Auteur : Ben Wawe
Date de parution : Septembre 2006
« Harvey…
Harvey, mon Dieu, qu’est-ce que j’ai bien pu faire pour mériter ça ? »
Wayne Hospital.
Chambre de Harvey Dent.
Lundi, sept heures trente du matin. Les infirmières de nuit n’avaient même pas encore été remplacé que Bruce Wayne, le propriétaire des lieux, était déjà sur place, en blouse, prêt à opérer. Depuis une semaine, depuis qu’il avait affronté les hommes de Cole Cash après un combat avec L’Anarchiste, il avait reprit ses fonctions de médecin. De chirurgien. De propriétaire d’un des plus grands hôpitaux du pays, si pas du monde. De sauveur de vies.
Oui, il avait fait reprit ses fonctions. Il était redevenu le chirurgien, le médecin qu’il n’aurait jamais dû arrêter d’être. Il avait voulu être Batman. Il avait voulu sauver Chicago de tous ces parasites que sont les criminels et qui la dévorent peu à peu, mais il avait échoué. Lamentablement.
Wayne avait fomenté un plan pour pouvoir arrêter tous ceux qui font du mal à cette ville, mais il s’était fourvoyé. Il était allé dans une mauvaise direction. Il avait failli devenir quelqu’un d’autre…quelqu’un qu’il ne pouvait supporter. Un monstre. Un animal. Un…un criminel. Un monstrueux criminel…ceux qu’il détestait plus que tout au monde depuis qu’un être de cette race d’hommes avait tué ses parents, des années auparavant…
Mais heureusement, il avait été stoppé juste à temps.
Un être qu’il n’avait jamais vu jusque là lui avait montré qu’il allait dans la mauvaise direction, et il avait tout arrêté avant que ça n’aille trop loin, même si des policiers de la ville avaient été enlevés, séquestrés et menacés par les agents de son pire ennemi : Cole Cash. Heureusement, le nouveau Parrain de la ville avait été défait, mais Batman avait tellement perdu ce jour-là…Il avait eut une belle et grande leçon à ce moment-là, mais…mais le prix à payer avait vraiment été grand…
Il avait perdu foi en lui…
Il avait perdu sa confiance en lui…
Il avait perdu le respect de son identité et de ce qu’il faisait…
Mais pire que tout…il avait perdu des alliés…des amis…des frères d’armes. Gordon, le seul policier non corrompu de la ville, le détestait maintenant. Il lui en voulait plus que tout au monde pour avoir mit en danger ses hommes et les habitants de la ville, et ne lui ferait certainement plus jamais confiance. Bien sûr, leur amitié n’avait été que naissante et jeune, mais Wayne espérait beaucoup de choses de cela…Il pensait vraiment qu’ensemble ils pourraient faire de grandes choses, mais…mais c’était terminé, maintenant…Totalement terminé…
Au fond, Bruce le comprenait : il n’aurait jamais dû faire cela, et il aurait exactement eut la même réaction que lui à sa place. Bien sûr, ses idées partaient d’une bonne intention, mais il les avait très mal conduites, et Gordon ne voulait plus de son aide maintenant.
Pire encore, Wayne était pratiquement sûr que l’inspecteur le ferait arrêter si il remettait un jour son costume…Oui…C’était vraiment ce qu’il allait faire, il en était totalement convaincu…Gordon le détestait…Il le voyait comme un ennemi public…comme un être trop dangereux et trop perturbé pour lui permettre de rester en liberté dans cette ville pourrie jusqu’à la moelle…Et au fond…Au fond, il n’avait pas totalement tord…
Mais Gordon n’était pas le seul être qui manquait à Bruce Wayne. Même si l’amitié et l’aide du policier lui feraient énormément défaut si il décidait un jour de reprendre son costume, ce qui n’était vraiment pas sûr et établit, ce n’était pas ça le pire dans sa situation. Un autre homme lui manquait. Un autre homme l’avait quitté, et à raison.
Alfred. Alfred Pennysworth. Son majordome. L’homme qui l’avait aidé, qui l’avait apporté son assistance dans ce monde qu’il n’avait pas toujours comprit…n’était plus là. Il l’avait abandonné. Il l’avait quitté, et avait disparu de la circulation. Totalement. Wayne avait essayé de le retrouver, mais même avec les réseaux de Batman ou du directeur de l’hôpital…il n’avait pas réussit à le retrouver.
Alfred restait introuvable. Et au fond, il méritait cela. Il méritait d’être punit.
« Nhn… »
Harvey…
Harvey avait bougé.
Cela faisait des semaines qu’il était dans le coma : même si il avait eut une hausse dans l’efficacité des soins qu’on lui prodiguait au début, l’ancien procureur était rapidement retombé dans l’inconscience et un état critique. Il allait mal, et Wayne ne pouvait rien pour lui. Encore une fois, malheureusement.
Sous aucune de ses identités, Bruce n’avait pu aider son ami, et il ne le pouvait toujours pas.
En tant que Batman, il n’avait pas été assez rapide pour le sauver de l’attaque monstrueuse et totalement folle du serial killer qui avait fait frissonner de peur la ville durant plusieurs semaines, et même si il l’avait empêché Bane de tuer le procureur de Chicago, il avait été blessé…défiguré…et même l’énorme talent chirurgical de Bruce Wayne n’avait pu changer cela…
Malgré tout son art…Malgré tout son apprentissage…Malgré tout ce qu’il savait faire avec des bistouris…il n’avait rien pu faire pour son ami. Les nerfs de son visage avaient été touchés par l’attaque de Bane, et il ne pouvait rien contre cela…Même avec une greffe de peau d’un visage, rien ne pourrait être fait pour lui…rien…strictement rien…Et c’était vraiment ce qui désolait le plus le médecin principal de Wayne Hospital…
« Docteur Wayne ! »
La porte venait de s’ouvrir violemment sur une infirmière totalement sous le choc, les lèvres tremblantes et les gestes désordonnés.
Marla était quelqu’un qui avait été engagée une petite dizaine d’années auparavant, alors qu’elle venait juste de sortir de l’école. C’était quelqu’un en qui Wayne avait confiance, et il savait aussi qu’elle avait les nerfs solides. Très solides, même. Lorsqu’un train avait déraillé dans la ville et que les blessés avaient afflué dans l’hôpital, elle était restée de marbre. Fière. Droite. Elle avait résisté à la tempête et avait aidé à la survie de bien des personnes, ce jour-là.
En clair, la voir ainsi n’était vraiment pas quelque chose d’habituel. Pire encore : si Marla était tellement affolée, si sa voix était tellement brisée par la surprise et la peur…c’est qu’une catastrophe venait de se produire. Qu’une chose véritablement horrible venait d’arriver dans la ville de Chicago, et que ça venait de toucher immédiatement le Wayne Hospital, ce bon vieux bâtiment qui avait résisté à tant de crises déjà…
« Oui…
J’arrive immédiatement…
Mais chut, je ne voudrais pas qu’il soit troublé…Ce n’est pas encore le moment pour son réveil… »
Wayne se dépêcha de sortir de la pièce avec Marla, la trentenaire ne pouvant contrôler ses tremblements. Qu’est-ce qu’elle avait ? Quelle horrible catastrophe venait de se produire dans Chicago pour que l’infirmière la plus stable et la plus calme de l’hôpital se laisse aller ainsi ? Combien de victimes venaient-elles d’arriver en même temps pour que la jeune femme craque ainsi, sans même avoir annoncé ce qu’il se passait ?
Le chirurgien referma calmement la porte derrière eux, et tourna rapidement la tête vers le couloir. Rien. Il n’y avait rien. Ni blessés se vidant de leur sang partout, ni brûlés s’entassant un peu partout. Il n’y avait qu’un patient qui attendait que l’anesthésie fasse effet avant que le docteur Green ne vienne s’occuper de lui, et rien d’autre.
Apparemment, ce qui troublait Marla n’était donc pas une catastrophe et des dizaines de victimes, mais autre chose. Alors qu’est-ce que c’était ? Quelle chose horrible pouvait donc troubler autant la jeune femme pour qu’elle se laisse aller ainsi ?
« Je…
Docteur Wayne, mon Dieu…
C’est…c’est horrible ! Monstrueux ! Mon Dieu…mon Dieu ! Comment est-ce possible ? Comment est-ce possible ?! Qu’a…qu’allons-nous devenir ? Que va devenir la ville ? Je…mon Dieu ! Mon Dieu ! »
Elle était affolée…totalement hors de contrôle. Bruce posa doucement ses mains sur les épaules de la jeune femme brune à ses côtés, et lui offrit son plus beau sourire en commençant lentement à parler, ses yeux sombres plongés dans le regard de l’infirmière qui tremblait comme une feuille d’arbre un après midi d’automne, quand le vent souffle…
« Marla…
Marla, calmez-vous. Inspirez et expirez doucement. Fermez les yeux. Pensez à une étendue boisée, à des arbres verts et calmes. Le vent souffle lentement dans les feuilles. C’est la paix. La paix toute bête, toute calme. La paix intérieure, Marla. Tout simplement. Pensez-y. Calmement. Doucement. Lentement. Voila. Régulez votre respiration…doucement…calmement… »
Elle faisait une crise d’angoisse, et Bruce ne pouvait se permettre de perdre sa meilleure infirmière alors que l’hôpital était certainement dans une phase critique.
Ce n’était pas officiel, mais Marla était la clef de voûte de toute l’équipe. Toujours souriante, toujours douce, toujours…calme. Elle apportait le supplément d’âme qui faisait toujours la différence dans les équipes et les groupes, et le Wayne Hospital était totalement dépendant d’elle et de ce qu’elle faisait pour améliorer l’image et l’entente entre les différents médecins et infirmiers. Ils avaient besoin d’aide. Tous. Et si elle commençait à flancher, les autres ne tarderaient pas…Et si tout l’hôpital se laissait aller, si plus personne ne se contrôlait…La ville deviendrait encore pire que si Batman avait réussit à mettre son plan à exécution avant que L’Anarchiste ne l’arrête…
« Je…
Merci Docteur…Merci beaucoup…Ca…ça commence à aller mieux, maintenant… »
Les mains toujours posées sur les épaules de Marla, Wayne pouvait voir qu’elle reprenait lentement le contrôle de son corps et de ses émotions. Elle semblait reprendre ses forces, reprendre sa conscience de ce qu’il s’était passé, mais cela était certainement précaire. Bruce devrait faire attention à elle dans les heures à venir, même si il aurait très sûrement des choses plus importantes et plus décisives à faire si ses soupçons étaient fondés…
« Bien…Qu’est-ce qu’il y a alors, Marla ? Qu’est-ce qu’il se passe pour que ma meilleure infirmière se mette dans un état pareil ? L’arrivée d’une rock star défigurée ? »
Marla sourit légèrement, en même temps que le chirurgien. Elle déglutit lentement, ferma les yeux pour humidifier ses prunelles, avant de parler d’une voix plus faible et difficile qu’auparavant, le regard fixé vers le sol, n’arrivant pas à croiser celui du propriétaire des lieux et du bâtiment.
« Je…Il…Il y a eut un mort, Docteur Wayne…
- Un seul ? »
Bruce était choqué.
Une seule victime ? Un seul cadavre ? C’était ça qui choquait tellement la jeune femme ? C’était ça qui avait fait exploser les nerfs de son infirmière la plus calme et la plus solide ? Un homme mort ? Un seul ? C’était vraiment ça qui avait transformé Marla en une boule de nerfs presque incontrôlable ? Un seul corps sans vie ?!
« Je…Oui…
- Qu’est-ce qu’il y a, alors ? Qu’est-ce qui a bien pu vous troubler ainsi ? Ce n’est qu’un seul homme mort, Marla…Bien sûr, je sais que c’est toujours difficile et toujours violent de voir quelqu’un de décédé, mais ce n’est pas la première fois…ni la dernière, d’ailleurs…que nous voyons quelqu’un qui a perdu la vie, Marla…
- Mais…mais ce n’est pas n’importe qui, Docteur Wayne…
- Ah ? Mais qui est-ce alors, Marla ? Qui est donc décédé pour pouvoir vous mettre dans un tel état ? »
Marla frissonna encore une fois, avant de lentement lever les yeux vers celui qui payait son salaire. Elle avait peur. Vraiment peur.
Si avant, la jeune femme avait été troublée par ce qu’elle devait annoncer à Wayne, là on voyait vraiment qu’elle était terrifiée…totalement terrifiée. Et Bruce n’avait vraiment pas l’habitude de voir ça dans les yeux de ses employés, même si il n’était plus vraiment présent dans le bâtiment depuis ces dernières semaines…
Mais il était au moins sûr d’une chose, malgré ses absences à répétition ces derniers temps : jamais Marla n’avait été troublée par des patients, ou jamais elle n’avait eut peur. Quelque chose se passait, ici. Quelque chose d’horrible et de monstrueux, qui risquait de changer énormément de choses dans Chicago…
« Je…C’est Cash, Docteur Wayne…
- Cash ?!
- Oui, Docteur Wayne…Cole Cash…Il…il est mort…Une…une balle dans le crâne…Et…et celui qui l’a amené…Il…il a…il a dit que…
- Oui ? Qu’est-ce qu’il a dit ?
- Que…que ça ne serait pas le dernier, et…et que personne…que personne ne serait plus en sécurité…Non…plus personne…Plus personne à l’abri dans Chicago…à…à cause de ça…Simplement à cause de ça…
- Mon Dieu… »
Wayne ne disait rien.
Il ne pouvait rien dire. Elle avait peur…et elle avait raison. Cole Cash était mort. Mort ! Celui qui tenait les rênes de la criminalité dans la ville, celui qui contrôlait plus ou moins les criminels dans Chicago…avait disparu. Une balle dans la tête. Il était mort. Il avait cessé de vivre. Ce qui voulait dire que l’enfer allait se déchaîner sur la ville. Totalement. Les crimes allaient se multiplier. Les vengeances allaient exploser. Les meurtres vont devenir de plus en plus sanglants.
Les ennemis de Cash voudront prendre une part du gâteau. Les hommes de Cash vont vouloir garder leur territoire et venger leur chef. Celui qui avait amené le corps sans vie de l’ancien Parrain de la ville avait raison : il n’était pas le dernier. Juste le premier. Des dizaines d’autres allaient le suivre…Des centaines peut-être, même…Et rien ne pourrait les stopper…Rien…Strictement rien…
Ou…
Ou bien si.
Quelque chose pouvait stopper ça. Quelqu’un, pour être exact. Un homme. Un être surnaturel. Une légende venue des profondeurs de Chicago pour apeurer de la pire des façons qui soient les plus grands criminels de la ville. Un nom. Un seul nom qui faisait frissonner tous ceux qui osaient menacer la vie ou les biens d’autrui. Batman. Batman…
Lui seul pouvait sauver la ville. Lui seul pouvait arrêter les criminels avant qu’ils n’aillent vraiment trop loin. Ca allait commencer. Les armes étaient en train d’être chargées. Les hommes se préparaient à une guerre. A une guerre des rues. Bruce Wayne ne pouvait laisser faire cela. Il ne pouvait laisser cette ville exploser, et voir des corps mourir par centaines alors qu’il peut faire quelque chose contre cela.
Il est Bruce Wayne. Il est Batman. Il est une légende, un moyen de peur et de répression contre les criminels de la ville. Cole Cash est mort. Chicago va être à feux et à sang…mais il fera tout pour empêcher cela. Tout. Même reprendre son costume, et se rappeler tout ce qu’il a perdu et toutes les horreurs qu’il a faites avec…
Ca lui fera mal. Ca le fera souffrir. Ca le fera frissonner quand il se rappellera tout ce qu’il a fait avec ce costume sur le dos, lorsqu’il sentira le cuir et l’odeur masculine sur les habits. Mais il n’a pas le choix. Vraiment pas le choix. Chicago risque de périr. Des hommes et des femmes vont mourir. Des innocents, surtout. Et il ne peut pas laisser faire ça.
Il va souffrir, mais…il est habitué. Il connaît la souffrance, la douleur. Il va l’endurer. Encore. Et encore. Pour la ville. Pour Chicago. Pour les innocents. Après tout, c’est tout ce qui compte…les innocents. Il l’a été, jadis. Il ne l’est plus. Mais ce n’est pas grave. Il se battra quand même pour eux…jusqu’à la mort…et au-delà…vu qu’il est dit que les légendes ne meurent jamais, et qu’il en est une…Batman…Batman, celui qui va stopper les crimes dans cette ville avant qu’ils n’explosent…Du moins, si on lui laisse faire cela…Ce qui n’est vraiment pas sûr, vu tout ce qu’il a fait et toutes les personnes qu’il a trahit…Mais ce n’est pas grave…Il s’en sortira…Comme toujours…Comme toujours…