Histoire : Firediablo
Date de parution : Février 2006
La mare de sang qui se diluait dans les flaques de pluie… Le petit crac ! quand le crâne avait heurté le sol. Les hurlements de douleur, à chaque os brisé, le feu qui dansait en brûlant la drogue, qui faisait tant de victimes. Les plaintes, avant l’achèvement, la supplication, les pleurs. C’était si jouissif ! Savoir que le pauvre homme dont tu arraches les membres souffre à en mourir. Son cœur s’arrête de battre tandis que le tien va de plus en plus vite. Savoir que chaque fois que tu appuieras sur les fractures ouvertes, il te suppliera, comme un enfant appelle ses parents…
« Eddie, éveilles toi.
Eddie Brock releva la tête. Il regarda Mickael Twoyougnmen, son Maître, mais celui ci restait impassible, fixant l’horizon où le Soleil allait bientôt se coucher alors qu’il n’était même pas 16 heures.
Il oublia un temps ses souvenirs de la nuit dernière et reporta son attention sur le bâtiment devant lequel ils venaient d’arriver. En haut, en grandes lettres illuminées, était écrit TRASHER en grand.
« Bien, c’est là qu’il se trouve.
-Il bosse là ?
-Il est un SDF sans cette famille. Ils l’hébergent, le nourrissent, il couche avec la fille. Il est gagnant dans tous les cas. Mais il est trop dépendant, c’est ce qui fait de lui un Renonçant, impossible de se débrouiller seul. Entre, tâche de l’emmener avec toi.
-S’il n’est pas là ?
-Tire le maximum d’infos, sans violence. Les mots sont plus persuasifs que les poings avec les femmes.
-Et toi ?
-C’est ton instructeur. Je ne suis chargé que de te mener ici, à toi de le convaincre. Mais je t’aiderais, ne t’inquiètes pas. Tu n’auras qu’à m’appeler.
-Bien.
Mickael se retourna et appela un taxi. Eddie ne le salua même pas et entra au moment où la voiture partait.
Dinglinging !
Personne. A cette heure, il n’y a personne bière à la main, personne à critiquer Bush, personne à raconter sa dernière nuit de luxure. Ils travaillent tous, au lycée ou derrière un bureau. L’Homme Blanc est tombé bien bas.
Eddie s’avança en toisant le bar. Sombre, les verres lavés, les boissons prêtes, on attend l’heure de pointe. Les volets des fenêtres sont à demi clos. Un bar typique, bien que moins gai que la plupart de ceux où Eddie ait pu poser le pied. Une décoration austère, limite de deuil.
Il y a eu un mort ici.
Tué par un Noir.
Vengé par le Noir.
Pas assez de souffrances.
Le Renonçant est faible.
Mais il sait.
Il sait comment faire la Justice.
Eddie fit taire les voix dans sa tête. Il détestait la sensation d’entendre en permanence des murmures. Mais ses nouvelles responsabilités valaient bien d’avoir en permanence les Conseils des Sages. Les Sages, les Ancêtres, sont les anciens Avatars du Dieu, ils vivent, combattent, meurent et se fondent dans le costume. Leur dernière occupation est de conseiller le dernier Avatar, qui sera lié au costume toute sa vie. Sauf s’il y renonce…
« Qu’est ce que je peux faire pour toi ?
Eddie se tourna et vit une jeune fille, à la blondeur éclatante dans l’obscurité. Une blonde naturelle, c’est si rare. La rareté faisant la convoitise, Eddie se dit que Reilly ne manquait vraiment pas de goût. Même en voyant le visage dur de la jeune fille, il continua de sourire.
« Salut, Eddie Brock. Je cherche Reilly, Ben Reilly, on m’a dit qu’il créchait ici.
La jeune fille s’empourpra et sembla retenir une colère.
Il l’a fait pleurer.
Elle le hait.
Et l’aime.
Il fait du mal.
Il ne peut pas !
Il est l’Avatar.
Etait.
« Gwen Stacy, dit elle en dévisageant Eddie. Non, il n’est plus ici depuis quelques jours… Pourquoi, t’es un de ses amis ? Tu le connais ? Tu sais où il est ?
Les questions cassantes et la voix retenue ne laissaient plus aucun doute : elle était furieuse. Eddie fit un geste d’apaisement. Va falloir jouer subtil, pensa-t-il.
« Non, je ne le connais pas personnellement. Mais j’aimerai te parler de lui, puisqu’il n’est pas ici. Es-tu seule ? Dans la maison, je veux dire.
-J’ai un taser dans ma poche, tu m’approches et tu bouffes la poussière.
-Non, je veux te parler en privé. Aie-je l’air d’un violeur ? Au contraire, au contraire.
-Ma mère est allée chercher à bouffer, dit elle avec un regard intrigué.
Eddie s’assit, Gwen fit de même. Elle resta néanmoins à une bonne distance. Eddie en profita pour l’observer plus attentivement. Dans sa frustration, la jeune Stacy avait mit des vêtements très tentants. Elle semblait vouloir rendre Ben jaloux. Une jupe frivole, un T-shirt très plongeant, des talons hauts. Eddie eut du mal à se retenir.
« Tout d’abord, j’aimerai savoir si tu sais où est Reilly ?
-Non, il a disparu il y a trois jours. Encore.
-Tu saurais où il se trouve ?
-Aucune idée. Il part souvent et il dit très rarement où il va.
-Tu sais pas quand il rentrera ?
-Non.
-Tu sais ce qu’il fait quand il part en vadrouille ?
-Non, dit elle d’un ton pas très convaincante.
-Ne mens pas, s’il te plait.
-Je ne sais pas ! s’emporta-t-elle.
-Donc tu sais.
Gwen se leva et sembla hésiter à gifler Eddie. Celui ci continua à sourire.
« Ne t’inquiète pas. Je suis aussi au courant. Tu peux tout me dire.
Gwen l’observa avec de grands yeux.
« Comment ça ? Tu sais quoi ?
-Je sais que Reilly est l’Avatar. Enfin, Spider Man comme vous l’appelez.
Gwen se rassit lentement en l’observant.
« Comment tu…?
-Je suis pareil. Je viens de là où il habitait.
-Il le sait ?
-Non, c’est pour ça que je le cherche. Je peux l’aider, et il peut faire de même.
La jeune fille blonde se trémoussa sur son siège. Eddie la regarda en souriant sereinement. Il voyait dans ses gestes qu’elle ignorait si elle reverrait Reilly un jour. Allait-il revenir ? se demanda Eddie
Il reviendra.
Il l’aime.
Trop.
Il reviendra.
Elle le sait.
Elle l’espère.
Pars.
Dis lui de te contacter.
Il reviendra.
« Ecoute Gwen. Je ne vous veux pas de mal à toi et à Ben. Je veux juste le rencontrer, au plus vite. Il traverse une mauvaise passe, je le sais, et il aura besoin de mon aide.
Eddie se releva d’un geste vif. Gwen l’imita, mais plus lentement. Elle semblait perdue et un peu fascinée par le jeune homme devant elle. Il se dirigea vers la sortie, et en passant vers elle, il lui tendit une carte de visite.
« Quand il reviendra, appelle moi s’il te plait. Je viendrais dans l’heure.
Elle saisit lentement le papier et y lu le numéro de téléphone d’Eddie. Lorsqu’elle releva les yeux, elle ne vit que la porte se refermer et la petite clochette tinter. Eddie était partit, de la même façon que Ben, sans rien dire.
« Maître ? Mickael ?
-Oui, Eddie je t’écoute.
Le lien qui unissait Eddie à Michael, son Maître, leur permettait un sorte de « contact » comparable à de la télépathie. Leur Dieu Araignée usait de son pouvoir pour leur permettre de communiquer quand bon leur semblait, sans avoir recours à la technologie humaine.
« Pas là. Il n’y a que la fille.
-Ne pense pas à elle, cela perturbe les communications, toutes tes mauvaises pensées... Quand reviendra-t-il ?
-Aucune idée, mais elle me contactera. Il va falloir attendre.
-Nous attendons depuis des mois, nous attendrons d’autres jours. Eddie, en venant, j’ai appris que des Traîtres allaient amener les substances qui malmènent nos Frères. Encore. Occupe toi d’eux. Ils sont au port, quai 29. Que le Dieu et les Ancêtres soient avec toi.
Eddie rouvrit les yeux et les leva au ciel. La Lune était pleine. Une de ces nuits propices aux légendes et aux peurs. Il y aurait un nouveau mythe ce soir.
Peu à peu, la seconde peau, celle offerte par le Dieu le recouvrit, lui ses vêtements et son statut d’homme. Entièrement recouvert de noir et parsemé de blancs, les voix reprirent leur vacarme assourdissant et assommant dans la tête du jeune Brock, alors qu’il sentait la puissance monter en lui.. Il était désormais le Nouveau Justicier Arachnéen mais il était loin des idéaux de Ben Reilly.
Tissant une toile qui sortit de son poignet, il s’y hissa et se balança dans la nuit. L’ombre du nouveau Spider Man se déplaçait sur les fenêtres de New York. Mais l’ancien Spider Man n’était plus. Le nouveau était différent, bien différent…