Couverture : Geoff
Auteurs : Diablo & Ben Wawe
Date de parution : Février 2006
Courir.
Se dépasser.
Aller plus vite que ne le peut son corps.
Avaler les mètres, les toits, les gouttières, les rues.
Ne pas entendre les cris de douleur de ses muscles qui arrivent dans son cerveau. Il a autre chose à faire, de plus important. De beaucoup plus important.
Dent. C’est Dent la future victime de ce psychopathe. Il cherche dans la presse ceux qui sont montrés aux yeux de tous comme ces pêcheurs, ceux qui ne respectent pas les fameux Dix Commandements rapportés par Moïse et écrits par Dieu lui-même. Ce fou les suit, et le prochain est peut-être le pire : Tu ne tueras point. Il faut qu’il se dépêche.
Cinq meurtres ont déjà été commis. Lui et Gordon ont trouvés le lien entre chacun : les Dix Commandements. Le tueur sera repéré sous peu. Il sera arrêté sous peu. Il sera jugé sous peu. Et tué, certainement. Mais ce n’est pas le plus important, pour l’instant. Non. Ce qui fait courir celui que les criminels apeurés appellent le Batman n’est pas l’envie d’arrêter ce criminel dès ce soir, c’est l’envie de sauver un ami. Harvey Dent.
Harvey…
Bruce l’aidait dans ses enquêtes en tant que médecin légiste, et rapidement ils étaient devenus amis. Wayne se demandait même s’il n’allait pas tout lui dire…pour ses parents…pour son entraînement…pour son masque…Après tout, Dent était quelqu’un de bien. De confiance. Ce n’était pas un frimeur, un arrogant, un de ceux qui recherchent le pouvoir personnel. Non, c’était quelqu’un qu’il pouvait considérer comme un ami.
Et Batman allait tout faire pour le sauver, lui et sa femme.
A sa droite…des sirènes. Gordon, évidemment. Alors que le nouveau protecteur de Chicago saute de toits en toits avec son style inimitable et inimité, il avait prit le temps d’appeler l’inspecteur. Celui-ci travaillait comme lui, tard, pour comprendre la logique de ce tueur…et ils étaient arrivés aux même conclusions.
Les policiers n’arriveraient jamais à temps…Même s’ils n’étaient qu’à quelques mètres de la maison des Dent, ce quartier de Chicago était plein de petites rues, et ils ne seraient là-bas que dans dix minutes, environ. Batman, lui, y serait dans cent vingt secondes. Il serait seul pour protéger son ami et arrêter ce fou. Ce n’était pas la pire nouvelle de la journée…
Enfin, il arriva devant la maison des Dent, qui était tout ce qui était banal : un étage, deux poutres pour le retenir, deux fenêtres, une petite terrasse et…et un silence beaucoup trop pesant pour être normal. En se relevant avec sa cape qui ressemblait à une sorte de flaque noire, Batman calme sa respiration pour pousser à fond ses sens.
Il n’entendait rien.
Il ne voyait rien.
Il ne sentait rien.
Ce n’était pas normal dans un tel quartier et dans la maison du plus grand insomniaque de Chicago…Seigneur, pensa Wayne en s’approchant lentement de la porte, faites qu’il ne soit pas trop tard…
La porte s’ouvre lentement, la lueur blafarde de la lune éclaire l’entrée…le silence est oppressant. Bruce ne voit qu’un dégradé de gris, il tend l’oreille et n’entend qu’un bruit étrange à l’étage. Il ne se précipite pas, il veut étudier la situation, ne pas la dégrader. Si le tueur est encore là, c’est que Dent n’est pas mort…
Les marches de l’escalier ne craquent pas sous ses pas, il avance comme une ombre, analysant tous les bruits, tenant compte de tout. Un gémissement étouffé, le ronron du frigo, le vent… et toujours ce son étrange, comme quelque chose qui tombe sur des plumes… il est devant la porte de la chambre à coucher.
Il sait qu’à l’intérieur se trouve le tueur et son ami, ainsi que sa femme. Il allait devoir faire vite une fois dans la chambre. Le bruit venait de la droite, et vu l’accélération de celui-ci il devait passer à l’action…
Boom !!
La porte vola en morceau. A travers les éclats de bois, le Batman pu entrevoir la silhouette massive d’un inconnu surplombant un corps, qui semblait être celui de son ami. Sans réfléchir le dard file droit sur le cou de l’agresseur. Mais la surprise lui a fait changer de position et la lame se ficha dans la commode.
Un cri guttural jaillit de la masse imposante, qui se jette aussitôt sur le sombre justicier. Mais son attaque est évitée par le souple Bruce Wayne. Les deux adversaire se jaugent, se jugent, s’observent, tournant en rond comme des lions en cage. Une silhouette apeurée les observe, c’est Grace, la femme de Dent. Un gros scotch sur la bouche et les mains attachées dans le dos. Elle pleure, ses yeux rougis regardent avec autant d’effroi le tueur que Batman. Puis son regard dévie vers le corps de son mari. Les yeux de Bruce s’écarquillent, puis la détermination rend son regard vide, dénué de sentiments.
Car Harvey est défiguré, le fou lui a pelé la moitié du visage. C’était ça le bruit, les lambeaux de chair tombant sur la moquette autrefois couleur sable. Ce fou ne passera pas la nuit. Ses mains serrent deux poings américains. Il ne veut pas rater son coup, il veut en finir avec ce massacre.
« Pourquoi tu me combats ? Pourquoi tu m’empêches de terminer mon œuvre ? Pourquoi ? »
Mais l’ombre ne répond pas, ses dents sont si serrées que sa mâchoire menace de se briser.
« Pourquoi m’empêches-tu de prouver au monde à quel point il se fourvoie dans le pêché ? Pourquoi m’empêches-tu de prêcher la bonne parole à ceux qui l’ont oubliée ? Pourquoi m’empêches-tu de rappeler à ce peuple misérable les véritables règles du monde ?
- Assez. »
La voix de Batman tranchait le silence pesant de la pièce tandis qu’il jaugeait son adversaire. Il était immense, monstrueux…et se préparait à se battre comment le font les Marines. Cette stature, cette détermination dans les yeux…oui, c’était un pur produit des camps d’entraînement de soldats américains, et cela ne rassurait pas le moins du monde celui qui se trouvait sous le masque.
Sans attendre quelques secondes de plus, Wayne se jeta sur son adversaire. Il voulut feinter un coup de poing droit dans le visage, alors qu’il visait en fait par son genou gauche le ventre de son adversaire. Malheureusement, cela ne fonctionna pas vraiment, et le médecin fut projeté dans l’armoire ancestrale des Dent avant qu’il n’ait eu le temps de comprendre ce qu’il se passait.
« Chien…païen…hérétique…Je suis sûr que tu ne comprends même pas la portée de mon œuvre, la beauté du cadeau que je fais au peuple…Avec tous ces actes, je remontre au monde ce en quoi il faut croire…je remontre la force et la puissance de Dieu…
- Je pensais que le message de Dieu était Amour et Pardon…j’ai dû me tromper quelque part, alors… »
Parler. Parler pour avoir le temps de se relever et le désorienter. Parler pour pouvoir sauter dans les airs et le frapper au menton, alors qu’il allait avancer ses arguments. Parler pour oublier la peur, la douleur, la colère…
« Comment oses-tu faire cela ? Ne vois-tu pas le cadeau que je suis en train d’accomplir ? Ne vois-tu pas les bienfaits que j’offre à notre peuple ? Ne vois-tu pas cela ?! »
Il s’énervait. Batman sourit en évitant ses coups de poing rageurs qui brassaient de l’air. Il était fort, endurant, puissant…mais n’avait aucune technique, aucun art du combat. Alors que lui avait été entraîné par le meilleur lutteur qu’il connaissait…ce taré n’avait aucune chance. Aucune.
« Et pourquoi je devrais voir cela ? Tu as tué, torturé et massacré des gens qui ne t’avaient rien fais…
- Des monstres qui salissaient le nom de Dieu !
- Peut-être, mais la Loi ne les avait pas reconnus coupables.
- La seule Loi qui compte est celle de Dieu !
- Pourquoi Dent ? Pourquoi lui avoir fait cela au visage ? »
La colère était palpable dans les paroles de Wayne. Il tenta alors de se calmer, continuant de frapper à divers endroits sensibles le corps de son adversaire. D’ici quelques instants, il serait vaincu par ses nerfs, pincés à divers endroits précis. Mais ces quelques instants étaient très, très précieux, étant donné que Bruce fatiguait et que son ennemi frôlait de plus en plus son corps avec ses poings…
« Ce chien a envoyé des hommes à la mort…des enfants de Dieu qui respectaient ses préceptes !
- Des meurtriers racistes…
- Ils ne faisaient qu’éradiquer la racaille qui pervertit le Royaume de notre Seigneur ! Il était temps de montrer au monde l’horreur que cachait son visage, il était temps de montrer sa véritable Âme ! »
Le fou…il avait défiguré Harvey uniquement parce qu’il le pensait monstrueux à l’intérieur…La rage et la colère qui voulaient sortir en Batman explosèrent alors, le justicier ne pouvant les stopper encore. Trop d’émotions, trop de sentiments se mêlaient en lui maintenant…et ce fou devait être stoppé.
Le justicier de Chicago commença alors un mortel ballet autour de son ennemi, alternant les coups de poing, coups de pied, frappes de genou et coups de tête. Ses gestes étaient décuplés par sa tristesse de voir son ami ainsi, sa colère contre son adversaire, mais surtout par sa colère contre lui-même de ne pas avoir été là pour protéger Harvey Dent, celui en qui il avait le plus confiance dans la ville.
Après quelques instants, le Marine ne pu alors plus bouger, après avoir frappé dans le vent énormément de fois pour tenter de toucher Wayne, qui était vraiment intenable. Il tomba lourdement au sol, vaincu, tandis que celui qui l’avait arrêté soupirait, fatigué de ce combat et triste de ce qui était arrivé…
Batman s’approcha de son ennemi et le retourna, découvrant ses médailles de soldat sur lesquelles étaient gravées son nom : Bane. Etrange. Il avait déjà entendu ce nom-là quelque part…Mmh…Oui, il s’en rappelait maintenant…
Après les événements de New York avec le massacre de civils par une sorte d’homme préhistorique, Bruce avait fait des recherches sur l’identité de ce type. Un dénommé Kraven, qui avait été envoyé avec un commando en Afrique pour tuer un dictateur sur ordre de l’Administration du pays…Mais ils s’étaient fais piéger, et avaient disparus…
Bane avait été dans le commando. Qu’est-ce qui avait pu donc leur arriver ? Avaient-ils été torturés ? Leurs cerveaux avaient-ils été altérés ? Peut-être…apparemment, Kraven était revenu fou furieux d’Afrique. Bane, lui, était revenu avec sa folie chrétienne…qui sait comment serait le prochain du commando…
Soudain, alors qu’il était absorbé par ses pensées, Wayne entendit les portières de la police claquer. Ils étaient là. Ils allaient arriver et s’occuper des Dent. Bruce pourrait rester là, attendre Gordon, attendre les autres…profiter avec eux de la victoire, sourire, prendre une bière…mais…non. Il ne le pouvait pas.
Ce n’était pas une victoire. Dent était défiguré. Cinq personnes étaient mortes. Helena était morte…et il n’avait pas pu empêcher cela. Malgré son entraînement, malgré ses capacités…il avait faillit.
Tandis qu’il s’envolait dans les airs avec son agilité et ses grappins, Batman se promit deux choses : prendre soin de Harvey et…et tout faire pour que plus jamais Chicago ne subisse cela. Et il tiendrait parole. Il le jurait sur sa vie, son âme et celle de ses parents…