Urban Comics
  Batman #11 : Choix (2)
 
Couverture : Geoff
Auteur : Ben Wawe
Date de parution : Mai 2006



Quatre semaines plus tôt.
Le sous sol de la maison Wayne, à Chicago.
Depuis des années maintenant, la propriété est pratiquement abandonnée, sans vie. Seul le majordome du propriétaire, Alfred, semble encore habité dans ces murs. Bruce Wayne, lui, ne fait que coucher dans sa chambre, passer sous la douche dans la salle de bains, et manger rapidement dans la cuisine. Le reste du temps, il ne le passe pas dans la maison.

Soit à son cher hôpital, soit dans les rues, soit dans le sous sol de la propriété. Car l’endroit recèle de secrets, qui sont réunis en majorité dans l’étrange cave de la maison. Celle du protecteur de la ville.
Elle est bien organisée, et assez impressionnante quand on y entre. Sombre, humide, on dirait une caverne…une tanière. La maison d’un animal, un animal qu’il ne faut déranger sous aucun prétexte, et qui n’hésitera pas à mordre et griffer les visiteurs inopportuns. C’est la maison du vrai Bruce Wayne.
La maison de Batman.

Et c’est là où était ce soir-là le médecin. Dans sa cave, là où il se sentait réellement chez lui. Après avoir conclu un pacte avec un des lieutenants de Cash qui avait décidé de devenir un traître, il était revenu chez lui, étudier le dossier qu’on lui avait remit. Et depuis qu’il avait posé ces quelques feuilles sur son bureau, recouvert de fiches, feuilles et photographies de criminels, le sourire n’avait pas disparu de son visage.
Il était heureux. Tout simplement heureux de sa trouvaille, et de ce qu’il allait pouvoir en faire.

« Bruce ?
- Mmh ? Qui va là ?
- C’est moi, Bruce. Alfred. »

Son majordome descendait tranquillement les escaliers menant à la cave, un verre de scotch dans la main. Wayne sourit en voyant cela. Il devait certainement être près de 23 heures. Alfred prenait toujours un scotch à 23 heures, avant de se coucher. Une vieille habitude héritée du temps où ses parents vivaient encore, et où Alfred prenait un tel verre avec son père, quand le reste de la famille était déjà couchée…

« Ah…oui, évidemment.
- Qui d’autre pourrait oser venir troubler le Batman dans sa cave tandis qu’il essaye de changer à jamais Chicago, n’est-ce pas ?
- Je me disais plutôt que seul mon employé pouvait connaître cet endroit…
- C’est vrai. Ça manque de femme, Bruce. Surtout dans votre vie.
- Je n’ai pas besoin de ce genre de conseils, Alfred.
- Parce que vous en avez besoin, maintenant ? Le Batman veut de l’aide ? Quelle révolution… »

Bruce sourit alors.
Alfred n’aimait pas qu’il soit Batman. Il n’aimait pas qu’il mette un costume et aille combattre le crime dans Chicago, en l’honneur de ses parents décédés. Mais le majordome n’essaye pas de l’en empêcher. Même si il réprouve cette idée, même si il a peur de lui…il sait qu’il ne peut pas empêcher le médecin de faire quelque chose. Et il sait aussi que le jeune Wayne a besoin de ça…que c’est une sorte de thérapie.
Donc, même si il réprouve ça…il le laisse faire. Et est même prêt à l’aider. Mais il ne se l’avouera jamais.

« Alfred…pas de ça ce soir, je te prie. Je n’ai pas la tête à ce genre de débats et de joutes.
- Comme chaque soir…
- Tu commences à me connaître.
- Ca fait un bout de temps, quand même…Bon, que puis-je pour vous ? Apparemment, vous avez besoin de mes conseils…
- Oui. Regarde ça. »

Wayne montra à son majordome le dossier rouge offert par le criminel au sourire monstrueusement grand. Plusieurs fiches étaient disposées sur le bureau. Noms, photographies, adresses, activités légales et illégales des lieutenants de la pègre de la ville…Tout ce qui était utile pour connaître et comprendre le réseau criminel de Chicago était disposé devant les deux hommes, et Alfred fit alors d’énormes yeux de surprise.

« Mais…mais qu’est-ce que…
- Je vois que ça fait son petit effet… »

Le médecin sourit devant l’air stupéfait de son employé.

« Il s’agit des informations clefs pour tous les membres importants et membres à responsabilités de la pègre. De la mafia, et de toutes les organisations criminelles. Avec ça, je peux vraiment agir…enfin !
- A…agir ? Mais comment ? Et comment avez-vous eu ça ?
- J’ai fais un pacte avec un homme de Cash qui voulait des facilités au cas où ça tournerait mal pour lui.
- Des facilités ? Comment ça ?
- Si il est blessé, ou si un de ses hommes l’est, je l’aiderais à se faire soigner au Wayne Hospital, et à ne pas être inquiété par la police.
- Quoi ?! »

Le majordome regarda son employeur avec frayeur. Que disait-il ? Etait-il devenu fou ? Il…il voulait aider les criminels ?!

« Mais…
- Je sais, Alfred. Je sais. Je n’aime pas faire ça non plus, mais…j’ai besoin de ce dossier. Il m’est indispensable pour faire ce que je veux dans la ville.
- Mais…et alors ?! Même si vous avez besoin de ça, jamais je n’aurais pensé que vous étiez capable de…ça ! Vous êtes Batman ! Vos parents ont été tué par des criminels ! Comment osez-vous vous…vous allier avec un de ces monstres ?
- Je…je sais… »

Wayne baissa lentement les yeux.

« Mais je dois le faire. Mon plan est plus important que mon orgueil, et que…
- Que la fierté de vos parents ?! Que vos valeurs ?! Que votre Humanité ?! C’est ça ? »

Alfred semblait s’énerver, et plus le ton montait, plus Bruce semblait rajeunir, retomber en enfance…comme quand il se faisait gronder par son père après une bêtise. Mais, alors que le point de rupture allait venir, alors que l’employé n’avait plus que quelques mots à dire pour faire fléchir son employeur, il s’arrêta, jetant un regard las et déçu sur Wayne.

« Je vais partir, Bruce. Je reviendrais demain matin. Je dois aller faire un tour dehors. Ca pue trop, ici…
- Alfred…
- C’est Monsieur Pennysworth, Monsieur Wayne. Je ne veux plus que mon prénom soit prononcé par quelqu’un qui ose faire ce que vous voulez…qui ose se trahir, et trahir ses parents décédés. »

Le majordome jeta un regard dur vers le médecin, et partit, laissant Bruce seul…seul face à ses doutes, ses peurs, et son plan…Ce plan qui nécessitait de passer outre ses valeurs, ses envies, sa fierté et son éthique. Ce plan qui venait de lui faire perdre son majordome, et potentiellement son plus proche ami…
Est-ce que ça valait le coup ? Est-ce que ça valait la peine de faire ça ? Est-ce que protéger la ville voulait dire sacrifier sa vie et ses valeurs pour ça ?

« Oui…Ca vaut bien ça… »

Wayne parla à voix haute, espérant se donner du courage ainsi.

« Oui…Il faut que je fasse ça. Il faut que ce plan se mette en application. Il faut que les criminels soient tenus en laisse. Il faut que je les contrôle…il faut que je puisse les manipuler comme je le veux, pour protéger les citoyens. Ces monstres doivent être sous surveillance. Je dois les ficher. Je dois les contrôler. Moi seul le peux… »

Le médecin sourit étrangement. Il avait raison, oui. La ville devait être purgée. Et le Batman allait le faire…le plus vite possible. Mais avant tout, il lui faudrait une base. Chez l’ennemi. Chez ses ennemis. Pour les connaître. Les contrôler. Les manipuler. Et, peut-être…les supprimer…








A deux rues de là.
Un appartement minable.
Loué sous un faux nom par un être qui sonne faux, aussi.
Cet être fut un homme, un jour. Mais il ne l’est plus, désormais. Il est devenu autre chose. Un symbole. Une idée. Une idée immortelle. Une idée qui ne disparaîtra jamais, et qui vaincra un jour. Du moins, c’est ce qu’il espère.

Mais ce n’était pas vraiment l’immortalité de ce qu’il défendait qui le troublait ce soir. Il avait posé des micros dans la cave de Bruce Wayne, se demandant pourquoi un médecin aussi important que lui n’apparaissait jamais dans les journaux people, et semblait si calme. C’était étrange. Trop étrange dans un monde comme le leur. Et il avait voulu enquêter sur cet orphelin qui avait refusé de se révolter, et semblait bien sage…
Et l’homme avait eu raison d’espionner le médecin. Il venait de découvrir le plus grand secret de Chicago : l’identité de son protecteur. Batman. Batman était Bruce Wayne, le directeur et médecin principal du Wayne Hospital. En un sens, c’était compréhensible et presque logique, vu la science et la richesse de Wayne…

Alors qu’il venait de faire cette découverte et qu’il souriait de cet heureux hasard, l’homme avait vu son sourire disparaître rapidement, à la fin de la tirade du médecin. Sa voix avait un accent de folie, et ses paroles faisaient frémir. Il voulait contrôler les criminels. Peut-être même les supprimer. Et avant tout ça, il voulait les ficher…c’était horrible.
Monstrueux. Horrible. Dangereux. Il n’avait jamais vraiment prit Batman comme un ennemi potentiel. Il savait que c’était le protecteur de Chicago, et qu’il essayait de combattre le crime dans cette cité. Avec plus ou moins de réussite.

Alors pourquoi disait-il ça ? Pourquoi voulait-il ficher les criminels, comme des bêtes ? Comme des esclaves ? Même si c’étaient des dangers publics, même si ils étaient monstrueux et qu’il fallait les stopper…ce n’était pas la solution. Batman allait se comporter comme eux. Et ça, il n’allait pas le laisser faire.
Il ne pouvait laisser quelqu’un établir une sorte d’Etat policier dans la ville. Il ne pouvait laisser quelqu’un devenir fou à ce point, et passer du statut de héros à celui de criminel. Il allait trouver pourquoi il était devenu ainsi. Il allait chercher comment il avait eu ce genre d’informations. Il allait l’arrêter, le stopper. Et il le ferait de toutes les façons possibles…

« Prends garde à toi, Wayne…Malgré tes bonnes intentions, tu pars du mauvais côté chemin. Mais ne t’en fais pas…l’Anarchiste sera là pour te faire retrouver la bonne route…Je le promets. »

En souriant, l’homme mit rapidement son masque entièrement noir, qui recouvrait totalement son visage. Entièrement vêtu de sombre, l’Anarchiste se leva et arrêta l’émission des micros de la cave de Bruce Wayne. Il avait du travail. Beaucoup de travail.
Ce soir, une nouvelle mission commençait pour lui. Ce soir, il allait commencer le sauvetage de la ville. Ce soir, l’Anarchiste allait commencer son combat contre le protecteur de Chicago, en espérant que la population ne se ralliera pas à lui…comme elle le faisait toujours, avec les fascistes et sécuritaires de toutes sortes…
 
 
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