Histoire : P'tit Lu
Date de parution : Juin 2005
Rue Montmartre, Paris II
Jeudi 17 février
00 h 21
La poussière me fit tousser violemment. Où étais-je ? Que s’était-il passé ? Je ne voyais rien, tout était trop sombre. Mon masque m’étouffait, mais je n’avais même plus la force de l’enlever. Ah oui… Le scientifique, l’étage qui s’effondrait… J’avais survécu ? Il semblait. J’entendais des militaires au loin, j’espérais qu’ils ne fouillaient pas l’immeuble, tout risquait de s’effondrer à nouveau et de faire cette fois-ci beaucoup de victimes.
Quelqu’un souleva une planche au dessus de moi, et je crus que mon cœur allait s’arrêter de battre quand la créature passa sa tête au dessus de moi. J’étais trop engourdi pour faire le moindre mouvement, sans défense !
Elle fit alors quelque chose dont je la croyais incapable : elle murmura.
- Tu me connais, petit homme. Et je te connais aussi. Tu y étais, n’est-ce pas ? L’accident. Tu y étais, c’était toi… Oui, c’est toi qui m’as regardé après l’accident en croyant que j’allais te tuer. Je ne l’ai pas fait, mais tu n’as pas de crainte à avoir : je vais réparer cette erreur tout de suite.
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Hôpital, Paris XIV
Six jours plus tôt
22 h 37
Je me suis réveillé à l'hôpital, nauséeux et l'impression d'avoir passé la nuit dans un tambour à linge. Annabelle était là à mon réveil, ainsi que mes parents.
- Qu'est-ce que... bredouillais-je. Qu'est-ce qui s'est passé ? Depuis quand je suis là ?
Ma mère s'aperçut de mon réveil, et se précipita à mon chevet.
- Tu es réveillé, enfin... ! Il y a eu un accident au laboratoire que tu visitais, et tu... Tu es le seul à t'en être sorti...
- Le seul... soufflai-je. Mais... les autres... Fred ?! Où est Fred ?!
- Dans le coma, me répondit Annabelle la larme à l'oeil. Les médecins ne se prononcent pas sur son cas.
- Tu y étais aussi, m'informa ma mère. Depuis une semaine.
- C'est pas possible...
Je me suis endormi. Plus tard, j'ai appris que les responsables du complexe des laboratoires avaient été mis en garde à vue et seraient jugés pour l'accident qui a tué des dizaines de personnes. Sauf moi. D'après les médecins, l'accident n'avait eu aucun effet secondaire sur mon organisme, mais je savais pertinemment que c'était faux. Et quelques jours plus tard, je l'ai fait.
J'étais toujours dans ma chambre d'hôpital, il devait être 22h30, mais je ne dormais pas. J'étais debout, devant la fenêtre que j'avais ouverte, et j'étais prêt à me jeter dans le vide. Pas parce que je voulais me suicider, mais parce que je SAVAIS que j'en réchapperais. Tout comme un athlète sait qu'il peut ou non effectuer un saut d'une certaine longueur, je savais que j'arriverais à sauter jusqu'à l'immeuble en face. Sans aucun problème.
Alors j'ai pris mon élan, et j'ai sauté par la fenêtre. Du troisième étage.
J'ai poussé un cri d'angoisse une fois dans le vide, la route et les voitures loin en dessous de moi, mais avant que je ne m'en rende compte, je suis venu m'écraser contre le mur de l'immeuble en face ! Je fus sonné par le choc, mais j'ai eu assez de réflexe pour m'accrocher à une corniche, et assez de force pour soulever mon corps avec la force de mes bras jusqu'à une fenêtre, contre laquelle j'ai pu reprendre mon souffle.
Je l'avais fait ! Je l'avais vraiment fait ! De la lumière s'alluma derrière moi et le propriétaire de l'appartement auquel appartenait cette fenêtre n'en crut pas ses yeux.
- Mais qu'est-ce que tu fais là ?! Et... Et comment t'es arrivé là !
Euphorique, je lui répondu simplement en souriant :
- Désolé, mais il faut que j'y aille !
Puis je me suis laissé tomber dans le vide – devant ses yeux ébahis – et quelques mètres avant le sol j'ai attrapé une corniche pour me ralentir et profiter de cet élan pour me balancer un peu plus bas jusqu'à une autre corniche, et enfin retomber sur le trottoir sans que les passants n'aient remarqué quoi que ce soit. Mes mains étaient en sang, mes jambes avaient souffert au moment de l'atterrissage, mais je n'y pensai pas, j'ai heureux ! Heureux ! J'avais l'impression d'être libre !
- Eh ! m'interpella un passant. Rhabille-toi, ducon !
J'ai baissé les yeux, et j'ai pris conscience que je venais de faire mes cascades en pyjama d'hôpital. Je n'en ai pas tenu compte et me suis mis à courir.
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Sans m'en rendre compte, je me suis retrouvé sur les lieux de l'accident, un peu à l'écart de la ville. L'endroit n'était plus que gravats autour du labo qui avait explosé. J'étais pieds nus et faisais très attention où je marchais. Les corps avaient été tous déterrés, bien sûr, mais j'avais quand même peur de trouver un cadavre causé par l'accident, celui-là même qui m'avait donné mes pouvoirs.
J'ai parcouru les décombres une demi-heure, ne sachant pas ce que je faisais là, ce que je pouvais bien chercher. D'ailleurs, j'allais repartir – il devait être 2h00 – quand j'ai entendu du bruit et des larmes. Prudemment, je me suis dirigé vers la source de ce bruit, et j'ai trouvé un homme assis au milieu des gravats, s'apitoyant sur son sort. Quand il me vit, il me reconnut tout de suite.
- Vous. Oui, vous êtes le jeune qui a survécu.
- Et vous êtes... ? lui demandai-je en retour.
Il ne paraissait pas vraiment étonné de me voir ici en pleine nuit en pyjama.
- Je travaillais ici. J'étais chercheur.
- C'est à cause de vous que tous ces gens sont morts ?!
Navré, il acquiesça, et se remit à pleurer. Il leva sa main, et j'y vis des gants épais et noirs. Rien d'extraordinaire.
- Une technologie très poussée, les gants sont recouverts de ventouses microscopiques, qui peuvent adhérer à un peu n'importe quelle prise. Ce labo devait créer un surhomme, et nous à côté une combinaison pour le futur surhomme. C'était une partie de la combinaison qu'on était censé créer juste avant l’accident. Ils ont respecté tous les protocoles de sécurité, tout aurait dû fonctionner, mais…
- Mais quoi ?! me suis-je emporté. Mais leur expérience a tout fait péter, quel dommage ?!
Il ne répondit pas. Classique.
- J'espère que vous irez en taule un bon bout de temps.
J'allais m'en aller quand il me tendit les gants qu'il avait toujours dans les mains.
- Le reste de la combinaison a été détruite quand… Je... tenez, c'est pour vous.
J'étais interloqué.
- Vous pensez vraiment que ça dédommagera la souffrance des personnes qui étaient là-bas ? Et ce que j'ai vécu ? Vous êtes la pire ordure que j'ai jamais vue...
- Non, non, se défendit-il. Je sais bien que rien ne pourra jamais... enfin... Personne n'en a plus l'utilité, maintenant, le laboratoire va être fermé. Prenez-les, c'est le moins qu'on puisse faire, ils vous seront de toute façon plus utiles qu'à moi et mes collègues.
J'ai hésité un instant, puis, lentement, je me suis avancé vers lui et j'ai pris les gants qu'il me tendait.
- On se reverra au procès, lui ai-je lancé.
Puis je suis parti en courant, voulant à tout prix m'éloigner le plus vite possible de cet endroit de mort.
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J'étais à bout de nerf après mon entretien avec le chercheur, et j'avais besoin de me défouler. D'utiliser mes nouveaux pouvoirs, de sauter d'immeuble en immeuble, et surtout... de me trouver des habits.
J'en ai trouvé sur un balcon au premier étage d'un HLM en train de sécher qu'il ne m'a pas été difficile de rejoindre grâce à la nouvelle force de mes muscles.
Puis je me suis amusé : je suis retourné dans la capitale, où les bâtiments étaient devenus pour moi un nouveau terrain de jeu. J'étais en haut d'un immeuble ? Pour peu que son voisin ne soit pas trop éloigné, je sautais dans sa direction, atterrissais sur son toit et faisais de même pour le suivant ! Je ne m'étais jamais autant amusé de ma vie en pratiquant du sport !
Rien ne pouvait m'arrêter ! Rien, excepté... le vide. Et comme je m'en suis aperçu au bout d'une heure de vagabondage au dessus des toits, il est arrivé un moment où j'étais coincé, incapable d'aller plus avant, car le bâtiment le plus proche était trop éloigné pour que je tente un saut, et qui plus est la Seine me barrait le chemin de l'autre côté.
J'étais obligé de faire demi-tour, incroyablement frustré – j'étais comme un gosse qui s'apercevait que son nouveau jouet qu'il attendait tant ne fonctionnait pas aussi bien qu'il l'espérait. Ou peut-être pouvais-je descendre la façade, comme je l'avais fait quelques heures plus tôt après mon premier « saut ». Me laisser tomber, me rattraper à une corniche, profiter de l'élan pour me balancer vers une autre corniche plus basse, et ainsi de suite...
Mais le souvenir douloureux de mes mains en sang m'interdit d'aller plus loin dans cette idée. Quoique... M'accrocher ? Je me suis brusquement souvenu des gants que le chercheur m'avait donnés ; ils étaient dans les poches de mon « nouveau » pantalon. Je les ai retirés de mes poches en essayant de me rappeler ce qu'il m'avait dit.
« Capables de s'accrocher à quasiment n'importe quelle prise » ou quelque chose dans ce style. Ah ouais ? Ben, on allait voir ça. Je les ai délicatement enfilé, de peur de casser quelque chose à l'intérieur, s'il était équipé d'électronique, mais ce n'était pas le cas. Il ressemblait en tout point à des gants ordinaires, et j'avais l'impression de m'être fait avoir.
Tant pis, tout ce que je voulais, c'était me protéger les mains.
J'ai regardé vers le bas... Le trottoir ne me raterait pas si je faisais une fausse manoeuvre. La paroi de l'immeuble était loin d'être lisse, Dieu merci, il contenait des appartements, et chaque rebord de fenêtre serait une prise potentielle, comme je l'avais fait quelques heures plus tôt, j'aurais quelque chose à quoi me rattraper.
« T'es dingue, mec. T'es dingue ! »
Mais j'étais bien déterminé à sauter, ne serait-ce que pour quitter cet immeuble. J'ai pris ma respiration, mais il me fallait quelque chose pour me redonner du courage. Alors, sans y réfléchir, j'ai poussé un puissant cri de rage, comparable à celui d'un gorille, puis je me suis laissé tomber dans le vide.
Le vide !
Le sol se rapprochait de plus en plus vite, si je ne faisais rien je serais mort dans moins de cinq secondes ! Mon coeur battait la chamade, j'étais incapable de me concentrer sur ce que je devais faire, j'étais obnubilé par le trottoir qui fonçait vers moi ! Mais pourquoi j'avais sauté ?! Alors lentement... lentement... j'ai tendu ma main vers la façade de l'immeuble, ma seule chance de survie, cherchant la moindre prise pour me rattraper...
J'allais trop vite, à cette vitesse j'allais m'arracher la main ! Tant pis, quitte à mourir... J'ai brusquement tendu ma main vers la corniche d'une fenêtre, que je n'ai fait qu'érafler à cause de ma vitesse.
« Réagis ! Essaie encore ! »
J'ai retenté ma chance, avec un peu plus de succès cette fois-ci, mais j'ai tout juste ralenti ma course, à défaut de me rattraper. Une autre ! Il le fallait, c'était ma dernière chance ! Je n'avais plus le temps de réfléchir, il fallait que j'attrape la suivante, c'était une question de vie ou de mort...
Alors j'ai tenté le tout pour le tout, et j'ai à nouveau tendu ma main vers le mur, et j'ai touché la corniche de pierre suivante... la dernière avant le sol. Oui ! Non ! Non ! Je ne l'avais touchée que du bout des doigts, j'allais la lâcher ! Puis, le choc de ma chute, j'étais entraîné vers le sol par mon propre poids décuplé par ma vitesse. Je n'allais pas tenir, c'était impossible, même avec ma nouvelle force.
Et pourtant... Oui ! Incroyable. Purement incroyable : je pendais lamentablement le long de la façade, accroché à la corniche d'une fenêtre par le bout des doigts d'une seule main ! Et le pire, c'est que ça semblait tenir !
Personne en bas n'avait l'air de me remarquer, ce qui paraissait impensable vu ma chute ; j'ai usé de mes dernières forces pour me soulever entièrement jusqu'à la corniche, sur laquelle j'ai pu m'assoire malgré le peu de place.
J'ai jeté un coup d'oeil à l'intérieur de l'appartement : il n'y avait personne, et je ne voyais rien à cause de la lumière éteinte. Tant mieux, je n'aurais pas à expliquer ma présence aux locataires, je n'étais plus vraiment d'humeur à raconter des histoires ! Un réveil à écran digital m'indiqua qu'il était près de 4h00.
J'ai penché ma tête au bord de la corniche : j'aurais dû tomber, et m'écraser sur le trottoir. Même avec une force supérieure à celle d'un homme normal, je n'aurais pas pu me retenir à une corniche simplement du bout des doigts. A moins que... J'ai tourné la paume de mes gants vers moi. Ils étaient intacts. Et si... Et si le chercheur avait dit vrai ?
Je me suis tourné vers la fenêtre, et j'ai posé ma main droite sur la vitre, et je l'ai enlevée. Il y eut une légère adhérence, mais rien d'extraordinaire ; rien, en tout cas, qui expliquait comment j'avais pu rester accroché de la sorte une minute plus tôt. Tant pis, je ne serais pas Spider-Man, celui qui marche sur les murs.
Je me suis levé, et j'ai posé ma main à plat sur la brique au dessus de ma tête. De la même façon, il n'y eut qu'une légère adhérence. C'était totalement illogique ! Je n'avais pourtant pas rêvé ! Déçu, j'ai voulu me laisser retomber jusqu'au trottoir, la hauteur n'était pas vraiment dangereuse. Mais alors que j'ai appuyé mes deux mains sur le bord de la corniche – la paume sur le dessus et les doigts en dessous – je l'ai senti. Une plus grande adhérence. Une beaucoup plus grande adhérence, en fait ! Certain de mon coup, je me suis laissé tombé en avant, les mains contre la corniche et… ça se reproduisit. Je ne tombais pas, j’étais pendu dans le vide mais mes mains se tenaient fermement à la corniche !
Je me suis laissé tomber sur le trottoir à la vue des passants qui me prirent pour un fou qui avait sauté du premier étage (ce que j’avais fait, en fait). Ces gants… Combinés à mes pouvoirs, je pouvais faire ce que je voulais ! Annabelle allait être folle de joie quand je lui raconterais !
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Rue Montmartre, Paris II
Jeudi 17 février
00 h 45
Il y a une heure, j’étais pépère dans mon appartement avec Annabelle, ma colocataire, une copine depuis près de dix ans qui n’appréciait pas trop de me voir jouer les héros. Et maintenant, j’étais dans les décombres d’un immeuble à moitié effondré avec un type de trois mètres de haut, entièrement nu, qui me promettait qu’il allait me tuer.
Non… Je n’étais plus sous les décombres. Où… ? Les bruits de circulations me réveillèrent, des voitures roulaient pas loin, sûrement en contrebas. J’ai ouvert les yeux, et ce que je vis me glaça le sang : il était là, à quelques mètres de moi, il m’attendait. Je réalisai vite que nous nous trouvions sur l’Arc de Triomphe, juste en dessous des hélicoptères de l’armée qui pouvaient nous tirer dessus à tout moment.
- BATS-TOI ! me lança cette créature.
- Pourquoi ?! parvins-je à lancer malgré un mal de crâne éprouvant.
Elle n’était pas aussi stupide qu’elle en avait l’air, je le voyais dans son regard. L’accident l’avait transformé physiquement, mais pas mentalement.
- Je ne connais pas votre nom, mais je sais que vous n’avez rien d’un homme mauvais !
J’espérais que mes paroles lui parvenaient malgré le bruit des pales des hélicoptères.
- TU ES COMME MOI ! hurla-t-elle. COMME MOI, TU VAS MOURIR ICI ET CE SOIR ! CEUX QUI NOUS ONT FAIT CA SONT MORTS, ET ON DOIT MOURIR AUSSI ! ON EST DES MONSTRES, C’EST L’ORDRE DES CHOSES !
D’accord, c’était ça. Nous étions les seuls à avoir survécu à l’accident, et il voulait qu’on paie pour ça. Il voulait mourir depuis le début, et maintenant il voulait m’entraîner avec lui. Je retire ce que j’ai dit, ce gars avait été atteint mentalement par l’accident.
Il se jeta sur moi, mais j’ai plongé sur le côté pour éviter son attaque destructrice et son poing s’enfonça dans la pierre. Je sautai sur son dos pour pouvoir accéder à ce que je supposais être son seul point faible : sa tête. Je n’avais pas envie de le tuer, mais s’il ne se calmait pas rapidement j’allais être obligé de lui régler son compte…
J’ai frappé son crâne, frappé, frappé, frappé… Il ne sentait rien ! Rien du tout, il n’avait pas la moindre réaction en dehors de celle de vouloir m’attraper pour me tuer ! Du sang giclait de la fracture que je lui avais provoquée au crâne et il ne semblait même pas s’en apercevoir ! Il réussit à attraper mon pied gauche et tira violemment pour me jeter à terre. J’ai effectué un saut surhumain pour échapper à sa fureur mais il me rattrapa au vol et me plaqua au sol. Combien de côtes cassées ? Je n’en avais aucune idée, et de toute façon ça n’avait plus aucune importance vu mon espérance de vie.
D’un geste désespéré, j’ai réussi à dégager mon bras gauche de son emprise et lui casser deux dents grâce à un uppercut bien placé. Je pensais qu’il allait m’écraser la tête contre la pierre pour ça, mais il ne fit rien. En fait, il ne bougeait même plus, ce qui était inquiétant. Il s’effondra progressivement, relâchant son étreinte ce qui me permit de me dégager et ne pas être écraser dessous, c’est alors que je vis une flèche enfoncée dans son dos, au niveau de sa colonne vertébrale. Elle avait réussi à traverser sa peau, c’était incroyable.
Instinctivement, j’ai tourné la tête dans la direction de la flèche et je le vis, à dix mètres de nous, tout de vert vêtu.
- L’Archer… soufflai-je.