Auteur : Ben Wawe
Date de parution : Novembre 2007
« Ce n’est pas lui qui va être puni aujourd’hui, connard…c’est toi ! »
Batman sentit ses muscles gonfler tandis qu’il disait ça. Toute sa rage, toute sa colère envers cet homme, cet être qui avait enlevé son ami et l’avait torturé voulaient exploser à ce moment-là, et il n’avait pas vraiment envie de les stopper. L’adrénaline coulait dans ses veines encore plus rapidement que d’habitude, tandis qu’il faisait fi de la douleur à sa cuisse droite pour se jeter sur son adversaire, sur celui dont il désirait tant la mort depuis des jours, sans jamais accepter cette pensée.
« Oh, oh…on dirait que le Grand Méchant est en colère ! »
Il n’écoutait pas ce que ce cinglé disait, trop occupé à tenter de calmer ses sentiments qui le commandaient de réduire en bouillie cet homme monstrueux. Mais à cause de ça, à cause de son trouble et surtout à cause de la souffrance de sa cuisse droite et à l’arrière de son crâne, Bruce était déconcentré, et il ne vit pas le coup venir, s’en voulant immédiatement de n’avoir pas été assez professionnel sur ce coup-là.
En effet, son ennemi, si il avait perdu son scalpel quelques secondes plus tôt, avait mit sa main dans son dos…et en avait sortit un autre ! Il avait profité du saut de Wayne pour l’agresser. Evidemment, le justicier de Chicago réussit à éviter que son torse ne soit touché par l’objet tranchant, mais celui-ci pénétra violemment dans la chair de son bras gauche, tandis qu’il retombait sur le sol et roulait pour éviter de recevoir d’autres coups.
« Nughn… »
La douleur était grande, et il était encore plus handicapé qu’avant. Si la détermination de sauver Harvey Dent était là et grande, si l’envie de stopper ce fou après avoir stoppé Antonio Simeoni était plus que présente, il devait se rendre à l’évidence : son corps aurait énormément de difficultés à pouvoir livrer le combat qu’il allait se dérouler entre eux.
Le chirurgien fut frappé par cela, et alors qu’il se demandait comment il pourrait se sortir d’une telle situation, la voix nasillarde et désagréable du fou lui arriva aux oreilles. Il releva les yeux, et vit ce dingue s’approcher lentement de lui, faisant tourner son scalpel entre ses doigts, un énorme et monstrueux sourire aux lèvres.
« Oh, oh…on dirait que le Grand Méchant a mal, Harvey ! »
Il se tourna vers Dent, qui était dans l’inconscience…ou peut-être même pire. Bruce frissonna en pensant à l’idée qu’il pouvait être venu quelques secondes trop tard…il frissonna en songeant qu’il avait eu quelques secondes en trop pour sauver son ami, et que le dernier coupé porté par le malade devant lui avait été mortel.
Néanmoins, il chassa rapidement ces pensées de son esprit. Dent n’était pas mort, ou du moins, il n’en savait rien. Et il fallait qu’il se concentre sur ce qu’il se passait devant lui. Il fallait qu’il se concentre sur sa survie, et sur rien d’autre.
« Tu as besoin d’aide, Grand Méchant ? Tu veux que je fasse quelque chose pour toi ? »
Wayne, dont le dos était collé au mur de la pièce sombre de ce bâtiment qu’il ne connaissait pas, lançait un regard mauvais à l’homme qui s’approchait de lui. Sa cuisse droite était en sang et le tirait, son crâne était en feu et son bras gauche était pratiquement immobilisé par une même douleur.
Le bilan était mauvais. Et il risquait de s’alourdir, malheureusement.
« Tu veux que je te fasse retrouver le sourire ? »
Que pouvait-il faire, maintenant ? Il était blessé. Il était exténué. Il n’avait plus d’arme. Son corps ne répondait plus à ses demandes, et il était en face d’un fou qui avait peut-être tué le seul être, hormis Alfred, à qui il tenait réellement, et qui était encore vivant…du moins, c’était ce qu’il espérait.
Sa situation était totalement désespérée. Et il n’avait aucune solution pour s’en sortir.
Que pouvait-il faire, vraiment ? Ce dingue allait le torturer et le tuer, comme il avait déjà commencé à le faire…il allait lui faire subir à nouveau ce qu’il avait vécu auparavant. Wayne s’en rappelait. Il s’en rappelait même très bien. Ces longs, très longs moments de pure souffrance, de pure douleur qu’il avait dû subir avant, quand il avait été prisonnier avant que le pseudo Cole Cash ne vienne faire son fric.
Oui. Il se rappelait parfaitement de tout ça. Il se rappelait parfaitement de sa douleur. Il se rappelait parfaitement des visages des victimes de ce fou. Il se rappelait très bien des larmes de la famille d’Harvey Dent, qui lui avait demandé de le retrouver. Il se rappelait très bien l’horrible cri de son ami.
Et il sut alors quoi faire.
« Ne t’en fait pas, Grand Méchant…Je vais t’aider…Je suis là pour ça…Vois comment Harvey est content, maintenant…Vois comment il est heureux du traitement du Joker…Ne t’en fait pas…Toi aussi, tu vas être content et heureux comme ça… »
Alors que le fou était juste au-dessus de lui, son scalpel dans la main, alors qu’il allait le frapper aux visages comme pour toutes ses autres victimes, alors qu’il pensait avoir la partie en main et avoir gagné sur toute la ligne…une rage interne et monstrueuse s’empara du corps de Batman, et celui-ci leva violemment sa main droite pour écraser le scalpel entre ses doigts, et par la même écraser la main de son adversaire.
« RAAAARGHHHH !!! »
Il poussa un hurlement bestial tandis que le CRAC de ses os détruits venait de se faire entendre, et que justicier de Chicago le faisait violemment tomber par terre. Surprit par une telle attitude, vaincu pour le moment par la douleur qui était apparue dans son corps sans qu’il ne l’ait prévu, ce dingue qui se disait être le Joker s’écrasa le nez sur les dalles nues de la pièce dans laquelle ils se trouvaient, et qui représentait plus la mort et l’horreur qu’autre chose.
« Non. Je ne veux pas que tu me rendes heureux…Joker. »
La voix de Batman était terriblement froide et dure. Malheureusement, à cause de sa souffrance et de sa douleur, à cause de sa crise de stress, il était en train de retomber dans ses plus mauvais penchants. Lui qui croyait avoir oublié tout ça, lui qui croyait avoir réussi à se sortir de ses problèmes psychologiques se voyait en train de replonger dans cette horreur…et il n’avait pas vraiment envie d’arrêter ça.
En fait, même si il savait que c’était mal, même si il savait qu’il ne devait pas faire ça et même si il savait qu’il devrait s’arrêter avant qu’il ne soit trop tard, Bruce Wayne trouvait un certain plaisir à faire ça, et un certain contentement.
Ce dingue était responsable de dizaines de morts. Il avait torturé jusqu’aux confins de l’horreur son ami, et l’avait torturé lui aussi. Pourquoi ne pourrait-il pas recevoir une juste punition par une de ses victimes ? Pourquoi ne pourrait-il pas réellement affronter un de ceux qui étaient passés entre ses mains ? Pourquoi ne pourrait-il pas subir le juste courroux d’un de ceux qu’il avait fait souffrir ?
Pour lui, à ce moment-là, il n’y avait pas de réponses à ces questions. Et il n’avait pas envie de les trouver, de toutes façons…
« Je veux que tu saches ce que ça fait d’être de l’autre côté… »
Il réussit à se relever, et s’approcha du Joker, qui avait du mal à se relever, sa main détruite par la force de Batman et son nez brisé. Il allait, d’ailleurs, réussir à se remettre sur ses jambes quand son ennemi était sur les siennes, et celui-ci lui donna un violent coup dans le dos, le rejetant à nouveau sur le sol tandis qu’il continuait à parler de sa voix terriblement froide et terrifiant.
« Je veux que tu saches ce que ça fait de souffrir… »
Le justicier tomba lourdement, les genoux en avant, sur le Joker, qui poussa un râle de souffrance alors que le corps de son adversaire s’écrasait sur son dos. L’homme masqué appuya alors encore plus avec ses genoux sur le bas du dos de son ennemi, tandis que les paroles sortaient toujours de sa bouche, lui rappelant ses pires heures mais n’ayant pas vraiment envie de s’arrêter…l’homme sous lui avait fait trop de mal à ses amis, il lui avait fait trop de mal pour le laisser partir sans une punition. Sans une très bonne punition.
« Je veux que tu saches ce que ça fait de prier pour que ça s’arrête… »
De sa main droite, encore, il prit la main libre et non réduite en chair et os détruits de celui qui avait torturé jusqu’à la folie son meilleur ami. Un sourire cruel apparut sur son visage, tandis qu’il tenait avec sa main gauche le poignet du Joker, et que ses doigts gantés se posaient sur l’index de sa victime actuelle.
« Je veux que tu saches ce que ça fait de prier pour mourir… »
D’un geste sec, il craqua et cassa le doigt du Joker. Un cri primal s’échappa alors de la gorge inondée par le sang glissa du nez brisé du fou, et celui-ci tenta de faire tomber son adversaire, mais il tint bon. Il posa ensuite ses doigts sur le majeur de sa victime, qui frissonna en sentant le contact du cuir sur sa peau.
Il cassa encore le doigt de son ennemi, et celui-ci cria encore plus fort. Batman posa à nouveau sa main sur un autre des doigts du Joker, le petit doigt pour être exact, mais il n’en éprouvait aucun plaisir. Alors qu’il avait apprécié lui faire mal quelques secondes plus tôt, alors qu’il aurait pensé qu’il aurait aimé entendre les hurlements de douleur du Joker…il n’y avait rien. Il ne ressentait aucun plaisir.
Et pire encore…il avait même l’impression de détester faire ça.
Alors qu’il allait casser le petit doigt de son adversaire, Bruce s’arrêta alors. Il ne comprenait pas pourquoi il n’aimait pas ce qu’il était en train de faire…après tout, c’était ce que ce monstre méritait. C’était ce que cette ordure devait subir pour tout ce qu’il avait fait, pour toute la douleur qu’il avait créée.
Et en plus, c’était ce qu’il avait aimé faire, quand il s’était laissé dominer par son côté sombre…par sa double face. Alors pourquoi ça ? Pourquoi hésiter maintenant, et ne pas se sentir à l’aise ?
Au fond, en fait, Wayne savait très bien pourquoi : il n’était pas ainsi. Il n’était pas une de ces horreurs qu’il affrontait et stoppait. Il n’était pas quelqu’un qui éprouvait du plaisir à faire du mal aux autres, même aux criminels. Bien sûr, il était tombé une fois dans l’enfer et l’abîme, mais…il en était remonté. Il avait remonté la pente.
Et il savait qu’après ça, il ne pourrait plus jamais tomber. Que plus jamais il ne redeviendrait ce monstre. Et que cet instant ne dérogeait pas à cette règle.
Soupirant lourdement, à la fois malheureux de ne pouvoir donner une véritable punition au Joker et heureux de se savoir assez humain et assez sain d’esprit pour ne pas tomber dans l’horreur sans nom qu’il avait connue quelques semaines plus tôt, le chirurgien relâcha la main de son adversaire, avant de reprendre la parole d’une voix extrêmement froide et dure, mais sans le côté sadique et vicieux qu’il y avait eu auparavant dans ses mots.
« Oui, je veux que tu saches ça. Pour te rendre compte à quel point nous sommes différents. A quel point je suis meilleur que toi. »
Avec difficulté, le justicier de Chicago se releva, ressentant toute la souffrance de son corps le tirer. Mais ce n’était pas grave. Bien sûr, il avait mal, mais il venait de réussir à chasser une nouvelle fois ses démons, et à comprendre qu’ils ne pourraient plus jamais le hanter.
Oui, il aurait souvent encore envie de redevenir l’horrible Batman qui avait tant fait peur à Chicago. Oui, il aurait souvent encore envie de tuer, de mutiler et de torturer des criminels. Mais il ne le ferait jamais. Il était au-dessus de ça. Il était au-dessus de ces concepts. Il était…
« ARGH ! »
Il était blessé. Une nouvelle fois.
« Que… ? »
Retombant lourdement au sol, Wayne jeta un coup d’œil à son dos et se rendit compte que le scalpel qu’il avait arraché de la main du Joker avec son Batarang était désormais planté dans son épaule droite ! Après la cuisse et le bras, voila que cet enfoiré venait de le frapper à l’épaule, et de l’handicaper encore plus qu’il ne l’était !
« Mais…
- Oh, oh…Le Grand Méchant a voulu jouer… »
Toute trace d’humour ou de folie « douce » avait quitté la voix du Joker. Celui-ci parlait désormais avec un ton sec, froid et terrifiant, et Bruce comprit de suite qu’il montrait désormais son vrai visage. Avec difficulté, il arracha l’arme blanche plantée dans son épaule, avant de se tourner pour voir son adversaire…et de sentir la peur apparaître violemment dans son ventre, une nouvelle fois.
Ce fou était véritablement monstrueux et terrifiant, à ce moment-là.
Debout devant lui, les doigts de sa main gauche détruits et sanguinolents, deux de son autre main semblants être morts (et ils l’étaient pratiquement, vu que Bruce les avait brisés quelques secondes plus tôt), il observait son ennemi. Son sourire jovial avait disparu de son visage, mais avait été remplacé par un autre, beaucoup plus sadique, froid et horrible.
En le voyant, ainsi, le chirurgien pensa à Jack Nicholson dans Shining, ce film qui l’avait terrifié dans sa jeunesse et son adolescence. Il grogna en essayant de rassembler ses forces, mais à nouveau, son corps refusa de lui obéir. Et il ne pourrait pas compter sur sa rage, cette fois-ci, pour s’en sortir…Il était à la merci du Joker, et il le savait…
« Le Grand Méchant a voulu me prouver qu’il savait faire mal…Le Grand Méchant a voulu me montrer qu’il était digne de moi…D’accord, Grand Méchant…j’ai compris…Je sais que tu es digne de moi…que tu es digne de mon Art… »
Lentement, avec toute la difficulté qu’il pouvait avoir vu son corps aussi rongé par la douleur et la fatigue, le fou avança vers Batman. Celui-ci ne savait pas quoi faire, à nouveau. Ses muscles étaient raides et usés, la souffrance était présente dans toutes ses veines et toutes les parties de son être, et ses blessures commençaient à perdre de plus en plus de sang.
Si ça continuait ainsi, il allait bientôt tomber dans le coma à cause de ça…et il ne pouvait se le permettre. Harvey comptait sur lui. La ville comptait sur lui. Il ne pouvait les laisser tomber.
« Je sais que tu mérites le meilleur de moi-même… »
Le Joker approchait et parlait toujours, mais il ne l’écoutait plus.
Seules comptaient ses pensées. Seuls comptaient ses souvenirs. Ceux de Harvey. Ceux des victimes de ce fou. Avant, ça lui avait servit à s’énerver, à sortir de son état de stress pour devenir dingue et faire du mal à son adversaire. Mais ça n’avait pas été utile. Il n’avait pas besoin de ça pour retrouver ses forces. Il n’avait pas besoin de redevenir l’horrible Batman pour vaincre son ennemi.
Il avait simplement besoin d’être ce qu’il était. Il avait simplement de se rappeler ce qu’il était. Ce qu’il incarnait. Ce qu’il pouvait être pour des gens comme Harvey Dent ou ceux qu’il avait sauvés durant la guerre des gangs. Et tous les autres.
« Je sais que tu mérites de mourir avant tous les autres… »
Il était leur sauveur. Il était leur héros. Il était celui qui avait toujours été là pour eux, et qui ne pouvait les décevoir. Non. Il ne pouvait pas les décevoir. Et Bruce n’avait pas besoin de s’énerver pour y parvenir. Il n’avait pas besoin d’une rage stupide. Il avait juste besoin d’être lui.
Il avait juste besoin d’être Batman.
« Non. »
Le Joker, qui n’était plus qu’à un mètre de lui, s’arrêta en entendant cette réponse. Lui qui était si sûr de lui eut un moment d’hésitation, et cela suffit à Wayne pour reprendre le contrôle de la situation.
Il avait le scalpel utilisé précédemment contre lui dans la main, et il comptait bien s’en servir.
« Non, tu ne vas rien faire de tout ça. »
Son adversaire reprit lentement sa marche, mais c’était déjà trop tard. Avec ses années d’entraînement, il réussit, malgré la fatigue et la souffrance, à lancer l’arme blanche vers son ennemi. Celui-ci sentit alors lame pénétrer violemment dans sa poitrine, et recula de quelques pas, un râle de douleur s’échappant de sa gorge, en même temps que l’incompréhension apparaissait sur son visage.
« Mais…Mais…
- Tu ne vas pas mourir. »
Avec difficulté, Bruce se releva. Ses deux bras le tiraient, sa cuisse le faisait souffrir, mas il ne pouvait pas rester là à ne rien faire. Son tir avait été terriblement précis, et il devait faire quelque chose si il voulait que le Joker vive. Et il le voulait. Cette ordure devait aller devant la Justice. Il devait faire face à ses victimes.
Et il devait payer. Oui. Il devait payer pour tout ce qu’il avait fait.
« Je vais te soigner, et…
- Mais c’est impossible… »
Le Joker avait une attitude étrange.
Il observait dubitatif la lame coincée sur sa poitrine, semblant ne pas comprendre comment il avait pu être touché. Wayne s’approchait lentement de lui alors qu’il reculait, et le premier n’appréciait pas vraiment ça. Un mauvais pressentiment apparut dans son esprit, tandis qu’il levait avec douleur une de ses mains pour attraper son adversaire, au cas où.
« On…On voulait que je réussisse…Dieu voulait que je réussisse…
- Je vais t’aider…
- Non ! »
Le médecin ignorait comment ce dingue pouvait parler ainsi avec une telle lame bloquée dans la poitrine, mais sa résistance était impressionnante…et aussi très inquiétante. Le fou releva alors des yeux complètement pris par sa folie, et lui cria dessus avec une rage et une haine affichées, ce qui bloqua pendant quelques secondes l’avancée de Batman, plus par réflexe qu’autre chose.
« C’est ta faute ! C’est…c’est un test ! On m’envoie le Grand Méchant pour savoir si je suis assez déterminé ! Si je suis digne de ma mission ! Mais je suis digne ! Je suis le seul digne ! Je suis celui qui sauvera le monde ! Qui rendra le bonheur aux gens !
- Attends…
- Non ! »
Bruce reprit son avancée, mais le Joker tourna la tête vers une des fenêtres fermées par du bois…et Wayne comprit immédiatement ce qu’il voulait faire. Et il n’aimait pas ça.
« C’est un test ! Et je suis digne ! Et je vais le prouver !
- Ne fait pas ça !
- Je suis digne ! Je suis digne ! »
Batman voulut attraper son ennemi, mais celui-ci, malgré l’arme plantée dans sa poitrine, courut vers la fenêtre fermée. Il explosa le bois cloué dessus et détruisit la vitre, avant de tomber apparemment dans le vide, vu le long cri que le justicier put entendre.
Se traînant le plus vite possible, il arriva finalement à la fenêtre, et jeta un coup d’œil en bas. Sous lui se trouvait une longue traînée d’eau verdâtre, où plusieurs tuyaux se déversaient. Quelques autres regards lui permirent alors de comprendre où il était : il se trouvait dans une usine abandonnée, avec quand même un système d’écoulement des eaux encore actifs. Et certaines choses devaient être encore dans les tuyaux qui faisaient partir l’eau de pluie, vu la couleur qu’avaient les liquides qui tombaient dans la petite rivière au sol.
« Hum… »
Aucune trace du Joker n’était visible, et après quelques minutes d’observation, Bruce comprit qu’il était certainement mort…personne ne pouvait survivre à ça, finalement. Il soupira lourdement, avant de se tourner vers Harvey Dent.
« Nughn… »
Un énorme sourire se dessina sur le visage de Wayne alors que son ami venait de pousser un petit grognement, signe qu’il était vivant. Il poussa un autre soupir, cette fois-ci de soulagement, avant de s’approcher de son ami, pour enfin le libérer de ces chaînes…pour enfin le sauver…pour enfin tenir cette promesse qu’il s’était faite et qui le torturait depuis des semaines…
« C’est fini, Harvey…C’est fini… »
Une semaine plus tard.
Toit de la Cathédrale du Saint-Nom. Bruce allait mieux. Ca n’était que sa deuxième sortie depuis l’horrible nuit où il avait finalement sauvé Harvey Dent, mais déjà ses réflexes semblaient être revenus. Bien sûr, sa cuisse et son épaule droite et son bras gauche le faisaient toujours un peu souffrir et le gênaient, mais il allait mieux. Et pas que physiquement : sa vie semblait avoir prit un autre tournant…un tournant plus sympathique.
Il avait réussi à détruire définitivement ses vieux démons, et il était sûr maintenant qu’ils ne reviendraient plus jamais le hanter. De plus, Alfred était à nouveau là, et recommençait à lui faire confiance, même si ça ne se faisait que petit à petit. La route serait encore longue pour retrouver qu’il avait perdu, mais il y avait de l’espoir, et les premiers pas étaient faits des deux côtés.
Et ça lui faisait plaisir.
Mais ce qui lui faisait le plus de bien, c’était que Harvey Dent était sauvé. Il l’avait envoyé en Europe reprendre des forces, et surtout retrouver une santé psychologique qu’il avait perdue. Son ami ne parlait plus et ne mangeait que trop peu, mais c’était normal vu tout ce qu’il avait vécu.
A son retour, Bruce s’occuperait du côté physique de ses problèmes en faisant l’impossible pour enlever les cicatrices visibles de son séjour chez le Joker. Mais d’abord, Harvey devait effacer les cicatrices psychologiques, et c’était pour ça que ce voyage en Europe chez certains des amis de Wayne ne pouvait que lui faire du bien.
Oui. Il était confiant pour Harvey Dent, et ça aussi, ça lui faisait plaisir.
En plus, Antonio Simeoni se faisait aussi rare sous le nom de Cole Cash. Quand Batman avait appelé la police pour qu’ils viennent cueillir les hommes qu’il avait mit KO avant de s’occuper du Joker, les flics n’avaient pas retrouvés le cerveau de l’affaire. Il était porté disparu pour l’instant, mais le justicier savait qu’il referait bientôt surface…et il l’attendait de pied ferme, sachant très bien qu’il avait désormais un avantage décisif sur lui en connaissant son identité et en l’ayant cassé psychologiquement.
« Hum… »
Bruce sourit en regardant Chicago du haut de son perchoir. La ville semblait belle, maintenant. Les gangs étaient calmés, la police avait retrouvée de sa superbe, Simeoni était caché au fond d’un trou et Harvey était sauvé. Evidemment, il était quelque peu frustré de n’avoir pas retrouvé le corps du Joker, mais celui-ci ne pouvait avoir survécu à sa chute, surtout pas avec ses blessures…c’était impossible.
Il ne pouvait qu’être mort. La logique ne laissait aucun autre choix possible.
Oui, la ville semblait belle, et sa vie allait mieux aussi. Surtout qu’il avait apprit après avoir sauvé Harvey que James Gordon s’était évadé de la prison où il avait été mit quelques heures à peine après son entrée. Son « collègue » n’avait donc pas eut à subir des horreurs sans nom, et il était maintenant loin de Chicago. Et savoir ça lui avait fait un bien fou, lui avait enlevé un grand poids.
Au fond, il aurait aimé le revoir pour l’aider et lui dire qu’il pensait à lui. Mais il savait que ça serait trop dangereux pour James de revenir, et il ne pouvait lui en vouloir. Il devait maintenant mener sa vie au mieux…et préparer sa réhabilitation. Et Wayne était déjà en train de constituer un dossier pour l’aider le moment venu.
Soudain, une alarme se fit entendre. Batman sourit à nouveau. Oui, la ville semblait aller mieux. Oui, ses proches étaient sauvés, ou du moins hors de danger. Et oui, son existence semblait devenir plus calme. Mais certaines choses ne changeaient pas. Chicago était toujours sous le coup des criminels…et il était toujours là pour la protéger.
C’était ainsi. Et il ne pouvait ni ne voulait aller contre ça, tandis qu’il s’élevait dans les airs avec son grappin et sa corde, prêt à protéger les innocents et à stopper ceux qui le méritaient…ceux qu’il haïssait…et ceux qui craignait son nom, et qui le craindrait à jamais…
Sous terre…Un lieu perdu et oublié…Un endroit sombre et glauque où coule une rivière verte…Une forme sort de l’eau verdâtre…Une forme réussit à s’extraire du courant avec énormément de difficulté…Un râle de souffrance sort de sa gorge, mais la forme continue…Elle arrive enfin sur le sol dur et froid, et ne bouge plus…Elle est recouverte du liquide…Elle semble morte…Elle semble ne plus pouvoir bouger…
Mais soudain…La forme parle…Non…Elle rit…Elle rit d’un rire monstrueux…d’un rire inhumain…d’un rire animé d’une envie folle de vengeance et de meurtre…d’un rire qui veut dire que rien n’est fini…et que tout ne fait que commencer…