Urban Comics
  Teen Titans #23 : Le traître (1)
 

Histoire : Lex
Date de parution : Mai 2008

15 février 200. - San Francisco National Cemetery.

La pluie inondait le visage de Garfield Logan tout autant que ses pleurs. Emmitouflé dans un épais manteau noir, le jeune homme écoutait le pasteur rendre un dernier hommage à Tara Markov, tandis que deux ouvriers du cimetière s’affairaient à mettre en terre le cercueil en pin dans lequel reposerait à jamais la dépouille de la jeune fille. Il l’avait à peine connu, avait commencé à l’apprécier, à partager ses problèmes avec elle. Elle avait été une prostituée pendant toute son adolescence. Lui avait été pourchassé en sa « qualité » de mutant. Et puis tout s’était arrêté. Subitement. Violemment. En fermant les yeux, Garfield revoyait cette scène sinistre où les clochards sous l’emprise d’une attraction maléfique, avaient submergé la jeune femme, incapable de se défendre devant le nombre d’assaillants. Ils l’avaient roué de coups, tabassé à mort, ne lui donnant aucune chance, non aucune chance de survie. Ils frappaient, frappaient, comme des automates déglingués, avec un automatisme effrayant. Garfield venait de perdre une amie, oui. Et dans des circonstances horribles. Cela lui rappelait la mort de ses compagnons mutants, à une époque où il avait craché sur l’Humanité, devenue folle face à l’arrivée des mutants. Il avait cru au discours de Crane, aujourd’hui mort. Puis il y avait eu les Titans. Ce nouveau départ. Victor et Dick, les deux types qui lui avaient tendu la main alors qu’il croyait ne plus avoir rien à attendre de la vie.

Dick. Le grand absent en ces moments de deuil et de doute. Où était-il alors qu’une des membres du groupe de justiciers qu’il avait lui même crée venait de disparaître ? Sa petite-amie avait, elle aussi, perdu tout contact avec lui depuis bientôt deux semaines. Il avait du se rendre à Chicago, c’était vrai. Mais c’était pour une durée plutôt courte. Et maintenant, il avait bel et bien disparu. Si il lui était arrivé quelque chose, alors les Titans n’avaient plus aucune raison d’existe. Victor était un bon leader avec du charisme mais Dick représentait le groupe. Il était Robin, le justicier qui faisait rêver les mômes et fantasmer les adolescentes. Ce leader invincible et motivé, prêt à détruire le Crime dans son quartier et dans sa ville. C’était lui qui les avait mené à la bataille. Lui qui les avait poussé à devenir des justiciers. Et à présent, il n’était même pas là pour enterrer une fille qu’il avait à peine connue.

Partie trop tôt, Tara resterait dans la mémoire de Garfield, une fille avait qui avait envisagé tant de choses. Une amitié, et peut être plus, était née entre eux deux ces derniers jours. Mais tout était brisé à jamais tandis que la terre finissait de recouvrir le trou. Elle avait disparu, et pour toujours.

Conscient de la douleur qui étreignait son camarade, Victor tapota l’épaule du mutant avec affection. Fortement éprouvé par les combats contre Sebastian Cassidy et ses diablotins aux allures de clochards, Victor arborait un bandeau noir à la place de l’œil droit et une large cicatrice entamait son cou et disparaissait derrière la chemise de son costar. Bien que son corps soit fais de métal et doté d’une résistance hors du commun, la force maléfique combinée au nombre avait eu raison de lui. En tant que chef, il avait failli. Un de ses camarades était mort au combat et il se sentait responsable, plus que toutes les autres personnes réunies autour de la tombe de Tara. Il l’avait laissé seule, devant, pour qu’elle protège une Raven affaiblie et terrorisée. Il l’avait abandonné à son sort, oui. Pourquoi ne s’était-il pas rué sur ceux qui l’attaquaient ? A présent, il n’était plus digne d’être le chef des Titans, même par intérim. Il avait échoué dans ce combat qui avait fais couler tant de sang.

Maintenant, l’image du groupe avait définitivement changé aux yeux de la population, aux yeux de la police, aux yeux de tout ceux qui croyaient en les Titans. Les adolescents prodigues avaient grandis brutalement. Trop brutalement. Il aurait fallu la mort d’une titan pour que chacun s’en rende compte, et Victor le premier. L’afro-américain avait maintenant le goût aigre de la défaite dans la bouche, et la douleur d’avoir perdu quelque chose que jamais plus il ne pourrait obtenir : une famille. La sienne avait disparu, enlevée, voire pire, par les types qui l’avaient robotisés. Il s’était juré de retrouver ces ordures qui lui avaient retiré son humanité. Et maintenant que le groupe était quasiment mort, le sentiment de vengeance venait de nouveau le tarauder, plus dur, plus abrupt qu’avant. La vengeance était une obsession qui avait succédé à la colère et qui consumait avec une intensité éprouvante son âme.

Et la maturité était une chose bien difficile à accepter pour Garfield, Victor, Tula et bien sûr Raven. Dans son coin, sous un parapluie et éloignée du reste du groupe, la jeune fille avait les yeux baissés. Elle savait que Tara s’était sacrifiée pour elle alors qu’elle se connaissaient à peine. Cela faisait mal au cœur, tout autant que d’apprendre qu’une entité démoniaque souhaitait l’accaparer pour des raisons obscurs. Enfin pas si obscurs que ça puisque les rêves qu’elle faisait se rapprochait de plus en plus de ce Trigon. Ses quatre yeux rougeoyants, elle les avaient encore en tête et cette image la harcelait sans cesse. Ils étaient omniprésents et elle n’en pouvait plus. Trigon était passé à l’offensive. Le livre noir qu’elle avait retrouvé chez Loren et pris, à l’insu de tous, lui confirmait ses pires craintes. La secte avait organisé la résurrection de l’être démoniaque liée à elle et bientôt, oui très bientôt, il frapperait de nouveau.

Pour l’heure, tout les Titans partageaient la même angoisse en l’avenir, sachant que le futur des Titans était compromis à l’extrême. Et même Dick Grayson, adossé à un arbre, en hauteur de la colline, et qui observait ses compagnons situé un peu plus bas. Vêtu d’un costar noir standard, un imperméable sur les épaules, Dick arborait une mine triste et blasé. Son absence avait profondément perturbé l’équipe et c’était entièrement de sa faute. Tout comme la mort de Tara. Si seulement il avait pu être là. Si seulement il avait pu être là. Plus que de la tristesse, c’était une totale remise en question qui s’opérait en lui. Dick était lassé de toute cette souffrance, de toute cette tristesse. Oui, il en avait marre et souhaitait en finir une bonne fois pour toute avec les ennemis des Titans. Ce qu’il avait appris ces derniers jours, plus la mort d’une de ses amies, l’avait profondément ébranlé. Venait s’ajouter au tableau la mort de Tim Drake qui avait laissé Dick désarmé. Bien qu’il se soit réconcilié avec Batman, Dick avait failli laisser sa vie à Chicago. Et cela le marquait profondément. En revenant à San Francisco, le jeune homme s’était interrogé sur les paroles de Bruce cette nuit où il avait failli le tuer. Il était responsable de trop de morts finalement. Et ça, il ne pouvait plus l’accepter. Et puis Kory qui ne répondait plus au téléphone et refusait de le voir, le traitant de lâche…

En soupirant, Dick commença à marcher en direction de ses amis. Il savait que la confrontation serrait dur mais c’était nécessaire. Le petit chemin le mena jusqu’aux jeunes titans qui lui tournaient le dos, en route vers la direction inverse. Ce fut Garfield qui perçut la présence de l’ancien leader de l’équipe le premier. Lorsque Dick vit le visage de son ami, il recula, choqué. Le visage encore tuméfié par les coups qu’il avait reçu, le mutant l’observait d’un regard triste et las. Puis Tula se retourna et l’observa d’un air indulgent. Elle aussi avait beaucoup souffert et son œil au beurre noir refusait de partir. Connor, lui, lui fit un clin d’œil discret, signe d’encouragement que seuls les deux hommes pouvaient comprendre. Enfin, Victor se retourna. Son œil droit avait laissé place à un bandeau noir qui lui donnait un air presque inquiétant. D’une voix faible, Dick murmura :

-Salut, les gars.

Il ferma les yeux. Il savait que ça allait être difficile. Il les avait abandonné. Mais le plus dur serrait sans doute de leur expliquer pourquoi.

-C’est tout ce que tu as à dire ?

Garfield avait lâché sa phrase, pleine de rancune et de tristesse. Victor quand à lui, ruminait en silence, lui lançant un regard noir.

-Écoutez, je… commença Dick.
-Tu es désolé ?

Victor serrait les dents et les poings.

-Oui. Je suis vraiment désolé. Pour vous tous et pour… pour elle.

Le regard de Dick se posa sur la tombe fraîche de Tara Markov.

-Tu n’oses pas dire son nom, Grayson ?
-Victor je… laisse moi t’expliquer.
-Expliquer pourquoi tu t’es taillé alors qu’on avait besoin de toi, sans rien nous dire, ni pourquoi ni pour aller où ? Expliquer pourquoi tu nous as abandonné pendant deux semaines face à des types cinglés qui ont tué Tara ? C’est ça, merde !? Hein ?
-Du calme, Vic.

Tula posa sa main sur le torse de l’athlète qui se dégagea aussitôt.

-Non, je me clamerais pas ! Putain, tu nous as mis dans une sacrée merde, Dick !
-Si tu pouvais te maîtriser, Vic, ce serrait cool.
-Ta gueule.

Dick soupira. Victor était l’un de ses meilleurs amis et même s’ils avaient déjà étaient en désaccord, mais la situation était telle que le jeune homme craignait le pire. Et cela arriva. Victor, d’un geste ample de la main droite, asséna au jeune justicier un coup de poing qui le laissa par terre.

-Merde, Vic !

Tula se précipita sur Dick et l’aida à se relever. A présent, un hématome aurait lieu et place sur sa joue gauche. S’époussetant tandis que Victor partait accompagné de Garfield, Dick interpella le noir américain :

-Attends ! Putain, Victor si tu savais comme je suis désolé. Putain, si j’avais été là… si…
-Ta gueule, merde ! Tonna Stone en se retournant.
-Laisse le parle, Victor.
-Pourquoi tu te la ramènes, Connor ? Qu’est-ce que ça peut te foutre que Tara soit morte et que Grayson n’ait pas été là, hein ?
-C’était ma petite amie. Et je crois que Dick a ses raisons pour nous avoir fossé compagnie. N’est-ce pas, Grayson ?

Dick acquiesça en fermant les yeux. Puis il sortit un CD de la poche de son imper’.

-C’est quoi ? Interrogea Tula en fronçant les sourcils.
-Une vidéo qui pourrait tous nous intéresser, y compris toi, Victor.

*

L’Anarchiste observait les clones face à lui en déclamant haut et fort, la caméra faisant un gros plan sur son étrange visage. Sous le masque, l’homme s’amusait, tuant égorgeant des clones identiques, débordés par cette créature si rapide et imprévisible. D’ailleurs, même la caméra avait du mal à le suivre dans ses cabrioles insensées, ce qui n’amusait guère ses adversaires, désemparés.

« Je sais que le Peuple aura beaucoup de mal à me suivre ainsi. Je sais qu’il aura beaucoup de mal à accepter ce changement brutal, alors qu’il est si bien dans cette routine. Routine totalitaire, certes, mais routine sympathique quand même. Je sais tout cela. Je sais que je ne peux le pousser à me suivre ainsi. Il a besoin de quelque chose. Il a besoin de quelque chose à suivre. De quelque chose en quoi croire. Il a besoin de quelque chose pour le faire se soulever. Il a besoin… »

Soudain, le justicier s’arrêta et regarda la caméra d’un œil aiguisé, comme un défi au téléspectateur. Puis il dévoila en arrachant le haut de son costume une dizaine de charges explosives tandis qu’une commande était apparu dans sa main. Son air joyeux ne le quittait plus. Il était comme en transe face à ses ennemis, face à leurs commanditaires, face au monde entier. Il était l’acteur principal de ces instants mémorables, de ces instants qu’il savait suivi. Le metteur en scène d’une fin comme il en rêvait. La mort spectaculaire qu’il se souhaitait. Un suicide fanfaron qui serrait un symbole, oui…

« …d’un symbole.
Le Peuple a besoin de savoir que quelqu’un s’est sacrifié pour lui. Il a besoin de savoir que quelqu’un croyait suffisamment en ce qu’il voulait pour la société qu’il a donné sa vie pour cette vision. Il a besoin d’un symbole, mon cher…Et vous m’avez donné les moyens d’en être un… »

Les clones reculaient déjà, effrayés, une armée désorganisée et affolée, réalisant la menace qu’était le justicier. Il allait mourir en martyr pour sa cause et ainsi passer à la postérité. Le réveil de la conscience des peuples. C’était son rêve.

« Oui, vous m’en avez donné les moyens !
Vous pensiez vraiment que je viendrais sans me douter de tout cela ? Vous pensiez vraiment que je n’avais pas prévus tout ceci ? Je suis l’Anarchiste. Je savais que vous alliez venir me tuer, et j’ai fais en sorte de l’utiliser pour moi. J’ai piraté les codes des caméras avant de monter ici, et je les ai transmis à des amis qui s’en servent maintenant.
Tout ce que vos caméras ont enregistrées, tout ce que vos Maîtres ont vus derrière leurs écrans…tout cela est à nous. Et nous l’avons envoyés sur Internet, mes chers…La connexion fonctionne toujours, faites risette à la caméra…Tout ceci passe sur le réseau, et bientôt vous ne pourrez plus arrêter cette vidéo…Tout le monde sait ce que vous avez fais…Tout le monde sait ce que vous voulez…Et maintenant… »

La vidéo en question continuait de tourner et les téléspectateurs pouvaient voir l’Anarchiste dans toute sa splendeur et qui finit sa tirade d’une voix ample, joyeuse et théâtrale :

« …tout le monde sait ce que j’ai fais, et ce qu’il faut faire. »

Puis une détonation monstre se produisit, des flammes léchèrent l’écran puis plus rien. L’écran de la télévision se transforma en un brouillard zozoté puis ce fut le noir total. Lorsque la lumière illumina le petit salon de la maison de Tula, on put découvrir Victor, Garfield, Tula, Raven et Connor assis sur le canapé, les yeux encore rivés sur l’écran, sensiblement marqués par les images qu’ils venaient de voir à l’instant. Quelques secondes passèrent avant que Garfield ne se tourne vers Dick.

-Comment est-ce que tu as eu cette vidéo ?
-L’Anarchiste l’a dit lui même, cette vidéo a été diffusé sur le net et reproduit un peu partout. C’est Batman qui me l’a fais découvrir, en fait.
-Batman !
-Oui. A Chicago je l’ai rencontré. Lorsque j’ai appris tout ça, que des types avaient fais assassiner une multitude de justiciers, je me suis interrogé, j’ai voulu… j’ai voulu tout abandonner en fait. J’avais peur, je me sentais si touché par tout… tout ces morts.
-Qui ont été tué en fait ? Interrogea Tula d’une voix étranglée, qui ne lui ressemblait pas.
-Hawkman, le type de Los Angeles. Il y a eu aussi le Punisher de New York. Des policiers avec des pouvoirs qui travaillaient pour le gouvernement et qui tentaient d’arrêter les criminels. D’autres êtres spéciaux dont les noms m’échappent aussi. Et puis il y a eu les Sept. Vous les connaissiez pas mais leur rôle était de défendre la Terre contre les… les démons. S’ils étaient encore en vie, alors peut être que… que Tara ne serrait pas… morte.

Dick déglutit. Garfield et Tula s’étaient levés, Raven observait l’écran de la télé, le regard vague, Connor et Victor restaient eux aussi interdit.

-Et il y a eu aussi Spider-man et bien sûr… l’Anarchiste.
-Qui sont les ordures qui ont fais ça ? Demanda Garfield.
-Ils se sont surnommés les Architectes, comme me l’a dit Batman. En fait, ils ont envoyé une bande de mercenaires faire le sale boulot et liquider tout ces gens. Ils étaient dirigés par un certain Norman Osborn, un caïd de New York.
-Je connaissais l’Anarchiste, murmura Connor, sortant de sa méditation. Bon sang, ces enfoirés doivent payés !

Se levant d’un bond, Connor surprit tout le monde. Lui d’ordinaire si détaché, arborait maintenant un air énervé.

-Je sais qu’ils doivent payés. Et ils paieront. Je pense d’ailleurs que la guerre des gangs était leur fruit. J’ai enquêtais en solo pendant quelques temps, d’où mon absence et j’ai découvert des choses… intéressantes.
-Comme quoi ? Demanda d’une voix rauque Victor.

Dick soupira et lâcha :

-L’existence d’un traître dans notre équipe.

 
 
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