucune idée. Peut-être certaines choses avaient-elles changé pendant son coma de deux mois… Ces trois hommes étaient cagoulés et vêtus de tenues noires et d’un arsenal militaire imposant.
Fred était adossé à un perron, un homme se tenait à deux mètres devant lui, tandis que les deux autres se tenaient un peu plus loin à sa droite et sa gauche.
- Tu vas te rendre gentiment, lui ordonna l’homme cagoulé face à lui. Sans faire de problème.
Fred paniquait : jamais on n’avait pointé de flingue vers lui ! Dans ses moments là, l’instinct prend inévitablement le dessus, et depuis qu’il avait été frappé par une onde de choc rougeâtre deux mois plus tôt, les instincts du jeune homme avaient été légèrement chamboulés. Sans se rendre compte de ce qu’il faisait, il banda ses muscles, s’accroupit, et bondit vers son agresseur ! L’homme en question, surpris, ne réagit pas à temps et fut percuté par Fred, avant d’être soulevé et projeté contre le mur par le jeune homme ! Les deux autres hommes réagirent aussitôt en tirant sur leur proie, qui reçut deux balles au torse et à l’épaule.
Fred poussa un cri de douleur et d’un bond rejoignit un des hommes pour lui faire comprendre sa rage, mais celui-ci lui asséna un coup de poing magistral qui l’envoya au tapis. Il était trop novice dans l’utilisation de ses pouvoirs pour venir à bout de ces types.
- Argh !
Un des hommes venait de s’effondrer, assommé par une masse sombre qui bondit rapidement vers l’autre homme pour lui donner le même traitement. Le Gorille se tourna vers son compagnon et l’aida à se relever.
- Suis moi.
- Matt, ils voulaient me… !
- Tais-toi ! Suis moi…
La main plaquée sur ses blessures, Fred obéit.


* * * * * * * * *

Rue de la sablière
Paris XIV
Vendredi, 17 : 20

Je m’appelle Matthieu et je suis le nouveau super-héros parisien. D’habitude, je suis plutôt d’humeur joyeuse, mais les évènements ne prêtaient pas vraiment à rire.
Je me trouvais à la fenêtre d’un appartement miteux, dans mon costume de Gorille, jetant un œil à la rue plus bas. Mon ancien camarade de cours, Fred, était allongé sur le canapé en râlant de sa blessure par balle à l’épaule, que j’avais plus ou moins soignée avec ce que j’avais sous la main. Merci les dimanches soirs Urgences.
- Mat, j’ai terriblement mal… on doit aller à l’hôpital…
- Non. Ils nous retrouveraient.
- Ça fait quatre jours, ils ont laissé tombé !
- Ils ne nous ont pas retrouvé uniquement parce qu’on change de planque tous les jours. Ces hommes… ils ne sont pas n’importe qui. Ils ont évacué une rue pour te piéger, sans être inquiétés par la police. Ils ne vont pas lâcher le morceau si vite.
- J’en ai… j’en ai marre…
- Tais-toi !! ai-je hurlé. Tais… ! (j’ai soupiré pour me calmer un peu) Tout ça c’est de ta faute, tu devais la jouer profil bas, et qu’est-ce que tu fais ?! Tu la ramènes dans un journal ! Maintenant tu as attiré l’attention d’un mec suffisamment costaud pour envoyer ses troupes de choc te capturer juste parce que tu l’as intrigué. Combien de temps il va mettre pour découvrir que tu as des pouvoirs ? Les mêmes que le Gorille ? Que moi ? Non seulement tu vas nous entraîner sur une table de laboratoire, mais en plus tu as mis Annabelle et Emily en danger juste parce qu’elles me connaissent ! Et ta mère, tu y as pensé ? Ta sœur ?! Ces mecs vont se servir d’elles pour te capturer, crois-moi.
- S’ils touchent à un cheveu de Fanny, je…
- Tu vas faire quoi ?! T’as vu ton état ?!
- Alors on fait quoi, Einstein ?!
- J’en sais rien, j’ai jamais été piégé comme ça ! La Faux, il suffisait de le rétamer, mais eux… si on s’en débarrasse, d’autres se pointeront.
Toc Toc
On frappait à la porte.
Mon corps s’est raidi et mon cœur s’est emballé, tout comme Fred je suppose. Je lui ai fait signe de ne pas bouger et de ne pas faire le moindre bruit et je me suis adossé au mur juste à côté de la porte.
- S’il vous plaît, il y a quelqu’un ? C’est le concierge, on a déposé un paquet pour vous, madame Larquet.
« Va-t-en, abruti ! Dégage de là, tu vas attirer l’attention ! »
- Il n’y a personne ?
Il s’en alla et je pus souffler. Je me suis concentré sur lui pour l’écouter partir. Mon ouïe avait été un peu affûtée depuis que j’avais acquis mes pouvoirs, et je l’ai entendu faire quelques pas puis dire quelques mots :
- La lunette thermique a repéré deux personnes, elles n’ont pas répondu. C’est eux.
Merde ! La porte fut soudainement défoncée par deux hommes qui entrèrent en hurlant des ordres et en pointant leurs armes dans tous les sens. Je me suis jeté sur l’un d’eux mais il me stoppa d’un coup de crosse dans le nez et m’envoya valdinguer dans un coin, tandis que l’autre homme et deux autres qui venaient d’entrer immobilisaient Fred en lui injectant un calmant à l’aide d’une seringue plantée dans le bras.
Ils l’encagoulèrent et le soulevèrent pour le porter jusque dehors, alors même que je me relevais pour me battre à nouveau. Le même homme qui m’avait mis au tapis se jeta vers moi, m’attrapa le poignet et, d’un geste sec, le brisa avant de me plaquer le bras dans le dos et de m’immobiliser au sol, face contre terre. En moins d’une seconde !
- Alpha deux ! entendis-je. On y va, le paquet est emballé. Ce guignol ne fait pas partie du contrat, laisse-le là.
Mon tortionnaire relâcha sa pression et, avant que je le réalise, disparut avec les autres. Leur assaut avait duré en tout et pour toute une quinzaine de secondes. Ils avaient Fred ! Ils nous avaient rétamé !
Non non non !


* * * * * * * * *

Vendredi, 18h00

J’ai récupéré à toute vitesse mon téléphone portable que j’avais caché sous une benne à ordure pour qu’on ne puisse pas me repérer au travers du signal qu’il émettait, et j’ai écouté ma messagerie. Deux messages de ma mère, quatre d’Emily, un d’Annabelle. Ouf, je n’avais pas eu le temps de la prévenir de ma disparition, mais Annabelle m’avait apparemment couvert auprès d’Emily et de ma mère.
Tout en courant sur les toits de la capitale, j’ai passé quelques coups de fil.
- Annabelle, c’est moi Matthieu ! Je suis de retour, merci de m’avoir couvert auprès d’Emily, tu lui as raconté quoi au fait ? Ah, pas terrible. Non, non, c’est parfait, merci beaucoup. J’étais… planqué avec Fred, on était poursuivi par des mercenaires qui en avaient après l’autre abruti. Je te raconterai. Bye.
J’ai composé un autre numéro :
- Salut ma chérie, c’est moi Mat ! Oui, désolé j’ai pas pu te prévenir que je partais, mais Annabelle l’a fait, non ? Oui, c’est ça, une… une conférence sur les Aztèques à Trifouilli-les-oies. Hum. Enfin, je te raconterai. Bye.
Je ne laisserai plus jamais Annabelle me couvrir. D’un dernier bond, je me suis retrouvé sur le toit d’un commissariat par la lucarne duquel je suis entré dans le bureau du commandant El-Hamar. Et il a fallu que je tombe en pleine réunion avec une dizaine de flics.
Ils ne restèrent malheureusement pas bouche bée longtemps et pointèrent tous leur flingue vers moi, qui dut lever les mains en signe de soumission.
- J’attends ton arrestation depuis des semaines, ricana El-Hamar. Mais même dans mes rêves les plus fous tu ne te faisais pas capturer de la sorte.
- En effet, acquiesçai-je. Je viens signaler un kidnapping dont j’ai été témoin. Je peux faire une déposition ?
- Aucun problème, des dépositions tu vas en faire à la pelle ! Henri, s’il te plaît, arrête-le, j’arrive pas à contenir mon fou-rire…
- Ecarte les bras et les jambes et…
A une vitesse qui prit de court les policiers, j’ai attrapé le bras tendu de l’officier qui s’apprêtait à me passer les menottes et je lui ai fait faire volte face pour qu’il se retrouve dos à moi pendant que je lui passais le bras autour du cou.
Tout le monde se crispa et la bonne humeur du commandant El-Hamar disparut.
- Tu sais ce que tu fais, connard ? souffla-t-il. Tu viens de prendre en otage un représentant des forces de l’ordre. Jusque là, on n’avait à te reprocher que le fait d’être un costumé, c’est à dire pas grand chose aux yeux de la loi (parce qu’en fait, on n’a aucune preuve de ton implication dans l’attentat qui a bousillé cette rue du XIXeme). Mais tu viens de changer la donne, parce que les flics aiment pas trop ceux qui s’en prennent aux autres flics, et les quelques sympathisants qui te restaient vont maintenant tirer à vue, crois-moi.
- J’aimerais bien continuer à m’ennuyer mortellement en vous écoutant monologuer, mais je n’ai pas trop le temps actuellement. Un type vient de se faire enlever par un groupe de mercenaires, je viens à la pêche aux infos. Vêtus de noir, cagoulés, équipés d’armes qui n’ont rien à envier à celles de l’armée, qui peuvent vider une rue sans se faire repérer, mais surtout… surtout… suffisamment rodés au combat pour me mettre au tapis en un clin d’œil. Genre d’anciens militaires ou GIGN, vous me suivez ? Ils parlaient français sans aucun accent, ils sont du coin.
El-Hamar allait se lancer dans une tirade genre « pourquoi je t’aiderais vu que tu es un criminel qui vient de prendre un de mes hommes en otage ? », mais aucun mot ne sortit de sa bouche et ses yeux se perdirent dans le vague. Oui, il savait quelque chose, et je craignais le prix à payer pour obtenir l’information.
- Je n’enlèverai pas mon masque, dis-je d’un ton déterminé. Vous savez de qui je veux parler, et en échange de l’info je n’enlèverais certainement pas mon masque.
- Oh non, hocha-t-il de la tête. Relâche mon homme, c’est tout ce que je te demande. Je te donne un nom, tu le laisses et tu t’en vas.
Il y avait forcément une embrouille quelque part. Même les flics se tournaient vers lui avec un air d’étonnement. Il me tenait, et il me laissait partir si facilement ?!
- L’homme qui a embauché ces mercenaires est très certainement François Leconte, aussi appelé le Maréchal dans les hautes sphères. On n’a jamais réussi à prouver qu’il avait recours à ce genre de méthodes, mais c’est un lieu commun. Le Maréchal, tu as ton nom, maintenant disparaît.
Et avant que ses collègues aient pu tenter quoique ce soit, j’avais repoussé mon otage et j’avais fui à travers la lucarne.

 
 
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