Auteur : Ben Wawe
Date de parution : Juin 2007
J’aime cette ville.
J’aime cette cité vivante, regorgeant d’êtres qui y gravitent, même si ils ne semblent qu’être des fourmis vu d’en haut.
J’aime cette construction faite il y a des décennies maintenant, et qui abrite des millions d’hommes et de femmes différents. Oui. Nous sommes tous différents. Nous sommes tous uniques. Nous sommes tous des individus. Mais une chose nous unit. Une chose nous rassemble. Une chose nous fait passer de l’état individuel. La joie. Le bonheur. Le rire. Le rire nous rassemble. Et je dois tout faire pour que ça continue.
Le rire est le propre de l’homme, dit-on. Je le crois, mais je crois aussi que l’homme a besoin qu’on le lui rappelle. La vie est dure, nous avons de grandes épreuves à traverser, surtout en ces temps troublés. Et il est donc facile de tomber dans une déprime, dans une envie de mal être et de tristesse…oui, c’est facile de tomber là-dedans. Mais il ne faut pas. Non. Il ne faut pas faire ça. Ce n’est pas bien, voyez-vous.
Nous devons rire.
Nous devons être heureux.
Bien sûr, je sais que plusieurs vont me répondre qu’on ne peut pas rire de tout, qu’on ne peut pas toujours rire, que la vie est dure et que ça fait du bien de se laisser aller…mais là, moi, je dis non. Je dis non, vraiment. Nous devons rire. Nous devons être heureux. Nous devons sourire. Oui. Sourire. Il faut absolument sourire, voyez-vous ?
Sourire est une des plus belles choses au monde. Cela illumine votre journée, cela fait plaisir à ceux à qui vous le faites et cela montre la beauté du monde. Il faut rire, mais il faut aussi sourire. C’est indispensable dans notre société tellement sombre et tellement violente, avec tous ces fous qui se tirent dessus ou s’entretuent avec des effets spéciaux…il faut sourire pour lutter contre ça. C’est la seule solution.
Malheureusement, tout le monde ne pense pas comme moi.
Malheureusement, beaucoup de gens disent, osent dire même que sourire n’est pas important. Et ça, je ne peux pas le supporter. Depuis des années maintenant, j’ai donné ma vie pour que les gens sourissent…je l’ai vraiment sacrifié ! J’ai fais vœu que tout le monde sourisse et soit heureux, et je ferai tout pour que ça arrive. Absolument tout, oui.
Et je l’ai déjà fais, en fait. Mais ma mission n’a pas été comprise. On m’a prit pour un fou. On m’a prit pour un monstre. Imbéciles. Stupides crétins. Débiles. Ils n’ont pas compris mon message, ils n’ont pas compris la portée de mes actes. Je fais don de mon existence aux autres, et eux veulent m’arrêter et me stopper.
Ce sont eux, les monstres, pas moi.
En fait, je sais pourquoi ils m’ont fais ça.
Oh, bien sûr, ils ont tous dis qu’ils m’ont arrêté parce que je suis fou, parce que je suis un détraqué et un dingue…ils ont dis tout ça, oui. Pour me nuire, pour nuire à mon message. Pour essayer de faire croire qu’ils avaient raison de m’enfermer et de m’empêcher d’aider les gens. Mais j’ai compris pourquoi ils ont fais ça…pourquoi ils veulent me faire ça. Ils sont jaloux. Ils sont jaloux de moi. Ils sont jaloux de ne pouvoir aider les gens comme je le fais, et ils ne le supportent pas. C’est pour ça qu’ils m’ont enfermé. Oui. C’est pour ça.
Mais je suis sorti ! J’ai réussi à me débarrasser de cette prison qu’ils avaient bâtie autour de moi, et je suis désormais libre. Libre de pouvoir vous aider. Libre de pouvoir vous apporter le sourire et le rire qui vous manquent mais qui vous sont pourtant indispensables. Libre de pouvoir vous sauver de ce monde, oui. Je suis libre. Et je vais vous aider, je vous le promets.
Mais avant, je dois faire quelque chose.
Avant, je dois faire une œuvre bassement personnelle.
Oh, je sais, vous êtes sûrement déçus de voir que je fais passer mes envies avant vous alors que j’ai sacrifié ma vie pour vous, selon ce que j’ai dis, mais je pense que vous pouvez me comprendre. Jadis, on m’a prit quelque chose…quelque chose de très précieux, même.
Et j’ai la possibilité de me venger, là. Donc je ne peux m’en priver, n’est-ce pas ? Ca serait aller contre mes principes, contre moi-même de m’empêcher d’avoir ce bonheur, non ?
Je vais me venger, donc. En fait, j’ai déjà commencé à le faire. Ca fait depuis des semaines que l’homme responsable de mes malheurs est avec moi, dans mon antre si je puis dire. C’est vraiment mon antre, oui. Je connais cet endroit comme ma poche, et il revêt une signification particulière par rapport à la relation que j’ai avec l’homme qui y gît, marqué par mes différents sourires pour essayer de lui redonner ce sourire qu’on me refuse depuis qu’il s’est incrusté dans ma vie…mais ce n’est pas grave, lui aussi a droit au bonheur malgré ce qu’il m’a fait, et je ne pouvais le laisser si triste et si seul dans cette chambre d’hôpital : lui aussi a droit au sourire avant de mourir, non ?
Cet homme est Harvey Dent.
Et il va très bientôt mourir, en fait.
Je ne vais pas dire quelle relation étrange j’ai avec Harvey…ce n’est pas vraiment important. Sachez juste que après cela, tout sera différent. Ma mission pourra réellement reprendre. La croisade repartira. Le monde a besoin de moi. Vous avez besoin de moi. Et je répondrai présent.
Je suis là pour vous, vous savez. Je suis là pour vous redonner le sourire, pour vous redonner l’envie de rire et d’apprécier cette vie qui peut basculer d’un instant à l’autre dans la déprime et le tragique. Je ne fais pas ce choix, moi. Je fais le choix de vivre l’existence qu’on nous donne sous le côté de la bonne humeur, et je veux que vous en fassiez de même.
Il faut rire dans la vie, mes amis.
Il faut sourire dans notre brève existence.
Et je vais vous aider à faire ça. Bien sûr, ça risque de faire mal, mais c’est pour votre bien. Vous êtes tellement mieux avec des sourires…Vous êtes tellement plus sympathiques avec cette bouche grande ouverte…Evidemment, je dois vous l’ouvrir totalement avec mon couteau, mais c’est tellement mieux…Oui…C’est tellement mieux qu’au fond c’est ce qu’il faut faire, non ?
Après Harvey, je m’occuperai de vous, mes amis. Je suis là pour vous…je le serai toujours. Vous avez besoin de moi, et je vous répondrai présent. Vous avez besoin du Joker, cet être créateur de bonne humeur et symbole du rire…et je serai le Joker pour vous, alors. Je vous montrerai comment bien vivre votre vie, et j’assumerai ce rôle, ce symbole. Je suis là pour vous. Et je m’occuperai de vous…Quoi qu’il en coûte…
« Tuuut…Tuuut…Tuuut…Merkel.
- Bonsoir, inspecteur Merkel.
- Patron ?
- Oui.
- Je peux faire quelque chose ?
- J’aimerais que tu me rendes un service, Merkel.
- Quoi, patron ?
- Je veux que tu me suives Gordon.
- Encore ?
- Oui.
- Ça a pas marché la première fois, patron…On a pas pu l’arrêter, on a pas eut les preuves…
- Nous n’avons pas eus les preuves parce que Gordon a eu bonne presse en stoppant la guerre des gangs. Mais ça ne veut pas dire que son lien avec Batman est rompu et qu’il n’est plus coupable d’avoir donné des informations confidentielles à un danger public. Gordon a bien agit, mais il doit arrêter quand même. D’accord ?
- Ouais, mais…
- Pas de mais. Vous me suivez ?
- Ouais.
- Bien. Je veux que vous le suiviez. Je veux savoir tous ses faits et gestes.
- Il va de nouveau voir ma présence et tout comprendre.
- Ce n’est pas grave.
- Ah ?
- Oui. Gordon doit avoir peur. Un homme terrifié fait des erreurs. Nous allons multiplier la surveillance qu’il va subir, et nous allons menacer sa famille.
- Hein ?
- Oh, il ne leur arrivera rien. Juste quelques lettres et leur enfant qui rentre trop tard à cause d’une erreur…vous voyez le genre.
- Ouais…
- Gordon aura alors peur, et il fera une erreur. Et nous serons là pour l’arrêter. Nous pourrons sortir nos preuves contre lui, et nous pourrons enfin être débarrassé de lui.
- Et pour Batman ?
- J’ai quelqu’un pour lui, ne t’en fais pas.
- Qui ?
- Tu n’as pas à le savoir. Suis mes directives, Merkel, et je m’en souviendrais. Bonne nuit.
- Bonne nuit, patron.
- Tuuut…Tuuut… »
Lentement, il entra dans le bureau.
Utilisant un petit tour avec deux simples légères tiges de métal apprit dans les bas fonds de New York, Batman parvint à pénétrer dans la pièce qui faisait jadis office de quartier général à Harvey Dent, un de ses seuls amis et procureur général de Chicago. Il soupira lentement en s’asseyant sur le rebord de la fenêtre, observant d’un œil las et mélancolique dans cet endroit parfaitement vide depuis des semaines maintenant.
La pièce était assez simple, en fait.
Composé uniquement d’un bureau devant la fenêtre, avec un ordinateur et des tonnes de dossier dessus, on ne voyait que deux chaises en face du meuble, avec un canapé lit sur la droite. En face se trouvait la porte pour entrer et sortir, et sur la gauche était placée une armoire encore ouverte sur des dizaines de dossiers en attente. Une maigre plante verte était posée à côté de la fenêtre à gauche, mais le manque de soin des dernières semaines la tuait à petit feu, malheureusement.
Bruce ne se sentait pas très bien. Se sentant toujours coupable du destin de son ami, ayant encore du mal à accepter de n’avoir pu être là les deux fois où Harvey avait eu besoin de lui, il savait qu’il devait tout faire pour éviter d’aller ainsi vu ce qui arrivait quand il ne se contrôlait…mais c’était difficile. Tout le poids de sa honte et de sa culpabilité tombait sur ses épaules, et il se demandait si il arriverait à tenir, cette fois-ci…Si il ne retomberait pas dans cette folie qu’il haïssait tant, mais qui le guettait toujours, malheureusement…
« Arrête avec ça…
Ne pense pas à ça…
Pense à Harvey et pense à celui qui le retient prisonnier…Ce taré a une dent contre lui, c’est sûr…Tu dois trouver des informations sur lui…Alors au boulot… »
Encore une fois, Wayne se parla pour éviter de retomber dans ses psychoses et ses problèmes, et sourit légèrement en pensant que cette méthode, pour aussi stupide et sans intérêt qu’elle semblait être, portait quand même ses fruits. Il n’avait plus de crises depuis des semaines maintenant, et il n’avait même plus d’envie d’extrême violence dans ses combats. Il commençait peut-être à guérir, au fond…Oui…Il commençait à guérir…Mais la route serait encore longue jusqu’à la guérison totale…Si tant est qu’elle existe, bien sûr…
Mais le médecin chassa ces pensées de son esprit.
Décidant de se concentrer sur sa recherche d’indices sur l’origine et l’identité de celui qui avait enlevé Dent et qui le torturait très certainement, Batman se dirigea alors lentement et discrètement vers l’armoire ouverte et pleine de dossiers, ne voulant pas alerter un quelconque couche tard dans le bureau du ministère public de Chicago.
Là, Bruce se mit en action. Sachant que l’homme qui était responsable de tout ça était un ancien « client » de l’asile psychiatrique qui se trouvait très proche de l’hôpital où avait été Dent, à quelques mètres à peine pour être précis, il savait que son identité ne pouvait se trouver dans les dossiers récents vu qu’ils n’étaient pas sur les fichiers informatiques nouveaux de l’endroit où il avait été enfermé. Il avait donc décidé de chercher dans les très anciennes affaires de Harvey, espérant que son inspiration et celle d’Alfred soient bonnes…sinon, il n’avait aucune piste pour retrouver son ami, et ce n’était pas une chose qu’il voulait envisager pour l’instant.
Lentement, donc, il commença.
Epluchant chaque dossier, passant chaque page en revue en tenant sa petite lampe entre ses dents, ses yeux filaient sur les lignes pour essayer de trouver un nom, un détail, un indice, bref quelque chose qui pourrait lui faire penser que ce dossier était bien celui de l’homme qu’il recherchait désespérément. Wayne se donnait réellement à fond, utilisant à la fois ses vieilles habitudes d’étudiant en médecine pour lire plus rapidement et ses talents de détective pour trouver des indices ou des mots clefs nécessaires à son enquête. Mais malheureusement…ça ne donnait rien.
En effet, malgré son enthousiasme, malgré sa détermination, malgré son intense force morale pour retrouver son ami disparu et torturé…il ne trouvait rien. Aucun indice, aucun nom, aucune affaire ne se rapportant à un type devenu fou qui tailladerait les visages de ses victimes pour en faire des immenses sourires.
Non, rien. Absolument rien.
Bien sûr, Batman s’était doué que ce genre de choses pouvait arriver, et avait aussi cherché des informations sur des « clients » de Dent susceptibles de troubles psychologiques, mais les analyses des experts qu’il trouvait dans les dossiers ne parlaient jamais de tendances à la destruction d’autrui.
Il ne s’y connaissait pas vraiment dans la psyché des gens et le savoir qu’on pouvait en retirer, mais Wayne avait quand même suivi quelques cours à l’université, et avait retenu certaines choses. Et rien dans ce qu’il avait sous les yeux ne faisait « tilt » dans son esprit, rien ne retenait réellement son attention…il n’y avait rien, réellement. Et ça le désespérait.
Est-ce qu’il s’était trompé ?
Est-ce qu’il avait fait une erreur ?
Est-ce qu’il avait pensé à tort que l’homme qui avait enlevé Harvey était un de ses anciens cas ?
Non…il ne pouvait pas s’être trompé. Une coïncidence pour expliquer l’enlèvement de son ami ne pouvait être quelque chose de logique. L’homme qui avait prit le corps inconscient de Dent était quelqu’un qui s’était déchaîné sur les gardes et le personnel hospitalier, et avait fait preuve d’une furieuse détermination à s’emparer du procureur général.
Ça ne pouvait être une coïncidence. Non. C’était impossible. Trop de facteurs entraient en jeu pour ça.
Soudain, alors qu’il reposait le dernier classeur de dossiers sans y avoir trouvé quelque chose, Batman entendit…quelque chose. Une voix connue. Une voix très connue, même. Qu’il appréciait entendre jadis, mais dont il se méfiait maintenant. Une voix qu’il n’aimait plus vraiment, même si l’homme qui la possédait quelqu’un qu’il respectait malgré ce qu’il y avait entre eux. Une voix…
« Je me disais bien que je vous trouverais là. »
Une voix qui appartenait à James Gordon, en fait.
« Bonsoir, inspecteur. »
Bruce sourit légèrement.
Il était dos à la porte, tenant sa petite lampe entre ses dents. Rapidement, il prit deux Batarangs dans sa ceinture avant de se tourner très lentement vers Gordon, laissant tomber sa lampe vers sa main droite, alors qu’il avait ses deux armes dans son autre paume.
« Content de vous revoir.
- Je pensais pas que tu dirais ça.
- Pourquoi ?
- Je croyais que tu aurais peur de moi. De te faire arrêter.
- Je n’ai plus peur depuis longtemps, vous savez.
- Oui. Et c’est bien ça le problème. »
Le flic ferma la porte derrière lui, signe clair qu’il n’était pas là pour l’arrêter, sinon il l’aurait laissé ouverte pour permettre l’arrivée de secours possibles. Wayne se calma donc légèrement, tenant quand même toujours ses deux armes dans sa main au cas où ça tournerait mal…ce qui était malheureusement très possible vu l’inimité entre les deux hommes depuis quelques semaines.
« Mais je suis pas ici pour ça. »
Le regard de l’inspecteur était dur et froid, il pouvait le voir malgré la pénombre du bureau. Gordon portait comme à son habitude un imperméable beige froissé et humide, et sa moustache semblait avoir baignée il y a peu dans un café vu l’humidité qu’elle semblait dégager avec les quelques gouttes qui en tombaient rapidement.
Il semblait aussi très fatigué, mais c’était une habitude pour les flics de Chicago que d’être harassé par le travail de protéger cette cité continuellement harcelée par le crime depuis plus de quatre vingt ans maintenant.
« Je suis ici pour Harvey. »
Les mots avaient été lâchés sur un ton neutre et froid.
Les yeux du flic étaient devenus plus vivaces et dynamiques à ce moment-là, et le médecin lui-même se redressa encore plus. Il savait que Gordon n’allait pas l’arrêter. Il savait qu’il ne lui voulait pas de mal. Tous deux appréciaient Dent, et tous deux voulaient la même chose : arrêter le chien qui l’avait enlevé, et sauver leur ami. Et pour ça, les deux hommes semblaient prêts à tout, même à faire alliance avec l’être dont ils se méfiaient le plus…et qu’ils respectaient le plus, aussi.
« Moi aussi. »
Batman avait répondu du même ton que l’homme devant lui, désirant accentuer la tension de la situation en espérant y tirer profit si celle-ci tournait mal, chose qu’il pensait impossible même si l’expérience lui avait malheureusement apprit que ce qui ne devait jamais arriver arrivait quand même.
« Vous êtes venus faire quoi, ici ? »
Wayne sourit légèrement à ces mots.
Il avait décidé de tout révéler au flic, mais celui-ci avait été plus rapide que lui…c’était ce qu’il aimait chez lui. Sa capacité à comprendre rapidement la situation et le moment pour parler, et d’utiliser cette connaissance à bon escient. Il sourit donc légèrement, avant de commencer à lui parler d’une voix calme et posée, essayant quand même de paraître imposant et charismatique…une sorte de réflexe qu’il avait quand il était dans le costume et dont il n’arrivait pas à se débarrasser, malheureusement.
« Je suis venu chercher le dossier de celui qui a enlevé Harvey.
- Comment ça ?
- Je pense que celui qui l’a enlevé est un de ses anciens cas, on va dire. Je pense que ce type est fou, mais qu’il a décidé, avant de tomber à nouveau dans la folie, de « s’occuper » de Harvey, qui doit tenir le rôle de créateur dans son esprit. Harvey a très certainement dû le mettre en prison ou lui faire quelque chose, de manière consciente ou non, et il lui en tient rigueur, ou l’apprécie pour ça. Et il veut donc avoir son ennemi ou idole près de lui…et sûrement lui montrer combien il a apprécie son geste. »
Bruce sourit encore à ce moment-là. Il s’attendait évidemment à ce que Gordon tombe des nues et soit totalement en son pouvoir en l’ayant impressionné, et se préparait déjà à utiliser cette influence qu’il avait sur lui, mais…ça ne se passa pas vraiment comme il l’avait désiré. Ça ne se passa pas du tout comme il l’avait désiré, en fait.
« Oui. J’ai pensé à ça aussi. »
Batman ne s’attendait pas à ça. Fronçant les sourcils, se demandant si l’inspecteur plaisantait ou si il était sérieux, il sentit son cœur s’accélérer légèrement même si il lui commanda de revenir à la normale pour ne pas faire de bêtise inconsidérée par la suite.
« Comment ça ? »
Le sourire naissant de la victoire apparut sur le visage de Gordon, et le médecin comprit qu’il s’était fait avoir. James sortit de son imperméable un petit dossier en carton, et son interlocuteur sut déjà ce qu’il allait dire avant même que les mots ne sortent de la bouche du flic devant lui, qui savourait apparemment d’avoir pu damer quelque peu le pion à celui qu’on disait le meilleur détective de la ville, ce qui énervait évidemment beaucoup tous les policiers de Chicago.
« J’ai aussi pensé en analysant tout ça que Dent ne pouvait qu’être lié à ce type. Je suis donc venu fouiner un peu ce soir pour trouver le dossier…et je l’ai trouvé. Puis, je suis allé aux toilettes, et je vous ai découvert dans le bureau. J’ai eu beaucoup, beaucoup de chance sur ce coup-là, et j’ai décidé de lire ces quelques pages pendant que vous faisiez votre petite recherche, histoire d’en savoir un peu plus avant que vous ne commenciez les grandes manœuvres. »
Gordon souriait toujours.
Wayne fulminait de n’avoir pas été assez rapide, et il sentit la rage lentement monter au fond de lui. Il avait envie de se déchaîner sur l’inspecteur, de lui faire ravaler son sourire, mais…mais il se retint. Il ne devait pas faire ça. Il ne devait pas penser à ça. Le flic était un allié dans la recherche et le sauvetage de Harvey, et il était quelqu’un de respectable. Il prenait juste une petite revanche des semaines où lui, Batman, avait été supérieur et arrogant face à la police, et c’était bien compréhensible…bien humain, même.
Bruce prit donc une grande inspiration avant de parler d’une voix calme et posée à l’homme devant lui, retrouvant sa sérénité au fil des secondes qui s’écoulaient dans le bureau de Dent où ils se trouvaient.
« Et qu’est-ce qu’il dit ? On sait l’identité de ce type ?
- Oui. Mais ça ne servira pas à grand-chose : il n’a plus aucune famille.
- Embêtant. On sait pourquoi il en veut tellement à Harvey ?
- Oui… »
Gordon soupira et baissa légèrement les yeux. Le médecin comprit immédiatement que quelque chose n’allait pas, et que le flic avait quelque chose de difficile à lui dire, certainement sur Dent.
« Alors ? Qu’est-ce qu’il y a ?
- Et bien, il y a… »
James hésita quelques instants, quelques secondes où Wayne comprit réellement que Harvey avait apparemment une grande responsabilité dans tout ça sinon son allié ne mettrait pas autant de temps à parler, avant qu’il ne relève les yeux vers le protecteur de la ville. Il lui planta ses yeux dans les siens et afficha une détermination sans faille avant de parler d’une voix froide et dure, apparemment assez touché par ce qu’il avait apprit quelques moments plus tôt à la lecture du dossier.
« Il y a que Harvey Dent est responsable de la mort de la femme et de la fille de l’homme qui nous occupe. Il y a que c’est lui qui est responsable de leurs décès, et que c’est pour ça que ce type lui en veut…voila ce qu’il y a, Batman. »